Rapport du Défenseur des droits 2/2 : "En Guyane, les services de santé sont sous-équipés et inégalement répartis"

Jacques Toubon, Défenseur des droits
Jacques Toubon a rendu public ce 20 novembre un rapport sur les droits de l’enfant. Le Défenseur des droits estime qu’en Guyane, il y a "un cumul de difficultés pour l’accès des enfants à la santé" et qu’il faut "faire de la pédagogie" auprès des politiques dans l'Hexagone. 
Pour 2017, le Défenseur des droits a choisi de consacrer son rapport aux enfants à l'occasion de la journée internationale des droits de l'enfant. Un chapitre entier est consacré aux difficultés de leur accès aux soins à Mayotte et en Guyane. La1ère a consulté ce rapport et interrogé les initiateurs de ce dossier, Jacques Toubon et Geneviève Avenard, Défenseure des enfants. Regardez ci-dessous Jacques Toubon interrogé par Outre-mer 1ère / France Ô :


Un manque de moyens

En Guyane, souligne le rapport annuel "l’un des principaux obstacles à l’accès aux soins des populations est celui du manque de personnel soignant". "L’insécurité et le coût de la vie" peuvent dissuader des professionnels de santé de venir s’installer dans le département.
La carence de médecins pourrait s’accentuer "dans les années à venir suite à une vague de départ en retraite, un tiers des médecins du territoire ayant plus de 60 ans".

Un médecin du dispensaire d'' Oiapoque

Or ce manque de personnel soignant touche particulièrement les enfants dans un département qui connaît "une explosion démographique en raison de la natalité et de l’immigration", selon Jacques Toubon.

Médecine scolaire dépassée

En Guyane, un rapport de la Cour des comptes publié en 2014 indiquait que "seuls 35% des enfants de cinq ans avaient bénéficié pour l’année scolaire 2011/2012, d’un bilan médical complet". Or, déplore le rapport du défenseur des Droits, "ces défaillances ont des conséquences directes sur la santé des enfants. Des troubles visuels, auditifs, dentaires, épileptiques, par exemple, ne sont pas détectés et soignés à temps". Ecoutez Geneviève Avenard, Défenseure des enfants interrogée par France Ô/ Outremer 1ère :


Face aux besoins sanitaires importants des département ultramarins, le Défenseur des Droits recommande au ministre de l’Education nationale que « des bilans de santé prévus à l’école y soient effectivement réalisés

Des services de PMI désorganisés

En Guyane, le fonctionnement des services de PMI (Protection maternelle et infantile) connaît "des difficultés du fait du manque de personnel, de l’inadaptation des locaux et du défaut d’organisation territoriale".

Le défenseur des Droits recommande de développer la présence des équipes de PMI en Guyane.

Répartition inégale des services de santé

En Guyane, les femmes enceintes issues des communes isolées si elles veulent accoucher dans les centres hospitaliers de Saint-Laurent du Maroni ou de Cayenne doivent quitter leur domicile à partir du 8e mois de grossesse. Certains refusent de quitter leur famille et sont donc privées d’un suivi permettant d’éviter d’éventuelles complications.

Cet isolement a des conséquences particulièrement graves en Guyane. "Le taux de mortalité infantile était de 8,8 pour 1000 naissances en 2013 contre 3,3" dans l’hexagone.

L'actuel hôpital de Saint-Laurent du Maroni

Le défenseur des Droits a recommandé lors de sa visite en octobre 2016 que le dispositif de prise en charge des femmes enceintes des communes de l’intérieur soit analysé et que la politique de protection maternelle soit adaptée en conséquence.

Obstacles administratifs et financiers

En Guyane, "une partie de la population peine à bénéficier d’une couverture d’assurance maladie, les caisses primaires ne se déplaçant pas suffisamment dans les communes isolées du territoire". Face à cette inégalité, Jacques Toubon recommande que "des permanences itinérantes soient plus régulièrement organisées sur l’ensemble du territoire".

Maripasoula

Le Défenseur des droits déplore également qu’il reste difficile d’enregistrer la naissance de ses enfants et d’obtenir des documents civils pour les habitants des villages de l’intérieur. Cette difficulté a des conséquences directes sur les enfants en les empêchant d’obtenir la protection maladie et donc des soins.

Le Défenseur des droits demande donc à l’administration de "rétablir les audiences foraines de la chambre détachée du Tribunal de Saint-Laurent du Maroni pour les jugements déclaratifs de naissance".