Oscars 2019 : plus de diversité, mais la polémique reste

"Green Book", Oscar du meilleur film, a été beaucoup décrié comme la dénonciation d'un racisme aseptisé.
Plus de diversité, certes, mais pas moins de polémiques : la cuvée 2019 des Oscars annoncée dimanche a de nouveau fait grincer des dents, à commencer par la récompense de "Green Book", sacré meilleur film malgré de nombreuses critiques, notamment pour sa dénonciation d'un racisme aseptisé. 
 
A l'annonce du couronnement de "Green Book", le célèbre réalisateur noir Spike Lee a ainsi essayé de quitter la salle, fou de rage : celui dont le film "BlacKkKlansman" était aussi en lice pour l'Oscar du meilleur film est finalement resté, mais a tourné le dos à la scène du Dolby Theater le temps que se terminent les discours, selon plusieurs journalistes dans la salle. Interrogé ensuite sur sa réaction, Spike Lee, fan de l'équipe de basket-ball new-yorkaise des Knicks, l'a comparée à celle d'un fan qui "assisterait à une erreur d'arbitrage".

 

Un racisme asceptisé? 

Il faut dire que le choix des quelque 7.900 membres de l'Académie des arts et des sciences du cinéma a suscité une rafale de critiques. "Green Book" repose sur l'histoire vraie du pianiste noir Donald Shirley, parti en tournée dans le Sud ségrégationniste des Etats-Unis avec un gros bras d'origine italienne rempli de préjugés, qui deviendra son ami.

Mais il a été beaucoup décrié comme la dénonciation d'un racisme aseptisé. Ou, selon des membres de la famille de Don Shirley, comme "le point de vue d'un homme blanc sur la vie d'un Noir".
Jim Burke, Charles B. Wessler, Nick Vallelonga, Peter Farrelly, and Brian Currie, ont remporté l'Oscar du meilleur film avec "Green Book
 

Les membres de l’Académie "à 85% blancs"

Qui plus est, Mahershala Ali, qui incarne Don Shirley, a bien été récompensé d'un Oscar, mais uniquement comme "meilleur second rôle masculin", le film étant centré autour du personnage de Viggo Mortensen et Mahershala Ali étant moins présent à l'écran.
Mahershala Ali a remporté l'Oscar du meilleur second rôle pour sa participation à "Green Book".

"Les membres de l'Académie sont à 85% blancs, 70% masculins avec un âge moyen au-dessus de 55 ans. C'est ce qui explique sans doute la victoire de 'Green Book' aux Oscars", a lancé sur Twitter le commentateur de télévision Wajahat Ali.
 

#OscarsSoWhite 

Pourtant, honoré de l'Oscar de la meilleure adaptation - son premier Oscar en compétition - Spike Lee a reconnu que, sous la pression du mouvement "#OscarsSoWhite" ("OscarsTropBlancs"), la cérémonie avait "gagné en diversité".

L'actrice noire américaine Regina King ("Si Beale Street pouvait parler"), le Mexicain Alfonso Cuaron, sacré "meilleur réalisateur" pour "Roma", ou le premier film de l'univers Marvel consacré à un super-héros noir, "Black Panther", ont en effet figuré parmi les vainqueurs de la soirée.  
 

Trump dans le viseur

Reste que la polémique colle aux Oscars, alimentée par une polarisation politique caractéristique de l'ère Trump. Pour la troisième cérémonie depuis l'arrivée à la Maison Blanche du milliardaire républicain, les dénonciations de sa politique ont à nouveau fait irruption sur scène. 

Ainsi l'acteur espagnol Javier Bardem a-t-il fustigé le mur que le président insiste pour ériger le long de la frontière avec le Mexique. "On parle beaucoup de diversité. Des progrès ont été faits, mais les Latino-Américains aux Etats-Unis, les Chicanos (Américains d'origine mexicaine, ndlr) sont vraiment, vraiment très mal représentés", a pour sa part lancé Alfonso Cuaron, reparti avec trois Oscars pour "Roma".
Trois oscars pour Alfonso Cuaron et une charge contre le président américain.

 

La charge de Spike Lee

Et Spike Lee - encore lui - a appelé à se mobiliser contre le président sortant lors de l'élection présidentielle de 2020. "Mobilisons-nous, soyons du bon côté de l'Histoire", a exhorté le réalisateur new-yorkais. "Faites le choix de l'amour contre la haine. Faisons le bon choix!"
Cela lui a valu un tweet vengeur du locataire de la Maison Blanche au lendemain de la cérémonie : "Ce serait bien si Spike Lee pouvait lire ses notes ou, encore mieux, ne pas avoir à utiliser de notes du tout, lorsqu'il traite de raciste votre Président, qui a fait davantage pour les Afro-Américains (...) que presque n'importe quel Président!"