Après l'invasion russe de l'Ukraine, les cours mondiaux de nombre de matières premières ont flambé à des niveaux inconnus ces dix dernières années.
Les métaux industriels "les plus exposés" à des sanctions de la Russie par la communauté internationale seraient donc, outre le nickel, l'aluminium et le palladium, estime Capital Economics. Mais la Russie pourrait aussi décider de stocker ses productions dans les entrepôts de la Bourse des métaux de Shanghai, en Chine.
Le groupe russe Rusal est le deuxième producteur industriel d'aluminium du monde. Ce métal a atteint un nouveau record historique jeudi matin sur le marché LME de Londres, à 3.382,50 dollars la tonne.
Le nickel est russe, il est aussi calédonien
Pour le nickel, il y a le géant Nornickel (Norilsk Nickel), dirigé par l'oligarque Vladimir Potanine. En 2020, la Russie était le troisième producteur de minerai de nickel derrière l'Indonésie et les Philippines, avant la Nouvelle-Calédonie et l’Australie, mais elle est en deuxième position pour le nickel raffiné, derrière la Chine.
Tombé à moins de 10.000 dollars la tonne en 2016, le nickel a dépassé 25.000 dollars jeudi soir à la Bourse des métaux de Londres. Et les entrepôts mondiaux ont vu leurs stocks chuter à des niveaux très bas.
Le nickel ukrainien dans la guerre
En Ukraine, le blocage de la mer Noire par la flotte russe interdit de fait les exportations d'un important producteur européen d’alliage pour l’acier inoxydable : il s’appelle Pobuzhsky Ferronickel. L’usine métallurgique du groupe Solway est située au nord d’Odessa qui est sous le feu de l'artillerie russe. Ce qui rend aussi impossible les livraisons de minerai importé du Guatemala.
"Les autorités russes interdisent la navigation sur la mer d'Azov, les ports d'exportation sont fermés et Odessa a été bombardé", relève pour l'AFP Philippe Chalmin, économiste coordinateur du guide annuel Cyclope du marché mondial des matières premières.
A cela s’ajoute les difficultés du producteur grec Larco dont la production a chuté. Devant cette situation, les aciéristes européens de l'inox vont devoir logiquement tenter d'augmenter leurs achats de ferronickel calédonien à la SLN (Eramet) et KNS (SMSP-Glencore).
Le nickel un métal devenu stratégique
Après l'invasion militaire, Capital Economics estime que 7% du marché mondial du nickel raffiné "pourrait être affecté" par d'éventuelles sanctions. Or, le métal, qui bat aussi des records sur les marchés actuellement, est l'un des plus demandés sur la planète dans les usines de batteries électriques, censées permettre à l'industrie automobile d'abandonner le pétrole.
Là encore, une autre usine calédonienne, Prony Resources sera essentielle pour livrer le nickel des batteries électriques. Une situation qu'avait anticipé le gouvernement français en soutenant financièrement la montée en puissance du grand complexe industriel du Sud.
Pour le palladium, dont la Russie contrôle 50% du marché mondial, l'automobile est aussi en première ligne. Il est utilisé pour la fabrication des pots catalytiques.
Le titane, métal prisé des avionneurs pour sa légèreté et sa très haute résistance, est également un enjeu indirect du conflit. La société russe VSMPO-Avisma, fondée en 1941 dans l'Oural, pendant l'offensive de l'Allemagne hitlérienne, est le premier fournisseur de l'aéronautique mondiale, selon le directeur général du motoriste aéronautique Safran, Olivier Andriès, qui dit disposer de "quelques mois de stocks" devant lui.