Ce mouvement aussi spectaculaire qu'extraordinaire n'est pas seulement dû à la multiplication des sanctions économiques contre Moscou suite à l'invasion de l'Ukraine, faisaient flamber les cours des métaux. Mais il est vrai que la Russie est le premier producteur de nickel de qualité batterie, ce qui menace la filière européenne des batteries électriques, largement dépendante.
Pour l’inox, l’arrêt des exportations de ferronickel de l’usine ukrainienne située au nord d’Odessa créé de vives inquiétudes chez les sidérurgistes européens de l'inox qui se tournent vers la Nouvelle-Calédonie, la Macédoine, la République Dominicaine et Cuba.
"Nous suspectons que ce que l'on appelle un "short squeeze" soit en partie responsable de l'envolée inédite des prix, en plus des craintes quant à l'approvisionnement" qui découlent de la guerre en Ukraine, explique Daniel Briesemann, analyste pour Commerzbank.
De très gros investisseurs, comprenant des géants du secteur de l'inox et des batteries électriques en Asie, ayant parié sur une baisse du prix du nickel ont été obligé d'acheter le métal beaucoup plus cher pour clore leur position coûte que coûte, faisant flamber artificiellement les cours. Leurs pertes seraient comprises entre deux et trois milliards de dollars.
7 et 8 mars 2022 : le nickel devient fou
Lundi, le nickel grimpait à 50.000 dollars. Mardi, la tonne s'échangeait autour de 100.000 dollars lorsque les opérateurs du London Metal Exchange (LME) ont décidé de stopper les échanges. Vendredi, le commerce du nickel n'avait toujours pas repris sur la Bourse des métaux de Londres, "les critères de réouverture du marché (...) n'ayant pas été remplis", a fait savoir le LME à l'AFP.
La baisse sans précédent des stocks mondiaux dans la semaine précédant les folles journées des 7 et 8 mars aurait pourtant dû servir d’avertissement.
La décision de la Bourse des métaux de Londres (LME) de suspendre les transactions et d’annuler toutes celles effectuées le 8 mars est historique.
Un évènement historique appelé "Cygne noir"
Durant les deux folles journées du nickel des 7 et 8 mars, Le LME a vécu un événement que les économistes qualifient de "black swan" (cygne noir), un évènement extrêmement brutal et imprévisible.Les cours ont flambé sur un temps très cours. "Au vu de l'importance des variations sur le marché du nickel, c'est un 'black swan' parmi les 'black swan'", a réagi Mark Thomson, spécialiste des marchés des matières premières. "Comment pouvait-on s’attendre à un truc pareil, aussi monstrueux", a commenté Jim Lennon, le grand expert du nickel à Londres.
Et maintenant ?
En cette fin de semaine, seule la Bourse de Shanghai (SHFE) donnait quelques bribes d’informations sur la situation du marché en Asie où se consomme 80% du nickel mondial. Les stocks et contrats négociables ont augmenté de 11.000 tonnes, ils sont désormais de 47.000 tonnes. "Les stocks livrables restent faibles", indique Alastair Munro de Marex.
Dans les derniers échanges enregistrés au SHFE, le prix affiché de la tonne de nickel se négociait autour de 38.000 dollars la tonne. Un différentiel de prix sépare désormais la Bourse des métaux de Shanghai et celle de Londres où la dernière cotation enregistrée, avant l'interruption des échanges, indiquait 52.000 dollars. "Il faudra attendre au moins une semaine pour espérer stabiliser et voir la tendance du nickel", conclut Jim Lennon.