Les enjeux de la visite à Mayotte du ministre délégué à la Santé, Frédéric Valletoux, les 9 et 10 mai

Le ministre délégué à la Santé Frédéric Valletoux sera à Mayotte le jeudi 9 et vendredi 10 mai. Alors que le système de santé est déjà à bout de souffle, le département fait face à une montée des cas de choléra. Pour l'évoquer, le ministre sera notamment ce jeudi l'invité du journal de 19h de Mayotte la 1ère.

Frédéric Valletoux, le ministre délégué à la santé, sera en déplacement à Mayotte le jeudi 9 et vendredi 10 mai. Une visite annoncée la semaine précédente sur le plateau de Mayotte la 1ère pour constater l'efficacité du dispositif de lutte contre le choléra. Le programme du ministre n'a pas encore été dévoilé, mais il sera ce jeudi soir l'invité du journal de 19h de Mayotte la 1ère.

La propagation du choléra

Au cœur de cette visite : les cas de choléra qui ne cessent d'augmenter. 58 cas ont été confirmés dans le département depuis le 19 mars d'après le dernier bulletin de Santé Publique France ce lundi. Le nombre de cas a été multiplié par quatre en une semaine et demie depuis la découverte des premiers cas autochtones à Koungou.

L'Agence Régionale de Santé a déployé un centre de dépistage et un centre mobile de vaccination dans la commune. 4.058 cas contact ont été vaccinés. Certains élus plaident pour une campagne de vaccination massive, même si la mesure avait été écartée par l'ARS au début de la crise en raison d'une pénurie de doses au niveau mondial. "Je demande une campagne de vaccination massive pour les volontaires, il faut distribuer du gel hydroalcoolique, reprendre la distribution d'eau gratuite et distribuer des pastilles pour potabiliser l’eau car on a toujours des coupures", énumère la députée Estelle Youssouffa. Beaucoup de Mahorais s'inquiètent d'un risque d'épidémie, avec la rentrée scolaire prévue ce lundi et les centaines de migrants qui campent dans les rues, sans accès à de l'eau potable ou des sanitaires.

Le centre de dépistage du choléra de Koungou se trouve à l'école maternelle et élémentaire plateau.

Une pénurie de soignants

Une cellule de prise en charge des cas de choléra de 20 places a été mise en place au centre médical de Dzoumogné. Celle du CHM de Mamoudzou est passée de 8 places à 34 places. Des dispositifs qui mobilisent de nombreux soignants, une ressource rare à Mayotte. Pour réorienter les effectifs, les dispensaires ont été fermés, à l'exception de celui de Jacaranda et Mstapéré. 67 médecins et infirmiers de la réserve sanitaire sont actuellement présents dans le département. Les effectifs habituels ne permettent pas de faire face à l'afflux de patient.

Depuis près d'un an, le plan blanc est en vigueur au Centre Hospitalier de Mayotte. Le service des urgences fonctionne actuellement avec 5 postes pourvus sur 44. Le service a même dû fermer ses portes mercredi soir faute de soignants. Le CHM souffre de problèmes d'attractivités, liés en grande partie à l'insécurité qui règne dans l'île, et les soignants doivent mettre les bouchés doubles. "Nous sommes en crise permanente, avec des effectifs en burn-out", déplorait fin février le directeur du CHM, Jean Mathieu Defour.

La situation se dégrade dans la plus grande maternité d'Europe

Le manque d'effectif touche également les sages-femmes, alors que Mayotte abrite la plus grande maternité d'Europe avec plus de 10.000 naissances par an en moyenne. Alors qu'en fin d'année, 80 sages-femmes officiaient au CHM, elles ne sont plus que 70 selon l'ordre départemental des sages-femmes. Avec les contrats qui se terminent, il n'en restera que 60 en juin. Il en faudrait 180 pour faire fonctionner le service correctement. Là aussi, environ une quinzaine de sages-femmes de la réserve sanitaire sont en renfort. "Mais nous n'avons pas de visibilité, car elles arrivent au fur et à mesure pour des rotations de deux-trois semaines", explique Cloé Mandard, la présidente de l'ordre. Les maternités de Dzoumogné et Mramadoudou sont déjà fermées, la fermeture de celle de Kahani serait aussi envisagée.

"On a une vingtaine de lits par maternité, ce qui entraîne un manque de lits pour les hospitalisations et donc des sorties anticipées après les grossesses", poursuit-elle. "Les sages-femmes libérales sont démunies quand leurs patientes ont besoin d'hospitalisation, elles leur conseillent de se faire soigner dans l'Hexagone ou à La Réunion." Elle déplore aussi des retards de prise en charge avec une seule ligne du SMUR disponible actuellement. "On a des patientes qui restent bloquées dans les dispensaires, en attendant de pouvoir être hospitalisées au CHM. C'est une perte de chances." 

Elle attend de la venue du ministre délégué à la Santé des annonces sur la revalorisation du statut des sages-femmes, une reconnaissance du caractère médical de la profession. "À la rentrée, les études de sages-femmes vont passer à six ans. On ne peut pas demander à des étudiants de faire six années d'études pour démarrer avec de bas salaires", précise la présidente départementale de l'ordre. "On a une fuite des diplômés vers le privé, et ça aussi cela nuit à l'attractivité." Elle évoque "une crise de la périnatalité" à Mayotte, alors que les sages-femmes peuvent remplacer certaines consultations auprès de gynécologues et jouent un rôle essentiel pour la vaccination des enfants.

Le deuxième hôpital à Combani

Pour faire face aux besoins grandissants du territoire, un deuxième hôpital est en projet à Combani. L'enquête publique est en cours jusqu'au 27 mai. Ce site de 60.000 m² accueillera 450 lits et un personnel estimé à 2.600 soignants et agents et 250 médecins. L'hôpital sera divisé en trois bâtiments avec un bloc opératoire, un service de radiographie, une hélistation, une unité de psychiatrie ou encore une unité obstétrique. Le chantier doit démarrer en 2025 pour un budget de 343 millions d'euros. 

Cet hôpital sera aussi dimensionné pour accueillir à terme une technopole de santé avec des logements pour le personnel, des fonctions commerciales ou encore des offres industrielles comme une cuisine centrale ou une blanchisserie. Un projet de grande ampleur, reste à savoir comment recruter suffisamment de personnel pour occuper ces locaux. Lors de sa venue à Mayotte en décembre, la Première ministre avait évoqué la création d'un deuxième institut de formation en soins infirmiers pour former localement et une revalorisation de la prime des soignants pour renforcer l'attractivité.