Journée de la Conscience noire au Brésil : les discriminations démontent le mythe d'un pays harmonieusement métissé

Le Brésil célèbre les 20 novembre la Journée de la Conscience noire avec de nombreuses manifestations culturelles.
Au Brésil, pays qui entretient le mythe d'une nation métissée harmonieuse, plus sa couleur de peau est foncée, moins une personne a de chances d'accéder à des postes de responsabilité. Les études statistiques sont accablantes. 
Ce lundi, le pays célèbre la Journée de la Conscience noire avec de nombreuses manifestations culturelles mais aussi des débats pour changer les mentalités, notamment au sein des entreprises.

Les chiffres sont implacables : selon l'Institut Brésilien de Géographie et Statistiques, parmi les 54% de Brésiliens noirs ou métis, seuls 5% occupent des postes d'encadrement. Parmi les 10% des Brésiliens les plus riches, 70% sont blancs, tandis que 74% des Noirs font partie des 10% les plus pauvres. Dans les médias, les Noirs sont sous-représentés, dans la publicité les mannequins de couleur très rares.

"Jeu du privilège blanc"

Des inégalités qui sautent aux yeux dans la vidéo du "jeu du privilège blanc", lancée récemment par l'ONG ID_BR (Identités du Brésil). Inspirée d'une expérience de 'BuzzFeed' aux Etats-Unis, elle a été vue par 1,2 million d'internautes sur Facebook et reproduite dans plusieurs émissions télévisées. Les règles du jeu sont simples : des lignes horizontales sont tracées au sol et les participants doivent faire un pas en arrière si les réponses à des questions posées signalent qu'elles sont victimes d'une inégalité -- ou en avant dans le cas contraire.

Les questions touchent la condition sociale, la vie au sein de la famille ou le niveau d'études, mais aussi le racisme au quotidien, comme "avez-vous déjà entendu des commentaires désobligeants au sujet de vos cheveux ?". Au Brésil, une expression populaire qualifie une chevelure crépue de "cheveux mauvais". Invariablement, à la fin du jeu, les Noirs se retrouvent en dernière ligne.

Quotas dans les universités

"Le privilège blanc, c'est de jouir d'une série d'avantages par rapport aux autres sans s'en rendre compte", explique à l'AFP Giovana Freitas, historienne de l'Université Fédérale de Rio de Janeiro (UFRJ). Un sondage de l'Institut Locomotiva montre par exemple que les hommes noirs diplômés universitaires gagnent en moyenne 29% de moins que les Blancs à qualification égale, 27% de moins pour les femmes. "Si les Noirs gagnaient les mêmes salaires que les Blancs, 808 millions de réais (215 millions d'euros) de plus seraient injectés dans l'économie", affirme Renato Meirelles, président de Locomotiva.

Depuis l'instauration de quotas dans les universités sous un gouvernement de gauche, il y a près de 15 ans, la proportion de Noirs et métis ayant accédé à l'enseignement supérieur est passé de 8% à 27%. "Toutes ces politiques d'action positive ont commencé à faire effet, mais ces personnes diplômées ont encore beaucoup de mal à trouver leur place sur le marché du travail", déplore Esteban Cipriano, responsable des programmes d'éducation d'ID_BR.