Législatives : l'idée d'un groupe Outre-mer à l'Assemblée nationale refait surface

Les députés siègent à l'Assemblée nationale, à Paris, le 4 janvier 2022.
Le renouvellement des députés a remis sur le devant de la scène une suggestion évoquée depuis quelques années, celle de créer un groupe politique dédié aux Outre-mer à l'Assemblée nationale. Jugée pertinente par certains élus afin de défendre les intérêts ultramarins, elle semble néanmoins compliquée à mettre en œuvre.

Alors que les principaux partis travaillent d'arrache-pied en plein entre-deux tours afin de conquérir le maximum de sièges dans l'hémicycle, un débat refait surface : faut-il créer un groupe politique dédié aux Outre-mer à l'Assemblée nationale ? 

Déjà discutée à l'issue de l'élection présidentielle de 2017, cette idée entend permettre de mieux défendre les intérêts ultramarins en rassemblant des députés de toutes couleurs politiques.

Pour créer un groupe au sein de l'hémicycle, il faut être au minimum 15 députés et fournir au président de l'Assemblée une déclaration politique commune. En plus d'une identité marquée, chaque groupe dispose alors de moyens humains, logistiques et financiers.

Faire entendre les voix des Outre-mer

Une aubaine potentielle pour les 27 députés ultramarins élus parmi les 577 députés, pour qui les difficultés s'accumulent et retardent l'examen des problématiques propres aux Outre-mer. Temps de parole réduits, priorité à d'autres thématiques, méconnaissance des sujets Outre-mer... Le constat est partagé au Sénat, où les sénateurs guyanais avaient également lancé l'idée d'un groupe dédié aux Outre-mer, en 2017. "Les questions touchant à l’Outre-mer sont toujours traitées en dernier lieu", regrettait alors Georges Patient, expliquant à Public Sénat n'avoir "pu poser qu’une question d’actualité en 8 ans."

"Ce n'est pas facile de faire entendre sa voix, quel que soit son territoire, quand nous sommes ultramarins", résumait ainsi la sénatrice réunionnaise Nassimah Dindar, sur Réunion la 1ère lors de la soirée électorale ce dimanche 12 juin. 

Obstacles politiques

"La difficulté, c'est que les élus ultramarins devront choisir entre leur groupe politique et le groupe Outre-mer", analyse Mikaa Mered, secrétaire général de la chaire Outre-mer à Sciences Po Paris. Et les consignes des grands partis pourraient ne pas y être favorables : en fonction des résultats finaux, les groupes de la majorité présidentielle et de la Nupes, en tête du premier tour, pourraient voir d'un mauvais œil le départ potentiel des députés ultramarins et donc, de leurs sièges.

Autre problème de taille : la représentation. "Qui pour présider le groupe ? Qui pour s'exprimer sur tel ou tel texte ? Un élu issu de la Nupes, de la majorité, des régionalistes ?", s'interroge Mikaa Mered. "C'est indébrouillable."

Certains élus ne cachent ainsi pas leur frilosité quant à l'idée d'un groupe Outre-mer à l'Assemblée, craignant de voir les Outre-mer un peu plus isolés dans un "ghetto ultramarin", selon les mots de l'ancienne ministre des Outre-mer Ericka Bareigts en 2017. "Les députés qui avancent, ce sont ceux qui sont dans des groupes puissants, qui font parler d'eux et qui avancent concrètement sur des dossiers", martèle Vincent Defaud, candidat EELV dans la 2e circonscription de la Réunion. 

En clair, faire fonctionner le groupe Outre-mer demanderait une "complémentarité" et un "transpartisanisme" des élus ultramarins. "Sur le papier, cela semble réalisable, mais la réalité est plus compliquée", conclut Mikaa Mered.