Le financement participatif pour préparer les Jeux Olympiques

A moins de trois mois du lancement des JO de Rio les athlètes -sélectionnés ou pas-, sont en pleine préparation. Or certains d’entre eux disposent d’un budget trop restreint pour le faire dans les meilleures conditions, il faut donc trouver d’autres solutions.
En 2009, Romain Mesnil se mettait en scène dans une vidéo où il courait nu dans les rues de Paris. Le perchiste avait perdu le soutien de son équipementier et cherchait un nouveau contrat de sponsoring en vue des Jeux olympiques de Londres (2012). Son annonce sur Ebay avait donné des idées à Loïc Yviquel, l’un des fondateurs de Sponsorise.me : « Nous avons monté cette start-up en partant du constat que 90% des sportifs n’ont pas accès au sponsoring traditionnel ». Lancé en 2013, le site et la marque montent en puissance en Europe et dans les Amériques, et a ouvert un bureau à Miami. Coca-Cola vient d’entrer à son capital. « La plateforme a été lancée au Brésil, au Mexique, aux Etats-Unis… Avant cela on recevait à peu près une dizaine de demandes de financement par mois,  révèle Loïc Yviquel. Mais depuis mars on a quasiment passé la barre des mille projets reçus par mois ! ».

1€ donné, 1€ offert

20 à 30% de ces athlètes sont « à potentiel olympique » explique le chef d’entreprise. Il fallait donc imaginer quelque chose de spécifique pour ces amateurs en route pour représenter leur nation. Un partenariat inédit a donc vu le jour : Sponsorise.me et Powerade se sont associés pour rendre visible la recherche de fonds de plusieurs athlètes en vue des JO, et notamment des Français. Un projet qui tient à cœur à Richard Dacoury, consultant sport pour le groupe au soda internationalement connu : « Powerade accompagne le sportif pendant 45 jours : d’abord en finançant les premiers euros investis : pour 1€ donné, nous offrons également 1€, jusqu’à 400€. Puis en faisant la promotion du projet sur nos propres réseaux sociaux, et enfin en achetant de l’espace média sur certaines plateformes. » Autant de chances d’atteindre le financement attendu, qui tourne en moyenne à 4 000€ par athlète. « Ça marche plutôt bien, se félicite l’ancien basketteur. On a plus de 88% des  projets qui ont été financés dans la totalité. » En fonction du montant de leur dons, les contributeurs recevront une contrepartie décidée à l’avance.

Rêve olympique

Ils font du tir à l’arc ou du beach-volley, sont sprinteur ou escrimeuse, visent les jeux olympiques ou paralympiques. Comment sont-ils choisis ? « Il faut d’abord qu’ils soient de véritables espoirs ou potentiels qualifiables aux JO, explique Richard Dacoury. Qu’ils aient véritablement un rêve olympique… et également une dimension « réseaux sociaux » déjà bien développée. Il faut qu’il y ait cette motivation à faire vivre le projet. » Avant l’ouverture des Jeux de Rio, une trentaine de Français seront passés par le crowdfunding pour payer leur préparation.
 

Ils ont fait le pari du financement participatif


Ysaora Thibus : escrime, 24 ans, d’origine guadeloupéenne, 2e participation aux JO

La Guadeloupéenne Ysaora Thibus
L’Abymienne a déjà son ticket pour Rio. La fleurettiste numéro 5 mondiale a reçu le prix Bernard Destremau, de l’Académie des sciences morales et politiques qui récompense un sportif de haut niveau qui concilie compétition et études supérieures. « J’étais un peu frileuse sur l’idée de demander de l’argent… Mais finalement je me suis dit que cela pouvait être une expérience vraiment intéressante. J’ai adhéré et je suis satisfaite du résultat. J’ai eu beaucoup de retours de gens qui me supportent et c’était vraiment une grande joie. Je sortais de blessure et il fallait payer les examens médicaux, et le matériel qui dans ma discipline coûte assez cher. »
Argent récolté : 2195€ sur les 2000€ demandés (22 contributeurs).
Pour quoi ? : Soins ostéopathiques, préparation physique supplémentaire, matériel.
Contreparties proposées : Session Skype, tee-shirt de l’équipe de France, demi-journée à l’Insep (pôle France), initiation à l’escrime, masque dédicacé.

Dimitri Bascou : 110m haies, 28 ans, d’origine martiniquaise, 2e participation aux JO

Le Martiniquais Dimitri Bascou
Le Schoelcherois, nouveau recordman de France en 2016, est l’un des rares à ne pas avoir bouclé son financement sur Sponsorise me. Le 6 mai lors du meeting de Doha, Dimitri Bascou a réussi les minima olympiques (il se classe 5e en 13''33).
Argent récolté : 206€ sur les 4000€ demandés… qu’il n’a pas reçus car il n’a pas bouclé son projet.

David Hauss : triathlon, 32 ans, a grandi à la Réunion, 2e participation aux JO

Le Réunionnais David Hauss
Le vainqueur du 5 000m aux derniers Jeux des îles de l’océan Indien, champion d’Europe en titre (qu'il remettra en jeu le 29 mai au Portugal) n'est pas sûr d'aller aux JO. Réponse le 31 mai.
Argent récolté : 3511€ sur les 3000€ demandés (41 contributeurs).
Pour quoi ?  Financer les déplacements et la mise à disposition de son père, devenu son coach.
Contreparties proposées : Souvenir surprise de Rio, session Skype, tenue dédicacée, séminaire en entreprise.

Emmanuel Biron : sprint, 26 ans, d’origine martiniquaise, 2e participation aux JO

Le Martiniquais Emmanuel Biron
10 secondes 18 : c’est le nouveau record personnel du sprinteur établi en 2015 sur le 100m. Le relais 4x100m masculin avait obtenu sa place à Rio en mai de l’année dernière, lors des 2es Relais mondiaux de l’IAAF. Le Franciscain saura courant juillet s'il fait partie de la délégation française.
Argent récolté : en cours… 5000€ demandés.
Pour quoi ?  Soins médicaux, stages préparatoires, compléments alimentaires, déplacements, accès à la salle de musculation.
Contreparties proposées : Vidéo personnalisée, équipement de l’équipe de France, séance d’entraînement, rencontre chez un particulier ou en entreprise.

Lénora Guion-Firmin : sprint, 24 ans, d’origine martiniquaise, 2e participation aux JO

La Martiniquaise Lénora Guion-Firmin
La Trinitéenne, championne de France du 200m en 2015, saura courant juillet si elle participera aux jeux. L'année dernière elle avait permis à l'équipe féminine de se qualifier lors du Challenge mondial des relais aux Bahamas. Elle a obtenu le soutien du conseil territorial de la Martinique et espère mener ce financement à bout car "cela fait 14 ans que je fais de l'athlétisme, et 14 ans que ma banque, c'est ma mère... Si je peux la soulager un peu...". C'est que pour avoir une chance d'atteindre les critères fixés par la fédération, Lénora Guion-Firmin doit multiplier les rendez-vous. "Toutes les compétitions ne sont pas agrées pour faire les minimas et du coup il faut souvent se déplacer, parfois hors de la France. Le train, l'avion et l'hôtel sont à mes frais." 
Argent récolté : en cours… 3000€ demandés. 
Pour quoi ? : Soins médicaux, déplacements, infrastructure d’entraînement, matériels d’accompagnement.
Contreparties proposées : Session Skype, dossard dédicacé, souvenir de Rio, équipement de l’équipe de France, séance d’entraînement.

Alexandra Jupiter : beach-volley, 26 ans, d’origine martiniquaise, 1ère participation aux JO

Laura Longuet et la Martiniquais Alexandra Jupiter (à droite)
Revenue du volley pour ses premières amours, le beach, Alexandra Jupiter fait équipe avec Laura Longuet depuis septembre 2015. Elles participent à un maximum de tournois pour préparer la qualification olympique, qui se jouera lors de la Continental cup fin juin en Norvège.
Argent récolté : 3462 sur les 3000€ demandés.
Pour quoi ? : Déplacements, accompagnement d’un kiné.
Contreparties proposées : Envoi des brassières des tournois internationaux, tee-shirt France beach-volley, séance d’entraînement.

Kevin Antoniotti : gymnastique, 27 ans, d'origine réunionnaise, 1ère participation aux JO

Le Réunionnais Kevin Antoniotti
Le Saint-Louisien vient de participer à une compétition internationale en Suisse et se prépare pour les championnats de France qui se tiendront à Mulhouse les 18 et 19 mai. En première année d'école de kinésithérapie en région parisienne, Kevin Antoniotti a hâte de connaître la décision de la commission de sélection. Ses critères : "faire 88 points au général (sur les six agrès), ou faire entrer ses notes sur les critères aux barres parallèles et à la barre fixe (en tant que spécialiste)". Pour cela il teste de nouveaux mouvements en compétition.
Argent récolté : en cours... 3000€ demandés.
Pour quoi ? : Déplacements, matériel, soins médicaux.
Contreparties proposées : Tee-shirt dédicacé, maniques, tenue, séance d'entraînement, démonstration dans votre club.
Ils dévoilent les coulisses de leur préparation
Entraînements, musculation, séance chez le kiné, rendez-vous avec les sponsors… Depuis plusieurs mois, l’entraîneur de deux athlètes les suit pas à pas dans leur préparation pour Rio. Yoann Rapinier, champion de France et finaliste mondial au Triple saut, et le Guadeloupéen Mickaël Hanany, recordman de France de saut en hauteur montrent sans pudeur le quotidien de sportifs de haut niveau. A respectivement 32 et 26 ans, ils multiplient les compétitions internationales mais ne roulent pas sur l’or. Après avoir attendu des aides, ils ont décidé de se prendre en charge, et de communiquer pour trouver des sponsors. Des entreprises se sont prises au jeu et ont donné. Les quatre premiers épisodes de leur périple, filmés par leur coach Antony Yaïch, sont à retrouver sur YouTube.