Rat noir, moustique tigre, chat sauvage, miconia, poisson lion sont quelques-unes des espèces exotiques envahissantes les plus nocives Outre-mer. Leurs impacts sont majeurs sur les espèces locales, la santé et l’économie de ces territoires.
Les invasions biologiques sont d’ailleurs considérées dans les îles d’Outre-mer comme la menace numéro 1, pourtant, malgré le danger, elles se répandent bien souvent dans l’indifférence. C’est pourquoi, un rapport sur les invasions biologiques est publié le 4 septembre par l’IPBES, la plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services éco-systémiques, un panel d'experts internationaux réunis sous l'égide des Nations Unies.
L’évaluation mondiale de la biodiversité et des services écosystèmiques qui avait été publié à Paris en 2019 avait conclu qu’une des cinq grandes causes de perte de biodiversité était les espèces exotiques envahissantes. Donc les 140 gouvernements qui sont les membres de l’IPBES ont demandé aux chercheurs du monde entier de produire un état des lieux sur cette question et en particulier de leurs impacts sur la biodiversité, l’économie, la santé etc.
Anne Larigauderie, secrétaire exécutive de l’IPBES
Le rapport a été préparé par une centaine de scientifiques issus de toutes les régions du monde. Ils ont étudié 13 000 publications scientifiques ainsi que des savoirs autochtones et locaux pour faire le point sur les invasions biologiques. Le texte final fait prêt de 900 pages et comme le GIEC avec ses rapports sur le climat, une compilation en quatre thèmes sera proposée aux autorités.
Le premier thème fait un état des lieux sur la question des espèces exotiques envahissantes. Le deuxième propose d’anticiper sur le futur en faisant le point sur ce qu’on sait à l’heure actuelle afin de savoir quelles sont les régions qui seront les plus impactées. Le troisième volet porte sur les actions à mener. Le quatrième sur les aspects de gouvernance pour mettre en œuvre ces actions et arriver à avoir un impact sur la cause de cette perte de biodiversité.
Anne Larigauderie, secrétaire exécutive de l’IPBES
Le rapport fournit également des chiffres sur le coût de ces invasions biologiques. Un coût tellement exorbitant, en particulier dans les îles comme celles d'Outre-mer, qu'il est bien plus économique de veiller à les limiter.
Il existe des solutions qui passent par la prévention. On connaît les mécanismes d’introduction de ces espèces dans les territoires comme par exemple via les eaux de ballastes transportées pour assurer l’équilibre des navires. Les plantes proposées dans les jardineries sont pour certaines exotiques et potentiellement invasives. Ainsi la recommandation serait d’éviter de les choisir par les particuliers ou les mairies lorsque l’on doit végétaliser un site.
Hélène Soubelet directrice générale de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité
Toutefois, lutter contre les espèces exotiques envahissantes est d’autant plus compliqué que cela suppose d’avoir à les éliminer. Tuer une espèce qu’on trouve sympathique ou arracher une plante alors qu’on la trouve jolie est contre-intuitif. Certaines initiatives ont d’ailleurs suscité de fortes résistances.
À la Réunion, une association de défense des animaux a attaqué en 2017 un arrêté de la préfecture qui autorisait l’éradication des chats errants et en particulier des chats harets (chat sauvage) afin de préserver les Pétrel de Barau et les Pétrel de Bourbon, deux espèces d’oiseaux protégées et endémiques de l’île.
C’est pourquoi, les spécialistes attirent l’attention des décideurs sur la nécessité de multiplier les initiatives en amont comme la biosécurité dans les ports et les aéroports pour limiter les invasions, des mesures bien moins chères et problématiques que celles engagées quand elles sont présentes.