Pour quelles raisons les non indépendantistes ont-ils permis l'élection de Veylma Falaeo à la présidence du Congrès de la Nouvelle-Calédonie ?

Gil Brial, élu de l'intergroupe Loyalistes, interrogé après l'élection de Veylma Falaeo à la présidence du Congrès.
"On a pris nos responsabilités." Gil Brial explique le raisonnement qui a conduit son intergroupe Loyalistes à soutenir la candidature de Veylma Falaeo, ce jeudi, au Congrès de la Nouvelle-Calédonie : faire barrage à la réélection de Roch Wamytan. La conseillère Eveil océanien, qui ne se réclame pas d'un bloc, l'a emporté en faisant le plein des voix non indépendantistes. Réactions.

Pourquoi les Loyalistes et le Rassemblement n’ont-ils pas maintenu la candidature de Naïa Wateou au second tour ? Mais plutôt décidé de soutenir celle de Velma Falaeo ? “Plusieurs raisons, explique Gil Brial, à l’origine d’une suspension de séance entre les deux tours, ce jeudi 29 août, au Congrès. Leur candidate venait alors de recueillir 19 voix sur 54, contre 26 pour Roch Wamytan (groupes indépendantistes), 6 à Philippe Dunoyer (Calédonie ensemble) et 3 à Veylma Falaeo (Eveil océanien). 

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"Tout faire pour que Roch Wamytan ne soit pas réélu"

Première raison invoquée ? “Notre obligation en tant qu’élus loyalistes, et par respect envers tous ces Calédoniens qui ont vu leur entreprise brûler, qui ont perdu leur emploi, qui ont perdu leur maison, pour ceux  qui sont séquestrés au Mont-Dore, c’était de tout faire pour que Roch Wamytan ne soit pas réélu président du Congrès.”

On ne pouvait pas laisser à la présidence du Congrès quelqu’un qui ne condamne pas les exactions.

Gil Brial, Loyalistes

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"La seule façon"

“La seule façon d’y arriver était de permettre à Veylma Falaeo d’être présidente du Congrès”, a-t-il ajouté au micro de NC la 1ère. Est-ce qu’il y a eu un accord en ce sens avec l’Eveil océanien ? “Non, assure Gil Brial. On a pris nos responsabilités tout seuls. C’est pour ça que j’ai demandé cette suspension de séance. Je voulais faire le point avec le Rassemblement et Calédonie ensemble.” Et de remercier à la fois Naïa Wateou et Philippe Dunoyer de s’être retirés de la course.

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“Que ce soit la première étape de la reconstruction"

"Nous avons pris, nous, cette décision”, insiste l’élu Loyalistes. “On veut que ce soit la première étape de la reconstruction. Ce qu'on veut proposer à nos collègues dans les jours qui viennent, c’est de sortir d’une logique indépendantistes / loyalistes. Ce n’est pas ça qu’on a fait aujourd’hui. C’est de mettre autour de la table tous ceux qui veulent reconstruire, en opposition à ceux qui voulaient détruire. Et là, on avait une majorité qui détruisait la Nouvelle-Calédonie.”

On va proposer à Calédonie ensemble, au Rassemblement, à l’Eveil océanien mais également au Palika, que tous ceux qui sont dans une logique de reconstruction de la Nouvelle-Calédonie puissent travailler ensemble.

Gil Brial, Loyalistes

Son interview

 

Des suites judiciaires ou pas

Au cours de l'après-midi, la cheffe de file des Loyalistes a réagi sur sa page Facebook. "La justice décidera des suites judiciaires à apporter, ou pas", écrit Sonia Backès. "En attendant je suis heureuse que nous ayons réussi à faire élire un autre président."

Pour condamner l'accord avec l'Azerbaïdjan

La candidate Naïa Wateou était aussi soutenue par le Rassemblement. Au second tour, les élus du parti ont reporté leurs voix sur Veylma Falaeo. "Depuis des semaines et des mois déjà, nous considérions que Roch Wamytan ne pouvait plus assurer ses fonctions de président du Congrès", explique Virginie Ruffenach, présidente du groupe Rassemblement. "Pour différentes raisons, d'abord un accord signé avec l'Azerbaïdjan, sans jamais consulter ni le bureau du Congrès, ni les élus. Un accord avec un pays qui est contre la France, il y a là-dedans une intention très claire. Nous considérions que ce n'était pas de l'ordre de l'intérêt général et qu'il fallait stopper ces démarches."

Représenter l'ensemble des Calédoniens

Et ce n'est pas le seul grief reproché par les élus du Rassemblement à Roch Wamytan. "Des propos nous ont choqués, dans certains rapports officiels. L'ancien président du Congrès aurait dit que 'le seuil de tolérance des blancs était atteint'. Pour nous, c'était un propos qui indiquait que Roch Wamytan ne pouvait plus présider cette institution. Parce que, quand on est à la tête du Congrès de la Nouvelle-Calédonie, quelle que soit sa conviction personnelle, on doit représenter l'ensemble des Calédoniens. Ce communautarisme, peut-être cette forme de racisme, l'engagement de notre institution dans des relations avec l'Azerbaïdjan, nous ont poussés à dire qu'il fallait un nouvel élan."

C'est la raison pour laquelle [...] nous avons décidé de donner sa chance à Veylma Falaeo, qui semble être en rupture avec ce qui a été fait jusqu'à présent. 

Virginie Ruffenach, présidente du groupe Rassemblement au Congrès

Son interview 

©nouvellecaledonie

Une "dérive" selon Calédonie ensemble

De son côté, Calédonie Ensemble a retiré sa candidature au second tour au profit de Veylma Falaeo. Philippe Dunoyer évoque deux raisons à cette décision. "Pour sanctionner Roch Wamytan" d'abord, là aussi à cause de cette convention signée avec l'Azerbaïdjan. "Notre avis, c'est qu'il a, sans prévenir le Congrès, commis une dérive. Un acte qu'on trouve inadmissible par rapport au bon fonctionnement de notre institution." 

Sortir des "tranchées politiques"

Mais Philippe Dunoyer défend aussi "un message d'espoir dans le vote pour Veylma Falaeo. L'espoir que l'on sorte collectivement de nos tranchées politiques et qu'on essaye de créer une nouvelle dynamique à l'instar du vote hier de la résolution qui est allé chercher de manière transpartisane une très large majorité, indépendantiste et non indépendantiste."

L'élu de Calédonie ensemble estime que la personnalité de la nouvelle présidente permettra à l'institution d'être "très active" dans le chantier immense de reconstruction. 

Une élection qui surprend les électeurs

Interrogé sur ce retournement de situation inattendu, le conseiller convient que l'élection de Veylma Falaeo puisse surprendre les électeurs. "La Calédonie souffre, elle est dans une situation terrible. Le péril est immense, et il impose à tous les responsables politiques, économiques, sociaux et syndicaux de se retrouver parce que l'urgence est de mise. Et bien sûr ça peut amener des situations qui sont surprenantes."

L'objectif, c'est vraiment de retrouver une institution apaisée.

Philippe Dunoyer, élu Calédonie ensemble

Son interview

©nouvellecaledonie