L'agrotransformation sauvera-t-elle l'agriculture en Outre-mer ?

Depuis cinq ans, la Conserverie Créole valorise en les transformant les produits martiniquais.
Lors de cette édition anniversaire du salon international de l'agriculture, l'ODEADOM, office de développement de l'économie agricole outre-mer, a organisé un colloque sur l'agro-transformation dans les DROM. Un moyen de se questionner sur une méthode qui se développe et qui pourrait bien sauver l'agriculture ultramarine pour certains.

Caviar d'aubergine, pesto au thym ou encore pâte à tartiner vanille pacane. Sur le stand de la Conserverie créole au 60ᵉ Salon international de l'agriculture, il y en a pour tous les goûts, mais aucun produit frais. Tout est en conserve, mais fabriqué directement en Martinique avec des produits locaux "L'agro-transformation pour nous, c'est tous les produits qu'on propose.", explique Jordan Delamotte, co-fondateur de l'entreprise martiniquaise, il y a un peu plus de cinq ans. L'opération est simple : "Ça veut dire travailler avec les agriculteurs : voir ce qu’ils ont en ce moment, prendre les produits, les transformer, les mettre en valeur de façon à ce qu’ils se conservent mieux." détaille Jordan Delamotte. 

Ces produits transformés sont partout au Salon de l'agriculture à Paris. Et pour cause, ils représentent désormais une part importante de l'économie agricole ultramarine avec 235 entreprises à la Réunion ou encore 128 en Martinique, selon les chiffres de l'URSSAF en 2020. Dans ce sens, l'Odeadom, office de développement économique agricole des outre-mer, a organisé un colloque sur l'agro-transformation comme enjeu de souveraineté alimentaire pour les DROM dans les prochaines années.

Structure agro-alimentaire à Sainte-Marie (nord atlantique, Mai 2016)

Moins d'imports, plus d'exports

Ce qui peut sembler un concept farfelu pour les plus conservateurs est en fait opéré depuis des centenaires avec le rhum. "Aujourd’hui tous les produits agricoles ne sont pas consommables tels quels, expose Aurélien de la Noue, délégué ministériel adjoint aux entreprises agro-alimentaires pour le Ministère de l'Agriculture, participant du colloque de l'Odeadom. La canne à sucre par exemple. On peut essayer, on va se casser les dents, mais on peut en faire des produits à grande valeur ajoutée. On connait le rhum, le sucre, mais on peut avoir aussi des produits cosmétiques." Le rhum est donc l'une des filières les plus "mature" et les plus rentables d'agro-transformation dans les départements d'outre-mer.

Outre la consommation locale des produits, ce processus permet une meilleure conservation et augmente ainsi les possibilités de transport des produits locaux. "Il y a beaucoup de filières qui se sont développées en Outre-mer et qui continuent à le faire. Je pense à la filière café en Guadeloupe qui exporte vers le Japon. Ou le succès de la filière viande à la Réunion qui d’une part fournit tout le marché et exporte grâce à son succès.", complète Aurélien de la Noue.

Les marchés guyanais et mahorais à développer

Si les Antilles et la Réunion sont parvenues à beaucoup développer les industries agro-alimentaires, tous les territoires n'en sont pas au même point. "En Guyane, l'agro-transformation en est vraiment à ses débuts et représente moins de 10 % de ce que fait la Réunion par exemple." compare Aurélien de la Noue du Ministère de l'Agriculture.

Mayotte représente aussi tout un marché à développer. En 2020, seules 6 entreprises opèrent sur la transformation et conservation de la viande, contre 59 en Guadeloupe dans la même catégorie. Plus largement, l'Odeadom estime que la filière qui possède le plus de potentiel de croissance est celle des fruits et légumes, tous territoires confondus. 

Dégustation de gousses de vanille Pompona lors du Concours Général Agricole 2024

Les producteurs eux-mêmes se mettent à réfléchir en interne à des solutions de transformation. Charles Haguy, tente de relancer la filière vanille en Guadeloupe. "On se rend compte que l’agro-transformation est essentielle pour tous les producteurs. Parce que c’est là qu’il y a la plus-value. Donc juste faire le produit et ne pas être capable de le transformer en autre chose où il y a réellement un gain économique, c’est moins valorisant", avoue le producteur guadeloupéen.