"Souveraineté partagée", "détresse", "rêve calédonien" : ce qu'on peut retenir après l’entretien de Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher avec Nouvelle-Calédonie la 1ère

L'entretien de Gérard Larcher et Yaël Braun-Pivet aux médias calédoniens ©NC la 1ère
Après trois journées marathon en Nouvelle-Calédonie, les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat ont conclu leur visite, inédite, par un entretien avec les médias, mercredi 13 novembre. Six mois jour pour jour après le déferlement de violences. Voici ce qu'on peut en retenir.

Quels lendemains pour une Calédonie meurtrie ? Invités de l’édition spéciale diffusée sur NC la 1ère, mercredi 13 novembre au soir, les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat ont évoqué l’avenir institutionnel. "On a toujours inventé des solutions singulières, originales, pour la Nouvelle-Calédonie, et il faut continuer à le faire", a plaidé Yaël Braun-Pivet.

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"Il faut innover"

"L’important, ajoute-t-elle, c’est le contenu, pas tellement le contenant. Regardons, avec tous, ce qu'on met dans cette solution institutionnelle, avant de s'arrêter à des noms qui peuvent parfois enfermer, alors qu'il faut innover." Référence à l’expression "souverainetés partagées" prononcée par Gérard Larcher, notamment devant le Congrès. "C’est un terme qu'il ne faut pas enfermer dans des concepts idéologiques, il faut en avoir une approche pragmatique, défend-il. Est-ce qu'on n'est pas en souveraineté partagée, la France et l'Union européenne, quand on partage la même monnaie ? (…) Je la vois, moi, totalement possible avec la République, dans la République."

Essayons de conceptualiser comment deux rêves qui paraissent antagonistes peuvent être conjugués. Je pense que ce rêve a besoin, quelque part, des valeurs de la République.

Gérard Larcher, le 13 novembre 2024

"Un chemin possible" et des amendements "vitaux"

"En recevant les élus groupe par groupe, j'ai senti qu'il y avait un chemin possible", déclare le président du Sénat. Les deux personnalités relèvent aussi que les parlementaires calédoniens, malgré des opinions opposées, défendent des amendements similaires concernant la loi de finances. Yaël Braun-Pivet y voit "un signe extrêmement favorable. C'est important d'être capables de se retrouver sur des questions vitales pour l'avenir. Nous voulons affirmer que nous les soutenons. Il nous apparaît qu'ils sont vitaux pour que la Nouvelle-Calédonie puisse avancer, survivre, dans les semaines et les mois qui viennent."

"Apporter des aides financières immédiates"

Tous deux se disent convaincus quant au besoin de trouver des solutions rapides. "Nous avons pu prendre conscience de l'ampleur des dégâts, l’ampleur de la détresse et de la nécessité d'apporter des aides financières immédiates, réagit la présidente de l’Assemblée nationale. Pour permettre de tenir, permettre à ces entreprises de se reconstruire, permettre à ces salariés de subvenir à leurs besoins. On a entendu aussi des artisans, des autoentrepreneurs, qui nous disaient que pour eux, aujourd'hui, point d'aide, point de secours".

"C'est ce que nous avons partagé [mardi] au Mont-Dore, en rencontrant celles et ceux qui avaient été empêchés d'exercer leur métier", renchérit Gérard Larcher, qui multiplie les exemples. "Je pense à la situation de ceux qui ont vu leur contrat rompu parce que l'entreprise ne produit plus. Et à la situation du chômage partiel, dont on sait qu'il ne peut durer qu'un moment et que, sans doute, la durée prévue n'est pas compatible avec la réalité d'un temps de reconstruction et de redémarrage."

Il y a la solidarité nationale. Il y a aussi le rôle des assurances, on compte sur elles.

Yaël Braun-Pivet, le 13 novembre 2024

"Besoin" des deux plans

Au moment de reconstruire, deux plans sont ébauchés en Nouvelle-Calédonie : le plan S2R du gouvernement et le plan quinquennal porté par le Congrès. "On a besoin de l'un et de l'autre", estime le président du Sénat. "Ce sera notre rôle (…) d'éclairer nos collègues dans nos deux assemblées, d'éclairer l'exécutif." "Notre mission ne s'arrête pas ce soir, insiste la présidente de l’Assemblée nationale. Nous repartons dans l'Hexagone mais nous continuons à nous occuper de la Nouvelle-Calédonie. Nous continuerons à rencontrer les acteurs politiques dès qu'ils seront à Paris (…) C’est aussi ça que nous sommes venus dire : vous n'êtes pas oubliés." Ou, en d’autres termes : "La Nouvelle-Calédonie compte."

Il y a urgence financière, urgence sociale et urgence à retrouver la confiance.

Gérard Larcher, le 13 novembre 2024

"Une violence folle" et "inacceptable"

Leur séjour intervient six mois après le déclenchement des violences en pleine opposition au dégel du corps électoral. "Le 13 mai, cet avenir commun s'est retrouvé réduit en cendres", formule Yaël Braun-Pivet, en citant "les incendies criminels qui ont détruit des maisons, des outils de production, des voitures. On a rencontré de personnes qui se sont faites car-jacker et qui sont extrêmement traumatisées… Ça a été d'une violence folle."

"On peut chercher les causes, les explications. Mais dans un état de droit, la violence est inacceptable", assène son homologue au palais du Luxembourg. "Retrouver la confiance, c'est aussi assurer la sécurité. C'est une attente, pas simplement du monde économique, mais aussi des citoyens dans leur vie quotidienne. Dans leur liberté d'aller et venir, de vivre tranquillement dans son quartier et de ne pas être dans l'obligation de devoir le quitter au prétexte de je ne sais quels motifs à caractères parfois, il faut dire les choses, ethniques ou raciaux. Ça, ce n'est pas notre conception de la République."

C’était un peu la fin d'un rêve calédonien. Et ce rêve calédonien, j'ai eu le sentiment que les habitants d'ici n'y ont pas renoncé. La réconciliation est possible. 

Yaël Braun-Pivet, le 13 novembre 2024



"Il va falloir retrouver de la confiance. Retrouver le chemin du pardon parce que de la haine s'est exprimée, il faut la traiter, analyse-t-elle. Le chemin est long, il va être difficile à emprunter. Mais on voit qu'il y a des attentes, il y a de l'espérance."


Un entretien à retrouver en intégralité ci-dessus. Il a été réalisé par Natacha Lassauce-Cognard pour NC la 1ère, Elizabeth Nouar pour RRB et Audrey Poedi pour Calédonia.