"La petite chatte est morte", lâche Rébecca Chaillon au milieu du spectacle, à l’adresse, peut-être, de ceux qui n’auraient pas compris le double sens du mot. En nuisette, tous seins dehors, la performeuse martiniquaise, qui se décrit elle-même comme "grosse, noire et lesbienne", apparaît sur scène vautrée dans un canapé rouge. Elle boit des bières à la bouteille, fume des cigarettes et se perd dans des séries télé. A ses côtés, son double, version mince, une chatte noire sagement posée sur les genoux. Il s’agit de la jeune comédienne Stela Bevao que Rébecca a rencontrée dans la perspective de monter son spectacle à Avignon.
J’ai vu qu’elle était aussi craquée ou dingue que moi sur les prises de risque
Une patte retombe toujours sur ces chattes est né d’une commande. Le texte, poétique et militant est transposé sur scène en performance subversive. Les deux comédiennes se transforment en chattes qui se lèchent, font pipi dans une litière et mangent leur pâté, en vrai ! Tout cela sur la bande son très familiale du dessin animé Les Aristochats… "C’est pour marquer une forme de régression. Les Aristochats, c’est aussi l’idée de chats blancs et bourgeois, qui font de la musique classique et qui découvrent les gens de la rue", explique la comédienne née dans le nord de l’hexagone, formée dans un conservatoire parisien, puis partie dans l’univers de la performance artistique.
La violence et la solitude
Le spectacle, physique et frontal, dénonce la solitude de certaines femmes, les "vieilles filles qui vivent avec leurs chats". Il raconte ausi la violence qu’elles subissent au cours de leur vie. "Je vais présenter un de mes spectacles pour la première fois en Martinique en avril 2022", confie Rébecca. "J’ai beaucoup de craintes concernant sa réception. J’ai quand même grandi en France continentale avec un certain code du théâtre et de la performance. Je sais que ça va parler à des gens, mais je sais aussi que ça risque d'en noyer d’autres ".