L'apparition du coronavirus en Haïti a fait paniquer autorités et communauté humanitaire, compte tenu de l'extrême faiblesse du système de santé du pays, mais les conséquences économiques de la pandémie pourraient être davantage meurtrières auprès de la majorité pauvre de la population.
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Avec huit décès recensés au dernier bilan officiel samedi, l'épidémie de Covid-19 n'en est encore qu'à ses prémices en Haïti, où confinement et distanciation sociale constituent un luxe inaccessible pour de nombreux habitants vivant de l'économie informelle.
Pour endiguer la propagation du virus, le gouvernement a annoncé samedi soir que le port du masque serait obligatoire dans tous les lieux publics à partir du 11 mai, sous peine de sanction légale.
Mourir de faim aujourd'hui ou du coronavirus demain: sur les hauteurs de la capitale Port-au-Prince, les marchandes des rues de Pétionville ont fait leur choix en manifestant contre la vaine tentative de la mairie de limiter leur activité à trois jours par semaine.
Les céréales constituent deux tiers des apports énergétiques quotidiens des Haïtiens les plus pauvres. Or le prix du riz a plus que doublé sur certains marchés de province par rapport à 2019.
La coordination nationale de la sécurité alimentaire note que cette inflation s'accélère depuis mars.
Cette forte hausse des prix accompagnant l'épidémie de coronavirus ne va qu'amplifier la récession dans le pays, commencée à l'automne.
"Avec la crise qui se profile, on s'attend à un repli de près de 4% (du Produit intérieur brut). Cela résulterait principalement d'un quasi effondrement du secteur agricole, qui verrait sa demande effective chuter considérablement", a indiqué le Premier ministre Joseph Jouthe lors d'un sommet annuel sur la finance, organisé uniquement sur internet cette année.
Travailleurs pauvres possédant de très petites exploitations, les paysans haïtiens voient aujourd'hui leurs revenus fondre en pleine période de soudure - entre deux récoltes -, aggravant leurs difficultés à préparer la prochaine récolte, déjà menacée par la sécheresse dans certaines régions.
Bien avant que la pandémie de coronavirus ne vienne paralyser l'économie mondiale, les Nations unies avaient déjà estimé que 40% des Haïtiens auraient besoin d'une assistance humanitaire d'urgence cette année. Réalisées en octobre 2019, les projections avaient établi qu'à partir de mars 2020, près de trois millions d'Haïtiens allaient se retrouver en situation d'insécurité alimentaire sévère, échelon qui précède la situation de famine selon la classification utilisée par l'ONU.
La plongée du pays dans la pauvreté extrême a longtemps été évitée par le soutien financier indispensable de sa diaspora: les plus de trois milliards de dollars transférés annuellement par les Haïtiens vivant à l'étranger constituaient jusqu'ici un tiers du PIB.
Majoritairement installée aux Etats-Unis, la diaspora haïtienne subit aujourd'hui de plein fouet le chômage massif dans la première puissance mondiale.
Le ministère haïtien de l'Economie et des Finances prévoit une chute de cette aide financière de près d'un quart au cours des prochains mois.
"On aime dire que lorsque l'économie américaine souffre une grippe, Haïti écope d'une pneumonie: les millions d'emplois perdus aux Etats-Unis vont provoquer une aggravation de l'extrême pauvreté, c'est certain", s'inquiète M. Pharel.
Pour endiguer la propagation du virus, le gouvernement a annoncé samedi soir que le port du masque serait obligatoire dans tous les lieux publics à partir du 11 mai, sous peine de sanction légale.
A partir du lundi 11 mai 2020, le port du #masque sera obligatoire dans tous les lieux publics. Mon Gouvernement intensifiera les distributions au cours de cette semaine, notamment dans les marchés. J’encourage vivement les entreprises privées à en distribuer à leurs employés. pic.twitter.com/TczVTmeJy6
— Jouthe Joseph (@JoutheJoseph) May 3, 2020
Mourir de faim aujourd'hui ou du coronavirus demain: sur les hauteurs de la capitale Port-au-Prince, les marchandes des rues de Pétionville ont fait leur choix en manifestant contre la vaine tentative de la mairie de limiter leur activité à trois jours par semaine.
Forte hausse des prix
La panique consumériste qui a suivi l'annonce le 19 mars des premiers cas de Covid-19 dans le pays est retombée et les clients sont aujourd'hui d'autant plus mesurés dans leurs achats que leurs moyens sont faibles.Les céréales constituent deux tiers des apports énergétiques quotidiens des Haïtiens les plus pauvres. Or le prix du riz a plus que doublé sur certains marchés de province par rapport à 2019.
La coordination nationale de la sécurité alimentaire note que cette inflation s'accélère depuis mars.
Cette forte hausse des prix accompagnant l'épidémie de coronavirus ne va qu'amplifier la récession dans le pays, commencée à l'automne.
"Avec la crise qui se profile, on s'attend à un repli de près de 4% (du Produit intérieur brut). Cela résulterait principalement d'un quasi effondrement du secteur agricole, qui verrait sa demande effective chuter considérablement", a indiqué le Premier ministre Joseph Jouthe lors d'un sommet annuel sur la finance, organisé uniquement sur internet cette année.
Risques de famine
Si le secteur ne pèse que 21% dans le PIB, l'agriculture concentre la moitié des emplois d'Haïti, a rappelé l'économiste Etzer Emile.Travailleurs pauvres possédant de très petites exploitations, les paysans haïtiens voient aujourd'hui leurs revenus fondre en pleine période de soudure - entre deux récoltes -, aggravant leurs difficultés à préparer la prochaine récolte, déjà menacée par la sécheresse dans certaines régions.
Bien avant que la pandémie de coronavirus ne vienne paralyser l'économie mondiale, les Nations unies avaient déjà estimé que 40% des Haïtiens auraient besoin d'une assistance humanitaire d'urgence cette année. Réalisées en octobre 2019, les projections avaient établi qu'à partir de mars 2020, près de trois millions d'Haïtiens allaient se retrouver en situation d'insécurité alimentaire sévère, échelon qui précède la situation de famine selon la classification utilisée par l'ONU.
La plongée du pays dans la pauvreté extrême a longtemps été évitée par le soutien financier indispensable de sa diaspora: les plus de trois milliards de dollars transférés annuellement par les Haïtiens vivant à l'étranger constituaient jusqu'ici un tiers du PIB.
Les Haïtiens dépendent des transferts de fonds pour la nourriture, l'éducation et même les funérailles.
Kesner Pharel, économiste
Majoritairement installée aux Etats-Unis, la diaspora haïtienne subit aujourd'hui de plein fouet le chômage massif dans la première puissance mondiale.
Le ministère haïtien de l'Economie et des Finances prévoit une chute de cette aide financière de près d'un quart au cours des prochains mois.
"On aime dire que lorsque l'économie américaine souffre une grippe, Haïti écope d'une pneumonie: les millions d'emplois perdus aux Etats-Unis vont provoquer une aggravation de l'extrême pauvreté, c'est certain", s'inquiète M. Pharel.