La loi sur la protection et la promotion des langues régionales adoptée par l'Assemblée nationale

La proposition de loi sur la protection et la promotion des langues régionales a été adoptée jeudi à l'Assemblée nationale, dans l'indifférence. Le texte avait été considérablement réduit en commission. La députée martiniquaise Josette Manin a exprimé sa déception pour les Outre-mer.
Sur 49 votants, 46 se sont exprimés et 46 ont voté pour. La proposition de loi sur la protection et la promotion des langues régionales a été adoptée à l'unanimité ce jeudi en première lecture à l'Assemblée, en présence du Ministre de l'Éducation. Mais un vote sans grand enjeu. On vous explique pourquoi.
 

"Une loi vidée de sa substance"

D’après son rapporteur, Paul Molac, député régionaliste du Groupe Libertés et Territoires (auquel appartient le député de Wallis et Futuna Sylvain Brial ndlr) et élu du Morbihan, cette loi avait été "vidée de sa substance”, lors de son passage en commission des Affaires culturelles de l’Assemblée nationale. Dès la semaine dernière, il exprimait sa déception dans la presse. En effet, le texte avait été sérieusement réduit.

Un constat partagé par la députée martiniquaise Josette Manin (groupe socialistes et apparentés) : de la proposition de loi initiale, "il ne reste que des symboles et des intentions". Malgré cela, "pour être cohérent", son groupe a voté en faveur de la loi. 
Le député breton Paul Molac à l'Assemblée, en 2015.
 

Pas d'enseignement des langues régionales 

À l’issue de la discussion en commission, il ne restait que trois des neuf articles originaux : seuls les deux articles sur la reconnaissance des langues régionales comme élément du patrimoine, ainsi que celui réaffirmant la signalétique bilingue sur les panneaux, ont été conservés.

L'ensemble des articles concernant l’enseignement des langues régionales a tout simplement été enlevé. Il n’est donc plus question d’”enseignement des langues régionales dans le cadre de l’horaire normal des écoles et établissements d’enseignement" (article 3)”, ni de l’"enseignement immersif en français et en langue régionale " (article 4).

Hier en séance publique, le rapporteur Paul Molac a remis cette problématique sur la table, en proposant "le rétablissement de tout ce qui a été enlevé sur l'éducation."
 

"Comment pouvoir préserver une langue si elle n'est pas apprise, si elle n'est pas maîtrisée(...) Sinon, une langue vivante, elle disparaît, tout simplement "
-Paul Molac, député du Morbihan 

 

"La non-reconnaissance de la multiculturalité linguitique" Outre-mer

Pour la députée Josette Manin, le rejet des articles 3 et 4, “c’est quelque part la non-reconnaissance de la multiculturalité linguistique [de nos Outre-mer] qui provient d’Europe, d’Asie, d’Afrique ou d’Amérique”.
 

 La France est multicolore et ces langues sont le symbole de ce métissage culturel.
 -Josette Manin, députée de La Martinique


Et la députée de prendre l’exemple du créole antillais qui compte “quelque 10 millions de locuteurs” dans le monde : "je vous laisse imaginer l’importance que son enseignement revêt en matière de diplomatie culturelle et d’influence dans la Caraïbe." Vous pouvez réecouter son intervention ici :

De son côté, le ministre de l'Éducation a défendu le rôle du gouvernement dans le développement des langues régionales. Action notamment soutenue par la députée de l’Essone Stéphanie Atger, d’origine polynésienne (LaREM).

"L'approfondissement des langues régionales est déjà porté par le gouvernement", a-t-elle indiqué. "La réforme du baccalauréat a permis de mieux prendre en compte les langues régionales dans les épreuves (...) Avant donc de porter de nouvelles mesures, il conviendrait d’analyser en profondeur les effets des réformes en question sur l’enseignement des dites langues”, a-t-elle ajouté.

Une reforme sur laquelle justement les différentes parties ne s'entendent pas. Le député Paul Molac avait déjà alerté le gouvernement quant aux conséquences de cette réforme sur les langues régionales.