Les Outre-mer, c'est quoi ? Saint-Barthélemy

Vue d’une partie du chef-lieu de Gustavia à Saint-Barthélemy en décembre 2019
Tourisme de luxe, stars, calme et volupté. Ce sont habituellement les images collées à "Saint-Barth". Mais au-delà de cette réalité incontestable et des clichés, la collectivité, qui fut suédoise durant presque un siècle, possède une histoire particulièrement intéressante.
Chef-lieu : Gustavia
Statut : collectivité d’Outre-mer  
Zone : petites Antilles, océan Atlantique
Au sud, Saint Kitts and Nevis et la Guadeloupe
Au nord, Saint-Martin et Anguilla (territoire britannique)
A l’ouest, les Iles Vierges (américaines et britanniques) et Porto Rico
Saint-Barthélemy se trouve à un peu plus de 6500 km de l’Hexagone et à 230 km de la Guadeloupe
Langues : français, anglais, créole
 

Population

Saint-Barthélemy comptait un peu plus de 10.000 habitants en janvier 2017, selon le dernier recensement de l’Insee. La densité moyenne de la population y est forte (466 habitants au km2) par rapport au reste de la France (106 habitants/km2), et des autres îles françaises (243 hab/km2 en Guadeloupe). L’âge moyen de la population est de 38 ans, légèrement inférieur à celui de l’échelle nationale (40,8 ans en 2016) : 15,4% de la population est âgée de moins de 14 ans et 10,1% de plus de 60 ans. Le taux moyen de natalité a sensiblement diminué ces dernières années, passant de 16,5 ‰ dans les années 70 à 10,5 ‰ sur la période 2011-2016, d’après l’Insee.
 
 

Histoire en bref

On sait encore peu de choses sur l’histoire précoloniale de Saint-Barthélemy, si ce n’est qu’elle a été habitée par différentes communautés amérindiennes et caraïbes, en majorité des Arawak et des Tainos. Lors de sa seconde expédition aux Amériques, Christophe Colomb accoste sur l’île en novembre 1493, qu’il baptise d’après le nom de son frère Bartolomé, mais qui était appelée Ouanalao par ses habitants. Progressivement chassés de leurs terres ou massacrés, ces derniers laissent la majeure partie du territoire à des aventuriers de passage ou des corsaires.

En 1648, l’administration française tente une première colonisation de Saint-Barthélemy avec l’envoi d’une cinquantaine d’hommes. Mais ceux-ci se feront tous tuer par des Indiens caraïbes en 1656. L’île demeure alors inoccupée jusqu’en 1659, date à laquelle de nouvelles implantations commencent avec l’arrivée d’une trentaine d’hommes et de femmes originaires de Bretagne et de Normandie pour la plupart. En 1674, le territoire est rattaché à la Couronne et à la colonie de la Guadeloupe. Toutefois, en 1784, Louis XVI l’échange contre l’autorisation d’installer des entrepôts à Göteborg, en Suède. En mars 1785, Saint-Barthélemy devient officiellement possession scandinave (d’où le nom de la commune Gustavia pour rendre hommage au roi Gustave III de Suède) et le restera jusqu’en mars 1878, date de sa rétrocession à la France après un référendum local.

Presque un siècle de présence suédoise ont donné à la ville capitale une physionomie que l’on retrouve encore de nos jours, et assuré une certaine prospérité en instituant notamment un port franc, bénéficiant d’une exonération douanière et fiscale. A l’époque, Saint-Barthélemy se hissait parmi les dix villes les plus peuplées du royaume scandinave ! Durant sa gouvernance de l’île, dont l’économie était en grande partie basée sur l’esclavage, la Suède remplaça le Code noir français par une "ordonnance de police générale" pour légiférer cette pratique, avant d’abolir le travail servile en octobre 1847. Après son retour dans le giron colonial de l’Hexagone, Saint-Barthélemy, sans d’importantes ressources naturelles, vivait surtout de la pêche, de ses salines ainsi que d’élevage et d’agriculture de subsistance. Après la loi de départementalisation de 1946, le territoire devient une commune de la Guadeloupe, jusqu’en juillet 2007 où il prend le statut de Collectivité d’Outre-mer.

Pour en savoir plus sur le passé de Saint-Barthélemy
>>> Des ressources historiques ici

 
Peinture de Gustavia à l'époque où Saint-Barthélemy était une colonie suédoise (artiste anonyme, 1874)
 

Géographie

Saint-Barthélemy a une superficie de 21 km2, et est entourée d’une quinzaine d’îlets. Bordé de 32 km de côtes, le territoire est parsemé de collines d’origine volcanique, dont la plus haute, le morne Vitet, s’élève à 286m. Déjà constituée d’un sol plutôt sec et rocailleux, Saint-Barthélemy a été victime de nombreuses déforestations durant les différentes périodes coloniales pour faire place à de l’élevage caprin. De climat tropical avec de faibles précipitations, sans rivières naturelles, la collectivité a toujours souffert de la rareté d’eau. Jadis, les habitants comptaient essentiellement sur la récupération des eaux de pluie, avant l’introduction des techniques de dessalement de l’eau de mer et l’importation d’eau potable.

Saint-Barth est malgré tout riche en biodiversité. Sa faune terrestre et aquatique est multiple et comprend des tortues, dont marines, des espèces endémiques de serpents, de nombreuses variétés d’oiseaux nicheurs, des salamandres, des iguanes, et bien sûr des pélicans, emblèmes du territoire. Classé en partie réserve naturelle, le petit archipel compte en particulier une cinquantaine de coraux différents, environ 180 sortes de poissons, et quelques mangroves. 
 
Vue aérienne de Saint-Barthélemy
 

Économie

La prospérité économique de Saint-Barthélemy a commencé à la fin des années cinquante avec l’arrivée d’hommes d’affaires richissimes (David Rockefeller et Edmond de Rothschild notamment), suivis d’un cortège de célébrités. S’est développé depuis cette époque un tourisme haut de gamme, générateur de forts revenus. Les secteurs de l’hébergement, de la restauration et du BTP (ce dernier ayant pris de l’ampleur durant la reconstruction post-ouragan Irma) sont dominants. En 2014, le produit intérieur brut (PIB) par habitant de la collectivité était supérieur à celui de la France dans son ensemble (38.994 euros contre 32.404), et largement supérieur à celui de toutes les autres régions d’Outre-mer.

L’emploi est essentiellement concentré dans le domaine tertiaire (69,9% de l’emploi privé en 2018). Les secteurs de l’hébergement et de la restauration sont les premiers pourvoyeurs de travail. Ils constituent 28,5% de l’emploi total, suivi par le BTP (25%). Le commerce et les autres services marchands représentent quant à eux respectivement 20,5% et 19,3% de l’emploi total. En raison de la nature des sols et de la faible pluviométrie, l’agriculture ne représente que 0,1% des activités du territoire !   

Le taux de chômage à Saint-Barthélemy est le plus bas de France. En 2016, il s’établissait à 4,2% de la population active, selon les derniers chiffres officiels. Il a encore baissé après le passage d’Irma du fait des créations d’emplois pour les marchés de BTP, selon l’Institut d’émission des départements d’Outre-mer (IEDOM). L’île fait appel à une importante main d’œuvre extérieure, plus particulièrement dans les secteurs de l’hôtellerie et du bâtiment, piliers de son économie.
 
 

Politique et cadre institutionnel

Saint-Barthélemy est une collectivité d’Outre-mer depuis juillet 2007. Auparavant c’était une commune rattachée à la Guadeloupe. Un préfet délégué, résidant sur l’île voisine de Saint-Martin, y représente l’Etat. Elle est dirigée par un Conseil territorial de 19 membres élus pour cinq ans. Ce dernier élit lui-même un président ainsi qu’un Conseil exécutif composé de vice-présidents et de conseillers chargés d’arrêter les projets de délibération à soumettre au Conseil territorial. Le cadre institutionnel de Saint-Barthélemy est proche du modèle départemental. Certaines décisions sensibles relevant de l’exécutif doivent être prises de façon collégiale par le Conseil exécutif et non par le seul président, par exemple en matière d’urbanisme.

La collectivité compte par ailleurs un Conseil économique, social, culturel et environnemental (CESCE) composé de groupements professionnels, de représentants des sphères syndicales, associatives et culturelles de la société civile, doté de compétences d’initiative et de proposition. Saint-Barth fait partie des pays et territoires d’Outre-mer (PTOM) de l’Union européenne, lui permettant d’avoir une compétence douanière et d’accéder à des financements au titre du Fonds européen de développement (FED). Le territoire est représenté au Parlement par un député (commun avec Saint-Martin) et un sénateur.
 
Le bâtiment de l'actuelle sous-préfecture de Saint-Barthélemy abrita une prison à l'époque suédoise, puis une école communale.
 

Société

Ile calme et paisible, Saint-Barthélemy a subi un choc lors du passage de l’ouragan Irma en septembre 2017. Ce n’était pas le premier. La population a encore en mémoire les ravages causés par l’ouragan Luis en 1995, classé en catégorie 4. Sans compter les cyclones, comme le cyclone tropical Earl en 2010, parmi d’autres. De niveau 5, soit le plus élevé sur l’échelle de référence Saffir-Simpson, Irma s’est abattu sur le territoire avec des vents de plus de 300km/h, et des pointes à 350, n’épargnant pas non plus son voisin de Saint-Martin. Contrairement à cette dernière, Saint-Barth n’a enregistré aucune victime. Cependant, selon les données du programme spatial européen Copernicus, 95% du bâti de l’île a été sévèrement touché, dont 2,5% détruit ou très endommagé. Le coût total des dégradations a été estimé à 823 millions d’euros par les compagnies d’assurance.

Toutefois la collectivité s’est rapidement relevée de la violente parenthèse Irma, dû à ses capacités financières endogènes, sa bonne organisation et sa résilience. A la publication de cet article, en mai 2020, tout est pratiquement revenu à la normale, sauf que l’île doit attendre la fin de la crise Covid-19 pour voir revenir ses stars et autres touristes de luxe. Un "entre-soi" parfois dénoncé ou très sérieusement analysé dans des revues universitaires.

♦ Vidéo : les premières images des dévastations occasionnées par Irma à Saint-Barthélemy
 

Culture et sport

Le patrimoine de Saint-Barthélemy est riche de monuments et de sites historiques. Parmi eux, on retiendra le clocher suédois de Gustavia, la batterie suédoise du Fort Gustav III, l’église catholique, l’église de Lorient dans le bourg éponyme, l’église anglicane, la maison des gouverneurs, le Fort Karl, la sous-préfecture, qui fut une ancienne prison... Autant de témoignages architecturaux liés à l’évolution du territoire à travers les siècles. Gustavia possède aussi quelques musées et de nombreuses galeries d’art. Le célèbre chanteur français Johnny Hallyday (1943-2017) repose au cimetière de Lorient, devenu un lieu de pèlerinage pour ses inconsolables fans. La vie culturelle est dominée par le carnaval du mois de février, mais il existe également de nombreuses manifestations comme la Fête de Gustavia, la Fête de Saint-Barthélemy, celle des quartiers, les festivals de jazz et de musique classique, le Festival du cinéma caraïbe etc.

En sport, ce sont les activités nautiques qui dominent, mais les habitants sont aussi passionnés de rugby (trois fois champions des Antilles-Guyane) et de football. Le territoire organise plusieurs compétitions annuelles comme les réputées Voiles de Saint-Barth, la West Indies Regatta (courses d’embarcations traditionnelles), et la Saint-Barth Cata Cup (catamarans). L’île est également le point d’arrivée de la célèbre course transatlantique Transat AG2R (tous les deux ans).

Vidéo : en 2016, deux équipages guadeloupéens terminaient respectivement à la 10e et 11e place au classement général de la Transat