Les députés adoptent la loi sur la discrimination par l'accent

Christophe Euzet, député de l'Hérault
La proposition de loi sur la discrimination par l'accent a été adoptée par 98 voix contre 3 ce jeudi 26 novembre à l'Assemblée nationale avec le soutien du gouvernement. La peine prévue pour ces "moqueries" ou "forme de racisme" s'élève à trois ans d'emprisonnement et 45.000 euros d'amende.
 
Christophe Euzet, député de l'Hérault et membre du groupe Agir allié à la majorité, a fait de la discrimination par l'accent un combat. Sa proposition qui a reçu le soutien du gouvernement et du ministre de la justice qui s'est dit "archi-convaincu" par ce texte, a été adoptée par l’Assemblée nationale avec 98 voix pour et 3 contre.
 

C’est une grande satisfaction et on peut se réjouir d'avoir eu un très large concensus autour de cette proposition qui n'a qu'un seul objectif, faire changer les mentalités, faire évoluer les consciences sur la façon de considérer les accents dans notre pays.

Christophe Euzet, député de l'Hérault


 
Dans un sondage IFOP publié en janvier dernier, un Français sur deux estime parler avec un accent et plus d'un quart d'entre eux affirment être régulièrement l’objet de moqueries dans leur quotidien.

La loi vient donc ajouter l'accent à la longue liste des causes de discriminations sanctionnées par le Code pénal ainsi que le Code du travail. "Toutes les discriminations ont à un moment donné été pointées du doigt par le droit et c’est à partir du moment où on a mis un interdit, une ligne rouge, que l’on a comblé un vide juridique, que les consciences ont commencé à évoluer. On l’a fait pour la discrimination à l’égard des femmes, pour la couleur de peau, de l’orientation sexuelle, du handicap… Aujourd’hui faisons le pour 30 millions de français qui prononcent notre langue avec des intonations particulières", affirme Christophe Euzet, député de l'Hérault et rapporteur de la loi.      
 

Une "forme de racisme" 

La députée de Polynésie, Maina Sage s'est associée au député Euzet pour défendre cette loi dont elle réfute l'aspect symbolique. Elle dénonce même une "forme de racisme", en évoquant les difficultés que peuvent rencontrer les personnes parlant avec des intonations ultramarines.
 

Je serai toujours de celles et ceux qui s’opposent à ces stratégies d’assimilation par gommage de nos différences, de nos spécificités. Je viens d’Outre-mer, on a trop tendance à vouloir ne pas trop nous voir et sur les accents les ultramarins le vivent et le subissent très régulièrement.

Maina Sage, députée de Polynésie

 
Patricia Mirallès (LREM), fille de rapatriés d'Afrique du Nord, a exprimé le souvenir douloureux des "moqueries" envers l'accent pied-noir, qu'elle a brièvement repris dans son intervention. A l'inverse, Jean Lassalle (groupe Libertés et territoires) a affirmé qu'il ne voterait pas le texte. "Je ne demande pas la charité, je ne demande pas à être protégé parce que je suis comme je suis", a-t-il lancé avec son fort accent du sud-ouest. Emmanuelle Ménard, élue d'extrême droite de Béziers, a jugé "pour sa part inconvenant" de placer l'accent au même titre que le handicap au titre des motifs de discrimination.
 

Véritable frein

L'accent peut générer une grande souffrance lorsqu'il est moqué et lorsque qu'il devient une barrière pour obtenir un rendez-vous ou accéder à un poste. "Cette singularité peut parfois se transformer en véritable frein", estime Christophe Euzet. "Nos accents sont une sorte de patrimoine vivant qu’il faut protéger plutôt que gommer", ajoute Maïna Sage. 

Après avoir été adopté à l'Assemblée, le texte de loi doit être présenté dans les prochaines semaines au Sénat.