Mandy ne craque jamais. N'espérez pas la surprendre en train de dévorer une assiette de frites. Bien trop grasses. Ou d'avaler un soda. Bien trop calorique. "Je surveille mon alimentation. Je mange sain et équilibré. C'est tout." Un seul petit péché mignon reconnu. "Le chocolat noir, je l'avoue." Mais de façon raisonnée. Toujours. De quoi rendre son nouvel entraîneur, Dimitri Demonière, très admiratif : "Son hygiène de vie est simplement irréprochable. Mandy n'est plus toute jeune, c'est vrai. Mais elle se donne les moyens de repousser les limites. On ne voit cette exigence que chez les athlètes de très haut niveau."
Une championne stressée
Chez Mandy François-Elie, le phénomène est nouveau. "Avant, je n'étais pas du tout comme ça." Le virus de la société moderne a fini par contaminer la championne pourtant au top. "Je suis stressée. Ça atteint aujourd'hui un niveau élevé." Trop élevé. Heureusement, la Martiniquaise en tient compte. Travaille. Pour corriger. Et soulager. "J'ai intégré la lutte contre le stress dans les séances avec ma kiné. Et c'est bien évidemment au cœur de mon travail avec mon préparateur mental."
Le stress s'explique peut-être par un autre trait de caractère de la championne : sa haine viscérale de la défaite. "Je déteste perdre. C'est un défaut, que voulez-vous ? Je suis très fâchée quand je perds. Il m'arrive de pleurer ou de partir me cacher pour ruminer." Une détestation que Dimitri, son entraîneur a vite pu mesurer : "Aucun athlète n'aime perdre. Mais chez Mandy, ça se révèle particulièrement fort. C'est aussi une source de motivation. Elle refuse toutes les situations d'échec. Y compris à l'entraînement. Si elle ne maîtrise pas un nouvel exercice, elle veut tout de suite recommencer. Pour bien faire. Et réussir."
Une médaille… à la longueur ?
Si Mandy monte sur le podium paralympique l'été prochain, il s'agira d'une quatrième médaille consécutive. Un exploit rare. Qui aurait tendance à faire sourire la Martiniquaise. "Si je décroche une nouvelle médaille, tant mieux. Sinon, ce n'est pas dramatique non plus." Faut-il croire Mandy lorsqu'elle essaie d'adopter une posture détachée ? Difficile. À moins que l'athlète n'ait trouvé une première clé pour lutter contre le stress et la détestation de la défaite. "Je crois que je ne mets pas assez l'accent sur le plaisir. C'est vraiment primordial."
Plaisir et diversification. Mandy François-Elie est avant tout connue pour ses talents de sprinteuse. Sur 100 et 200 mètres. Or, depuis quelques mois, elle s'exprime aussi sur le saut en longueur. "Dans cette discipline, j'éprouve plus de plaisir que sur le sprint. Car je ne me sens pas en concurrence. Je me retrouve seule sur le sautoir. C'est moins stressant." À tel point que Dimitri Demonière pourrait faire du saut en longueur, l'objectif prioritaire de Mandy pour Paris 2024 : "Au premier regard, cette épreuve semble être la plus accessible pour elle en termes de médaille paralympique. Elle continue de travailler le sprint en parallèle. Un choix sera fait en fin de saison."
La grande fête à Paris
Pour ses quatrièmes Jeux Paralympiques, Mandy pourra compter sur le soutien et les cris du public français. Privilège de concourir à domicile. Et cerise sur le gâteau : tout le clan François-Elie devrait se retrouver dans les tribunes du Stade de France. "Mon frère Michel, mes parents et beaucoup d'autres membres de ma famille ont prévu de faire le déplacement. Ce n'est ni un stress, ni une pression supplémentaire. Au contraire ! Ça me donnera encore plus de force mentale."
Pour la Martiniquaise, ces Jeux à Paris seront également l'occasion de faire un bilan de carrière. À 34 ans. Stop ou encore ? "Continuer jusqu'à Los Angeles en 2028 ? Peut-être. On verra ça en octobre. Pas avant." Si on imagine mal Mandy tirer sa révérence à la fin de l'année, une angoisse existentielle transpire déjà. L'angoisse de l'inévitable retraite sportive. Un jour. "J'ai peur de cet instant où le sport s'arrêtera pour moi. Qu'est-ce que je ferai après ? Je n'en sais rien. Même pas la moindre idée." Soyons rassurés : a priori, Mandy devrait avoir au moins quatre ans devant elle pour trouver sa future voie.