Festival des Inrocks : le pianiste et compositeur martiniquais Christophe Chassol, maître du jeu

Christophe Chassol à Paris, en février 2020.
Toujours inclassable, toujours en première classe à l'international : le Martiniquais Christophe Chassol déploie son nouveau projet "Ludi", sur le thème du jeu, au festival des Inrocks jeudi à Paris, avant de reprendre la route pour ses concerts et projections vidéos.
En septembre dernier, le pianiste français - qui joue aussi de la flûte, de la guitare, etc - tournait au Japon. En mars il jonglera entre Danemark, France, Suisse... De ses voyages, Christophe Chassol ne ramène pas seulement des pressages rares de vinyles pour la platine de son appartement parisien. Mais aussi des idées.
             
Comme pour "Ludi". "J'étais au Canada, j'ai vu des gamins qui jouaient au foot américain, ils criaient ‘touchdown’, et je me suis dit, dans le jeu il y a beaucoup de mouvements, de paroles, de symboles. Là, j'allais avoir plein de matériel cool à filmer", raconte-t-il à l'AFP. Car, comme à son habitude, le concept est global : il filme des enfants jouant dans une cour de récré, une salle de jeux d'arcade au Japon, une virée en grand huit, etc, puis met en musique ou harmonise ces sons de la vie réelle (la version album sort vendredi chez Tricatel).
 

"Soldats de la musique"

Il y juxtapose aussi des chanteurs - Ala.ni, Thomas de Pourquery (saxophoniste), entre autres - ses "soldats de la musique" comme il les appelle affectueusement. Dirigés comme des acteurs, filmés sur fond vert, ils sont intégrés ensuite aux images tournées en extérieur ou aux séquences d'animation. Et sur scène ? Chassol, aux claviers, et son batteur, jouent en live, rebondissant sur les images et les sons du film projeté derrière eux (qui sera disponible en téléchargement).
             
Si Chassol n'est pas connu du grand public, son batteur-complice - "on est en télépathie" - l'a été. C'est Mathieu Edward, finaliste de la Star Academy 7 en 2008. "Eh oui, on n'est pas snob, lâche Chassol, espiègle. Mathieu est assez fantastique, il a une vie marrante, la Star Ac', disque d'or (comme chanteur de r'n'b), mais il a toujours été batteur et comme tous les batteurs avec qui j'ai travaillé, son père aussi est batteur (rires)". Les deux hommes - qui, outre des goûts communs comme "Magma" et le hip-hop partagent des ascendants martiniquais - ont commencé à travailler ensemble lors du précédent projet "chassolien", "Big sun" (2015).
 
             
Le groove du batteur tatoué et peroxydé se mêle parfaitement aux accords cristallins de Chassol et aux découpages des voix des fillettes scandant leurs prénoms dans un morceau comme "Savana, Céline, Aya". Il en résulte une lumière pop qui évite à l'ensemble de verser dans l'hermétisme art et essai. La citation, en musique, d'un passage du livre "Le jeu des perles de verre" d'Hermann Hesse, glisse ainsi avec légèreté.
 

"Pianiste hors-pair"

"C'est un pianiste hors-pair, mais sa musique n'est pas enfermante, c'est très viscéral, on se sent bouleversés par son humanité", commente pour l'AFP Carole Boinet, rédactrice en chef adjointe et coprogrammatrice du Festival des Inrocks. "Le mettre à l'affiche, c'est une déclaration d'amour, je suis fan depuis longtemps, c'est un des plus grands artistes français à l'heure actuelle".
             
Avis partagé en dehors de l'hexagone. "Il est très présent à l'international : en 2018, Chassol était le 6e artiste du palmarès live des artistes jazz et musiques improvisées", précise à l'AFP Benjamin Demelemester, expert en musiques actuelles au Bureau Export, structure de soutien de la filière musicale française à l'étranger. "Ses territoires principaux d'écoute streaming sont en ce moment l'Allemagne, le Royaume-Uni, les Pays-Bas et les Etats-Unis. Tout simplement les premiers marchés de l'export !", poursuit-il. Solange, soeur de Beyoncé, l'avait convié en première partie au Radio City Hall à New-York et sur son album "When I get home". Chassol, lui, se sent à la maison partout.