Karlheinz Creugnet, 57 ans, est éleveur de bovins à Boulouparis. Dans cette commune à vocation agricole, son exploitation familiale s’étend sur 250 hectares. Son cheptel comprend plus de 400 têtes de bétail. Son fils Julien, 24 ans, “donne la main” à son père.
Après deux ans passés à Nouméa pour décrocher son BEP en maintenance des équipements industriels, il est revenu dans leur fief. C’est à Boulouparis que s’était établi leur aïeul, un Français, originaire de Charente-Maritime qui “accompagnait les bagnards” vers la Nouvelle-Calédonie à la fin du 19ème siècle. “Il est resté ici parce qu’il avait le mal de mer. Il était commerçant. On est resté commerçant et éleveur”, confie ce stockmen.
Stockmen est le nom donné en Nouvelle-Calédonie aux cow-boys, ceux qui élèvent les bovins à cheval. Une méthode empruntée aux voisins australiens. “Travailler avec le cheval c’est la tradition. C'est ce qui se faisait en Australie. Aujourd’hui, c’est un métier qui se perd parce que les propriétés sont plus petites”, explique l’éleveur attaché à la tradition.
Sereins à l'approche du référendum
Partisans du maintien de la Nouvelle-Calédonie au sein de la République française, les deux hommes restent sereins à l’approche du référendum d’auto-détermination du 12 décembre. Pour Julien, les relations sont apaisées entre descendants de colons blancs et la population kanak. “Il faudrait qu’on trouve une solution pour notre pays. Qu’on arrête un peu de se disputer alors que sur le terrain, tous les jours, on se côtoie, on est ensemble”, exhorte Julien. “Il n’y a pas de malaise au jour le jour. Je parle pour nous, les dernières générations, les plus jeunes, ceux qui n’ont pas connu les événements. Je pense qu’on a bien évolué. Qu’on va quand même dans le bon sens”, assure le jeune homme, chapeau vissé sur la tête.
Son père exprime un ras-le-bol après la succession de trois consultations depuis 2018. L’incertitude politique met, selon lui, à mal la gestion économique de la Nouvelle-Calédonie. Il met dos à dos indépendantistes et non indépendantistes. “On a plus fait de la politique pendant 30 ans que de s’occuper de l’économie. Un pays se construit sur une économie. Il ne se construit pas sur de la politique. Pourquoi aujourd’hui on n’arrive pas à s’autosuffire ? On est obligé d’acheter de la viande ailleurs. Il y a un problème”, fustige l’éleveur de sa voix rocailleuse. Tous deux iront voter le 12 décembre.