Selon Louis-Georges Tin, président du Cran, l’annonce par Emmanuel Macron de la création de la Fondation pour la mémoire de l’esclavage cette année relève de la "récupération". Il rappelle aussi qu’il existe un autre engagement sur un musée de l’esclavage à Paris.
Le 27 avril, jour de commémoration du 170ème anniversaire de l’abolition de l’esclavage, Emmanuel Macron annonçait sur sa page Facebook la création « cette année » de « la Fondation pour la mémoire de l’esclavage », sous la présidence de l’ex-premier ministre Jean-Marc Ayrault. Il apportait également une fin de non-recevoir à tous ceux qui souhaitent à Paris la construction d’un musée consacré à l’esclavage. Sur ces différentes questions, La1ere a recueilli la réaction du Martiniquais Louis-Georges Tin, président du Conseil représentatif des associations noires de France (Cran), qui porte depuis longtemps ces projets mémoriels.
Quelle est votre réaction à la suite des annonces d’Emmanuel Macron le 27 avril, pour la commémoration du 170ème anniversaire de l’abolition de l’esclavage, et notamment celle concernant la création d’une Fondation pour la mémoire de l’esclavage cette année ?
Louis-Georges Tin : Cette annonce n’en est pas une. Quand Emmanuel Macron dit qu’il propose la création d’une fondation, c’est quelque chose que le Cran et ses partenaires ont obtenu déjà depuis deux ans, dans le cadre de notre campagne pour les réparations. Le 10 mai 2016, François Hollande avait annoncé cela, ce qu’il a confirmé le 10 mai 2017. Les travaux sont en cours, et le Cran est bien sûr membre du conseil d’orientation. Par conséquent, il n’y a rien de nouveau. C’est juste de la récupération. Bien sûr cette fondation est une très bonne chose, mais enfin, ce n’est pas Macron qui en est à l’origine. Je précise qu’un groupement d’intérêt public - GIP - a déjà été mis en place, et qu'il va se transformer à la fin de l’année en fondation. Il y a un certain nombre d’opérations administratives à effectuer et le GIP est une étape intermédiaire. Donc le processus était déjà en cours, bien avant l’élection de Macron.
Pensez-vous que l’ex-premier ministre Jean-Marc Ayrault soit le mieux placé pour présider cette future fondation ?
Monsieur Ayrault a commis une faute grave lorsqu'il était ministre des Affaires étrangères. Il a refusé la restitution des trésors pillés pendant la colonisation. C'était une campagne du Cran, et nous avons finalement obtenu gain de cause auprès de monsieur Macron, qui a accédé à notre requête et s'est engagé en ce sens lors de son voyage à Ouagadougou, en novembre 2017. Mais je regrette que Jean-Marc Ayrault ne l’ait pas fait, et s'y soit même opposé, alors qu’il était en position de le faire. C’est d'autant plus grave que tous ces objets ont été volés après des massacres de masse. Il a refusé la restitution des trésors coloniaux, et se trouve aujourd'hui à la tête d'une institution anticoloniale. Il est vrai que c'est assez troublant.
Dans son message posté le 27 avril, Emmanuel Macron dit aussi : « Certains plaident en outre pour la construction à Paris d’un musée consacré à l’esclavage. Or la France possède déjà un tel lieu avec le Mémorial ACTe. (…) Je crois par conséquent que notre priorité est d’apporter notre soutien, dans la durée, à cette institution, notamment à travers l’aide que pourra lui apporter la future fondation, pour lui permettre de satisfaire à ses missions et renforcer son rayonnement. » Qu’en pensez-vous ?
Dans cette affaire, monsieur Macron s'est fortement discrédité. Premièrement, le fait qu’il y ait un musée de l’esclavage en Guadeloupe ne dispense pas d’en faire un autre à Paris. Aux Etats-Unis, il y a plus de 150 musées sur l’esclavage. Par ailleurs Je ne suis pas certain que tous les gens qui résident dans l’Hexagone aient les moyens d’aller visiter le Mémorial ACTe en Guadeloupe. Deuxièmement, je rappelle que François Hollande s’était engagé sur un musée de l’esclavage à Paris le 10 mai 2016. C’était donc un engagement d’Etat. Par conséquent, la reculade d'Emmanuel Macron est tout à fait scandaleuse, d'autant qu'il s'agit d'un crime contre l’humanité.
Troisièmement, ce qu’il oublie, c’est que le musée de l'esclavage est aussi un engagement du Conseil de Paris, et cette résolution a été adoptée en guise de « réparation ». Cela est dit très clairement dans le texte adopté en octobre 2017, et dans l’explication du vote, porté par l'élue communiste Raphaëlle Primet. Elle explique dans son discours que cette résolution est présentée dans le cadre de la campagne du Cran pour les réparations. Cela veut dire que le Conseil de Paris va continuer à avancer avec le Cran et les parlementaires d’Outre-mer, avec lesquels nous travaillons ; et l’Etat va se ridiculiser s’il reste en dehors de tout cela. A la vérité, l’Etat sera obligé de suivre, et je crois qu’Emmanuel Macron a parlé un peu vite. Il faut qu’il se ressaisisse.
Quelle est votre réaction à la suite des annonces d’Emmanuel Macron le 27 avril, pour la commémoration du 170ème anniversaire de l’abolition de l’esclavage, et notamment celle concernant la création d’une Fondation pour la mémoire de l’esclavage cette année ?
Louis-Georges Tin : Cette annonce n’en est pas une. Quand Emmanuel Macron dit qu’il propose la création d’une fondation, c’est quelque chose que le Cran et ses partenaires ont obtenu déjà depuis deux ans, dans le cadre de notre campagne pour les réparations. Le 10 mai 2016, François Hollande avait annoncé cela, ce qu’il a confirmé le 10 mai 2017. Les travaux sont en cours, et le Cran est bien sûr membre du conseil d’orientation. Par conséquent, il n’y a rien de nouveau. C’est juste de la récupération. Bien sûr cette fondation est une très bonne chose, mais enfin, ce n’est pas Macron qui en est à l’origine. Je précise qu’un groupement d’intérêt public - GIP - a déjà été mis en place, et qu'il va se transformer à la fin de l’année en fondation. Il y a un certain nombre d’opérations administratives à effectuer et le GIP est une étape intermédiaire. Donc le processus était déjà en cours, bien avant l’élection de Macron.
Pensez-vous que l’ex-premier ministre Jean-Marc Ayrault soit le mieux placé pour présider cette future fondation ?
Monsieur Ayrault a commis une faute grave lorsqu'il était ministre des Affaires étrangères. Il a refusé la restitution des trésors pillés pendant la colonisation. C'était une campagne du Cran, et nous avons finalement obtenu gain de cause auprès de monsieur Macron, qui a accédé à notre requête et s'est engagé en ce sens lors de son voyage à Ouagadougou, en novembre 2017. Mais je regrette que Jean-Marc Ayrault ne l’ait pas fait, et s'y soit même opposé, alors qu’il était en position de le faire. C’est d'autant plus grave que tous ces objets ont été volés après des massacres de masse. Il a refusé la restitution des trésors coloniaux, et se trouve aujourd'hui à la tête d'une institution anticoloniale. Il est vrai que c'est assez troublant.
Dans son message posté le 27 avril, Emmanuel Macron dit aussi : « Certains plaident en outre pour la construction à Paris d’un musée consacré à l’esclavage. Or la France possède déjà un tel lieu avec le Mémorial ACTe. (…) Je crois par conséquent que notre priorité est d’apporter notre soutien, dans la durée, à cette institution, notamment à travers l’aide que pourra lui apporter la future fondation, pour lui permettre de satisfaire à ses missions et renforcer son rayonnement. » Qu’en pensez-vous ?
Dans cette affaire, monsieur Macron s'est fortement discrédité. Premièrement, le fait qu’il y ait un musée de l’esclavage en Guadeloupe ne dispense pas d’en faire un autre à Paris. Aux Etats-Unis, il y a plus de 150 musées sur l’esclavage. Par ailleurs Je ne suis pas certain que tous les gens qui résident dans l’Hexagone aient les moyens d’aller visiter le Mémorial ACTe en Guadeloupe. Deuxièmement, je rappelle que François Hollande s’était engagé sur un musée de l’esclavage à Paris le 10 mai 2016. C’était donc un engagement d’Etat. Par conséquent, la reculade d'Emmanuel Macron est tout à fait scandaleuse, d'autant qu'il s'agit d'un crime contre l’humanité.
Troisièmement, ce qu’il oublie, c’est que le musée de l'esclavage est aussi un engagement du Conseil de Paris, et cette résolution a été adoptée en guise de « réparation ». Cela est dit très clairement dans le texte adopté en octobre 2017, et dans l’explication du vote, porté par l'élue communiste Raphaëlle Primet. Elle explique dans son discours que cette résolution est présentée dans le cadre de la campagne du Cran pour les réparations. Cela veut dire que le Conseil de Paris va continuer à avancer avec le Cran et les parlementaires d’Outre-mer, avec lesquels nous travaillons ; et l’Etat va se ridiculiser s’il reste en dehors de tout cela. A la vérité, l’Etat sera obligé de suivre, et je crois qu’Emmanuel Macron a parlé un peu vite. Il faut qu’il se ressaisisse.