Dans l'Hexagone, les Antillais de confession musulmane face au confinement : "Rien ne peut nous empêcher de faire le ramadan"

Le ramadan est un mois sacré pour les musulmans. En période de crise sanitaire, il a donc fallu s’adapter et tenir compte des restrictions sanitaires. Pour deux Antillais convertis à l'Islam et installés en région parisienne, c'est aussi l'occasion de "passer plus de temps en famille".

Quand on pouvait aller à la mosquée, c’était dix fois mieux”, déclare Yunus Lodin. Pour ce musulman originaire de la Guadeloupe, passer le ramadan dans un contexte de crise sanitaire l'empêche se rendre à la mosquée, là où il pouvait "voir des gens, échanger avec des amis". Aujourd'hui soumis aux restrictions sanitaires dues à la crise sanitaire, Yunus Lodin passe donc “plus de temps en famille”, et va passer un ramadan dans “une ambiance différente”. Ce membre de l’association musulmane antillaise de France (AMA), converti depuis de longues années à l’Islam, se réjouit à l'idée de passer “une période de paix et de remise en question”, malgré la pandémie de Covid-19. 

 

Des restrictions sanitaires qui limitent la convivialité 

Cette année encore, le ramadan, période durant laquelle les musulmans prient, étudient le Coran et observent une période de jeûne, se déroule alors que la crise sanitaire liée au Covid-19 se poursuit. Une crise qui a poussé les autorités françaises à déclarer une troisième période de confinement assortie d’un couvre-feu entre 6h00 et 19h00. 

Pour Jean-Paul Abd Al Raman, fondateur de l’AMA et originaire de la Guadeloupe, “ces mesures ne changent rien”. “Je continue à aller au travail, je peux même aller de temps en temps dans une mosquée qui est juste à côté” détaille-t-il. Converti à l’Islam depuis plusieurs dizaines d’années et installé en région parisienne, ces restrictions ont même quelques avantages. “Je passe beaucoup plus de temps avec ma famille et à la maison. Même s’il est vrai qu’on ne peut plus se retrouver entre amis pour rompre le jeûne, je vais passer un bon ramadan”. 

De son côté, Yunus Lodin reconnaît que l’impossibilité de se retrouver à la mosquée pour rompre le jeûne donne une “ambiance différente” à ce mois de ramadan. À huis clos, “même si c’est moins convivial, on récite nous-même le Coran, on va à notre rythme”, détaille le commercial. 

Des lasagnes, des accras et des dombrés crevettes au menu

Amis de longue date, Jean-Paul Abd Al Raman et Yunus Lodin avaient parfois l’habitude de se retrouver pour l’iftar, le moment de rupture du jeûne, célébré à la tombée du jour pendant le mois de ramadan. Un moment qui se tient après les prières et au cours duquel les croyants sont autorisés à manger et à boire. 

Chez nous, on mange créole comme on mange français. 

Yunus Lodin, représentant commercial de confession musulmane et originaire de la Guadeloupe

 

Cette année, ils ne pourront pas partager le même repas mais se réjouissent déjà des plats qu’ils pourront consommer. Si Jean-Paul Abd Al Raman ne sait pas encore ce qu’ils vont manger chez lui à l’occasion du premier jour de ramadan, il est sûr d’une chose : les Antilles seront à l’honneur. “Des accras, du riz, du colombo ou encore des dombrés de crevettes… C’est ce qu’on a l’habitude de manger lorsque que l’on rompt le jeûne. Et surtout, il nous faut beaucoup de dattes”, insiste le père de famille. “Ma femme est Réunionnaise, j'ai des origines guadeloupéennes. Chez nous, on mange créole comme on mange français. Et ce soir, d'ailleurs, c’est lasagnes”, explique Yunus Lodin. 

“On s’est bien préparé”

Alors que le ramadan débute ce mardi 13 avril, les deux Antillais se disent reconnaissants de pouvoir célébrer ce mois sacré. “J’ai beaucoup d’amis qui sont décédés, d’autres qui ont appris qu’ils avaient un cancer… J’ai demandé à Dieu de me garder en vie pour que je puisse vivre cette période”, explique Yunus Lodin qui s'estime chanceux de pouvoir respecter la tradition musulmane. “En tant que croyant, on a toujours peur de ne pas être au rendez-vous”, appuie-t-il. 

Le ramadan, c’est bénéfique pour plein de choses. Le fait de jeûner fait du bien au corps. D’ailleurs, à force, je ne m’en rends compte qu’à partir du cinquième ou du sixième jour”. Celui qui est à l’origine de l’AMA affirme que “rien ne peut nous empêcher de faire le ramadan”. “On s’est bien préparé. Et tant qu’il y aura des dattes et de l’eau, ça ira”, achève Jean-Paul Abd Al Raman.