Non retenus pour Tokyo 2021, la Guyanaise Alexie Alaïs et son javelot préparent déjà 2022

Autoportrait de l'athlète guyanaise Alexie Alaïs sur l'aire de lancer au CREPS de Boulouris dans le Var.
Son pari olympique est finalement perdu. Mais de peu. Gravement blessée au genou en septembre 2020, la Guyanaise Alexie Alaïs a juste manqué de temps pour retrouver son vrai niveau. Trois semaines peut-être. Pas abattue pour autant, la lanceuse de javelot pense déjà aux championnats du monde.

Ces trois dernières années, Alexie Alaïs a souvent emprunté le grand huit des émotions. En 2018 débute la lente montée vers les sommets. Aux championnats d'Europe à Berlin, elle prend la sixième place du concours de javelot. La Guyanaise n'a pas encore 24 ans. Le grand public découvre son énergie communicative. Son sourire. Cette volonté farouche. Un an plus tard en Pologne, Alexie s'impose aux championnats d'Europe par équipes. Un lancer à 63 mètres 46. Record personnel balayé. La Fédération française lui garantit alors une place aux JO de Tokyo. Charge à elle de conserver son état de forme. Frisson avant la chute.

Car si les championnats de France 2020 lui offre bien un nouveau titre, son genou gauche se brise littéralement. Albi ou la grande descente. Nous sommes en octobre. Grosse opération. Convalescence et reprise d'un entraînement adapté quasi-simultané. Le pari est fou. Insensé. Être prête pour les JO de Tokyo repoussés à l'été 2021. Alexie va tout donner. Mais entre-temps, sa Fédération change de DTN. De règles aussi. On demande désormais à la Guyanaise de figurer dans le Top 20 mondial des lanceuses de javelot au printemps 2021. Un défi impossible pour une athlète qui alterne encore entraînements et soins spécifiques. Qui plus est, neuf mois après une blessure aussi grave.

 

La guerrière a juste perdu une bataille

Alexie Alaïs l'annonce dans un grand sourire : "Tout n'a pas été fait normalement. J'étais une convalescente qui s'entraînait. Mais je n'ai jamais baissé les bras !" Les protocoles de soins de référence annonçaient douze mois avant de reprendre une activité normale. Pas moins. Or neuf mois après son opération, la Guyanaise a de nouveau disputé les championnats de France. Déjà de retour. Ambitieuse. Obstinée. "Chaque jour, mon genou progresse. Juste après les France, j'ai encore franchi un cap en lançant à 52 mètres lors d'un meeting à Cannes. Nous sommes à quatre semaines des Jeux. J'aurais pu retrouver mon niveau d'ici là. C'est une certitude."

Sauf que les sélectionneurs n'ont pas souhaité offrir ce délai à la championne. Pas de Jeux Olympiques en 2021 pour Alexie. La course contre-la-montre se perd d'un rien. "Le temps a été à la fois, mon meilleur ennemi et mon meilleur ami. Mon ennemi car il ne m'a pas permis de m'exprimer normalement. Les délais étaient trop serrés. Mais le temps fut également mon ami. Il m'a appris des choses sur la souffrance, sur moi…" À croire que la guerrière de Kourou est ainsi mieux armée pour les batailles futures.

 

Juste abattue le temps d'un week-end

Malgré cette détermination hors-du-commun, la guerrière Alaïs a mal vécu de ne pas se retrouver dans l'armée tricolore en partance pour le Japon. Le vendredi 2 juillet, l'annonce officielle des sélectionnés a ainsi plongé Alexie dans une grande tristesse. "Je me sentais vide. Tu t'entraînes toute ta vie pour ça. Pour moi, l'impossible est toujours possible. Mais après cette annonce, j'ai été mal pendant trois jours. Heureusement que je n'étais pas seule. Pierce, mon compagnon m'a beaucoup soutenue. Ma famille aussi. Le lundi, j'étais de nouveau d'attaque. Focalisée sur 2022 et les championnats du monde aux États-Unis."

Très vite, la Guyanaise devrait repasser par la case chirurgie. Toujours pour le même genou. Histoire de compléter la première intervention. Un seul mois de convalescence. Et à la sortie, un genou intégralement réparé ! "Cette nouvelle opération doit me permettre de retrouver une flexion complète. Aujourd'hui, je lance uniquement avec mon épaule. C'est bien car le haut du corps a fait de gros progrès. Mais si mon genou n'est pas plus solide et plus flexible, je ne peux pas lancer aussi loin que j'en ai envie." Le record de France en vue, peut-être ?

 

La Guyane, son équilibre

Dès l'intervention chirurgicale passée et sa convalescence effectuée, Alexie Alaïs va rentrer en Guyane. Retour aux bonnes habitudes. Les fameux six mois / six mois. Ou l'automne-hiver au pays. Et le printemps-été au CREPS de Boulouris dans le Var. "Cela va m'apporter un réel confort. J'ai besoin de me sentir chez moi. Près de ma famille. C'est mon équilibre. Sur place, j'ai de bonnes conditions pour m'entraîner. Et comme ma mère est infirmière et sophrologue, elle m'aide aussi beaucoup dans ma préparation mentale."

Avant cela, les Jeux Olympiques de Tokyo auront rendu leur verdict. Des JO qu'Alexie ne comptait pas regarder. Dans un premier temps tout du moins. "Pierce a été très clair : on va s'asseoir tranquillement et suivre ces Jeux avec passion. Il faut vivre un tel événement. Il avait raison !" D'autant plus que trois athlètes guyanais porteront le maillot de l'équipe de France d'athlétisme : la sprinteuse Gémima Joseph et les relayeurs Marvin René et Amaury Golitin. "Je suis à fond derrière eux. J'espère qu'ils vont faire quelque chose de bien. Avec une pensée toute particulière pour la jeune Gémima. Comme moi, elle vient de Kourou. Je lui souhaite de prendre du plaisir… et de nous faire rêver !"

Dans le groupe d'entraînement d'Alexie Alaïs, on reconnaît ses entraîneurs : Magali Waldet-Brisseault, tout à droite et son mari David, tout à gauche.