Lors du scrutin, le centre d'origine picarde du Utah Jazz est arrivé 11e dans sa catégorie (ailiers et intérieurs) au vote du public, et 9e à celui des joueurs, deux positions qui lui donnaient peu de chance de rejoindre les étoiles.
Mais à l'instar des journalistes, qui l'avaient placé beaucoup plus haut (5e), les entraîneurs de la ligue professionnelle nord-américaine ont porté un regard nouveau sur celui qui avait été snobé en 2017 et surtout en 2019.
Very grateful to have to the opportunity to represent the @utahjazz in Chicago with my brother @spidadmitchell ! Never stop chasing your dreams! 🔮 https://t.co/8d1O6tRMRu
— Rudy Gobert (@rudygobert27) January 31, 2020
Pour le double meilleur défenseur en titre de la NBA, ce sont peut-être les chiffres en attaque qui ont fait la différence, cette fois.
En janvier, au moment où tout se décidait, Rudy Gobert a ainsi connu une série de 12 matches à près de 20 points de moyenne (19,4), qui plus est avec une adresse (69,6%) encore supérieure à sa moyenne (68,9%), déjà la meilleure en NBA.
"Depuis un moment, il est quand même sur une sacrée série", souligne l'un de ses agents, Jérémy Medjana. "A un moment, on ne peut pas faire autrement que de se rendre à l'évidence."
"De la marge offensivement"
Depuis 20 ans, la NBA a progressivement modifié ses règles et les directives données à ses arbitres pour libérer les attaques. Cette révolution tranquille et l'arrivée massive de joueurs étrangers, avec des basketteurs de grande taille plus polyvalents, a totalement ouvert le jeu. La moyenne de points par match enregistrée en NBA cette saison et la précédente est la plus élevée depuis près de 50 ans.Dans ce contexte, les pivots spécifiques, qui ne shootent pas de loin, comme c'est le cas de Rudy Gobert (2,15 m), sont devenus rares. Le travail défensif et collectif est, par nature, ingrat et obscur, mais il est franchement occulté à l'ère des réseaux sociaux et de la viralité.
Mercredi, Gobert a totalement dominé son sujet contre Miami, une équipe de premier plan, mais ce que Twitter a retenu de ce match, c'est un dunk du pivot Bam Adebayo sur le Français, absolument pas représentatif du match dans son ensemble.
"Ce qu'il y a de fort, c'est d'exister dans un contexte comme ça", relève Jérémy Medjana, co-fondateur de l'agence Comsport avec Bouna N'Diaye.
Quand tu es deux fois meilleur défenseur de l'année et que tu n'as pas forcément la reconnaissance que tu pourrais réclamer, dans une équipe qui gagne, des fois, c'est un peu difficile à digérer. Mais il a persévéré.
- Ian Mahinmi, pivot français des Washington Wizards
Le sport a depuis longtemps été envahi par les statistiques, mais depuis un peu plus d'une décennie, une foule de nouveaux paramètres permet de mieux prendre en compte certains aspects obscurs mais essentiels du basket.
Dans beaucoup de ces catégories, Rudy Gobert apparaît dans les cinq premiers joueurs de la ligue, témoin de son influence en défense, mais aussi en attaque, où ses écrans et son placement ouvrent le jeu.
"L'analyse est très poussée aujourd'hui en NBA et cela lui offre de la considération méritée", observe Jérémy Medjana.
"Pour les cinq un peu plus conventionnels, ce n'est pas la fin d'une ère", assure Ian Mahinmi.
S'il a construit sa légitimité sur la défense, Rudy Gobert a confirmé, ces dernières semaines, qu'il était capable de devenir une option offensive régulière, voire majeure.Il faudra toujours des défenseurs, des gars qui protègent l'arceau, qui aient ce rôle de grand frère dans l'équipe. Il faut juste pouvoir s'ajuster et avoir tous ses coéquipiers autour qui comprennent ce que toi tu peux apporter.
Depuis quelques semaines, le numéro 27 a même commencé à travailler avec un coach particulier spécialisé dans l'attaque, Tim Martin, qui a collaboré, entre autres, avec Trae Young, le scoreur des Atlanta Hawks.
"Il a encore de la marge offensivement", assure Jérémy Medjana.
La carrière NBA de Rudy Gobert en quelques moments clés
- En mai 2013, il est drafté en NBA par les Nuggets de Denver, et est immédiatement échangé au Jazz de l’Utah.
- Il ne joue quasiment pas avec cette équipe pendant un an et demi, avant de prendre la place du pivot titulaire du Jazz de l’Utah.
- En 2017, il fait ses premières playoffs. Il se blesse dès le premier match, mais revient pour la fin de la série.
- En 2018 et 2019, il est défenseur de l’année. Après Joakim Noah, c’est le deuxième français à recevoir cet honneur.
- C’est le troisième français à participer au All-Star Game de NBA, après Tony Parker et Joakim Noah. C’est aussi le premier ultra-marin à prendre part au show du basket US.