Au commencement, elle est assise à une table et répond au téléphone. Et parle, parle. N'ayez aucun doute : dans ce spectacle, Marion Schrotzenberger danse bel et bien. Et elle danse très bien. Les figures exécutées dans Si Pina m’avait demandé…, elle les a conçues, chorégraphiées.
Mais un peu de patience : avant que nous en voyions le résultat sur la scène de La Chapelle du verbe incarné, il y a eu toute une chaîne de montagnes qui auraient pu paraître infranchissables et que Marion raconte.
Marion Schrotzenberger a du prendre le temps. Et traverser quelques galères pour en arriver à ce spectacle où plane l’ombre de la grande danseuse et chorégraphe Pina Bausch - à laquelle visiblement la danseuse Marion voue une fascination bien légitime. L’autrice et interprète de Si Pina m’avait demandé… Marion Schrotzenberger nous raconte :
Galères, galères
D’emblée, dès le début du spectacle, avant même d’avoir esquissé le moindre pas de danse, on comprend bien les difficultés. Marion - successivement au téléphone avec des amis, son père ou sa mère - nous narre la genèse de son spectacle encore en gestation. Les obstacles administratifs pour monter un dossier de projet culturels. Les mille et unes complications pour obtenir la possibilité de vivre et travailler en Belgique (Marion est en effet à ce stade de l’histoire obligée de vivre à Bruxelles…) en attendant le bout du tunnel et le retour à La Réunion (sans spoiler, divulgâcher quoi que ce soit).
La danse impitoyable du quotidien
Et puis Marion approche la quarantaine (elle a 39 ans) et doit assumer le quotidien avec ses deux filles tout en commençant à élaborer le spectacle dans son salon… Bref. Vous voyez le tableau.
Et justement, nous voyons les tableaux : très beaux, ils se succèdent et forment avec les saynètes jouées par Marion Schrotzenberger, un arc narratif des plus réjouissants. Que ce soit les moments en solo par Marion ou ceux interprétés en duo avec le danseur réunionnais Éric Languet.
Tout et son contraire
C’est l’alliance des contraires qui donne à Si Pina m’avait demandé… toute sa saveur. L’extraordinaire via l’évocation de Pina Bausch côtoie l’ordinaire du quotidien de Marion Schrotzenberger, la beauté de son spectacle naît d’une période compliquée et pas facile… Ces contrastes entre émouvant et drôle, entre les souvenirs et le présent, entre l’art éternel et le quotidien donnent tout son sel au spectacle.
Saveur jubilatoire qui tient beaucoup à la personnalité de Marion Schrotzenberg qui balance nos émotions entre Bruxelles et la Réunion, comme un voyage vers plus de clarté et de lumière. À voir et revoir on l’espère très bientôt pour se réjouir comme ces spectateurs à la sortie du spectacle :
« Si Pina m’avait demandé… » de et par Marion Schrotzenberger, avec Éric Duguet. Encore jusqu’au 12 juillet (12h10) sur la scène du TOMA, à la Chapelle du verbe incarné, Avignon.