Les massues du Pacifique : au-delà des armes, des chefs-d'œuvre à découvrir

Les massues du Pacifique des îles Fidji, Salomon ou de Nouvelle-Calédonie, longtemps assimilées par les Européens à d'effrayants gourdins, sont des chefs-d'œuvre artistiques aux multiples fonctions, comme le révèle une exposition à partir de mercredi à Paris.

Près de 140 massues, aussi appelées "clubs", "casse-tête", "batoni", "clavas" ou "keules", selon les régions du monde, sont présentées jusqu'à fin septembre au musée du Quai Branly à Paris.

"C'est la première d'envergure sur le sujet", dit à l'AFP Stéphanie Leclerc-Caffarel, commissaire avec le Britannique Steven Hooper. "Elle a pour ambition de montrer comment et pourquoi ce sont des objets exceptionnels ayant bien d'autres fonctions que celle d'armes, à laquelle les premiers Européens qui les ont acquises les ont réduites", ajoute-t-elle.

En bois précieux, pierre ou os de cétacé, ornés de coquillages, de pierres précieuses, de dents de requin, de cheveux ou de nacre, ces objets aux formes, dimensions et matières très variées, ressemblent d'abord à de précieuses sculptures et bâtons de cérémonie qui rappellent aussi l'art moderne et le design contemporain.

Massue en provenance des Iles Salomon.


"Ce sont bien davantage que des armes. Fabriquées à la main, chacune est unique et porte souvent un nom personnel. Parmi les multiples rôles qui leur sont assignés, il y a d'abord leur pouvoir de représentation du statut social, du prestige et du pouvoir", dit à l'AFP Steven Hooper, professeur à l'université d'East Anglia au Royaume-Uni.
"Utilisées dans les danses et les cérémonies, elles ont aussi une fonction rituelle, symbolique d'autorité et d'échange entre individus, mais aussi avec le divin et les ancêtres ; bon nombre d'entre elles n'ont probablement jamais été utilisées au combat", ajoute-t-il.

"Si l'efficacité au combat nécessitait un bâton bien équilibré, pourquoi les peuples du Pacifique se seraient-ils donnés tant de mal pour créer de véritables objets d'art et sculptures d'une extraordinaire diversité de formes et de motifs ?", s'interroge-t-il.
Des répliques modernes de ces massues dans de nombreuses régions d'Océanie servent aujourd'hui de "cadeaux diplomatiques habituels, réservés, dans le cas des Britanniques, aux membres de la famille royale", ajoute M. Hooper.
Il cite à titre d'exemple, un "tewhatawha" maori (Nouvelle-Zélande) offert par les musiciens d'un orchestre militaire à la reine Elizabeth II pour son 90e anniversaire.

Regardez le reportage de Denis Rousseau-Kaplan et Rael Moine