En 1966, ils étaient 215 enfants de la Réunion au foyer de l’enfance à Guéret dans la Creuse. Parmi eux, Marie-Jeanne Boyer qui a participé ce dimanche à la dernière audition organisée par la commission d’information.
C’était il y a 50 ans. En 1966, à l ‘âge de 9 ans, Marie-Jeanne Boyer et sa sœur ainée de 13 ans étaient envoyés dans la Creuse, sans l’avoir désiré. "C’est écrit dans mon dossier, souligne-t-elle. Je l’ai vu quand j’ai enfin pu me rendre à La Réunion en 2013".
Pour Marie-Jeanne comme pour beaucoup d’autres Réunionnais de la Creuse : "la priorité, c’est d’obtenir des billets d’avion pour La Réunion et un hébergement sur place pour en savoir plus sur sa propre histoire et revoir sa famille".
Marie-Jeanne Boyer a perdu sa mère dans un accident alors qu’elle n’avait que 10 mois. Son père a été assassiné. Marie-Jeanne et sa sœur se sont retrouvées à l’orphelinat à Cilaos où un oncle venait régulièrement leur rendre visite. Il entretiendra par la suite une correspondance avec la fillette.
"Un jour, des religieuses nous ont emmené à Saint-Denis de La Réunion et c’est à partir de là que nous avons été envoyées dans l’hexagone, contre notre volonté". Marie-Jeanne n’a que très peu de souvenirs du voyage. "Je pense qu’ils avaient du nous donner un médicament pour nous endormir".
Aujourd'hui, elle affirme "ce foyer a été un tremplin pour l'enfer" car la vie dans cette famille d’accueil vire rapidement au cauchemar. "Ma grande-sœur a été violée par cet homme de plus de 70 ans. Elle en a été traumatisée. Elle s’est donnée la mort à 48 ans".
Jusqu’alors on pensait qu’ils étaient environ 1 600 enfants à avoir été envoyés dans 64 départements de l’hexagone de 1963 à 1982, sous l'impulsion du député de l'île Michel Debré. La Creuse ayant accueilli le plus gros contingent a donné son nom à ce scandale français. "Ils étaient 215 en 1966 à Guéret", précise Philippe Vitale.
"Des propositions ont été faites à la ministre de l’Outre-mer, Ericka Bareigts, ajoute Gilles Gauvin, historien et expert de la commission d’information, et nous espérons des mesures concrètes pour les Réunionnais de la Creuse dans les semaines à venir", avant la remise du rapport définitif en février 2018.
Audition de la commission à Guéret
Ce dimanche, cette Réunionnaise de la Creuse sillonne Guéret quelques heures avant le début de l’audition de la commission mandatée par le gouvernement pour faire la lumière sur cette histoire. Les cinq experts sont venus à Guéret pour écouter les enfants de la Creuse, connaître leurs attentes.Pour Marie-Jeanne comme pour beaucoup d’autres Réunionnais de la Creuse : "la priorité, c’est d’obtenir des billets d’avion pour La Réunion et un hébergement sur place pour en savoir plus sur sa propre histoire et revoir sa famille".
Des demandes concrètes
La Fédération des enfants déracinés des DROM demande aussi la mise en place de cellules psychologiques, une prise en charge du rapatriement des corps de Réunionnais de la Creuse, l’intégration de cette histoire dans les manuels scolaires et plus largement une réparation financière pour les victimes.
Cilaos, Saint-Denis, Orly puis Guéret
Marie-Jeanne Boyer a perdu sa mère dans un accident alors qu’elle n’avait que 10 mois. Son père a été assassiné. Marie-Jeanne et sa sœur se sont retrouvées à l’orphelinat à Cilaos où un oncle venait régulièrement leur rendre visite. Il entretiendra par la suite une correspondance avec la fillette."Un jour, des religieuses nous ont emmené à Saint-Denis de La Réunion et c’est à partir de là que nous avons été envoyées dans l’hexagone, contre notre volonté". Marie-Jeanne n’a que très peu de souvenirs du voyage. "Je pense qu’ils avaient du nous donner un médicament pour nous endormir".
"Un tremplin pour l'enfer"
Soixante après, en se rendant au foyer créole où elle a vécu quatre mois, elle a bien du mal à se remémorer sa vie sur place. "C’est comme un gouffre, un vide, je ne me rappelle de rien, à part du jour où l’on m’a appelé, moi et ma sœur, pour nous présenter notre famille d’accueil, un couple très âgé, tellement âgé…"Aujourd'hui, elle affirme "ce foyer a été un tremplin pour l'enfer" car la vie dans cette famille d’accueil vire rapidement au cauchemar. "Ma grande-sœur a été violée par cet homme de plus de 70 ans. Elle en a été traumatisée. Elle s’est donnée la mort à 48 ans".
Une souffrance reconnue ?
Marie-Jeanne a décidé il y a onze mois d’adhérer à la Fédération des enfants déracinés des DROM. Elle suit désormais de près les avancées de la commission mise en place au ministère de l’Outre-mer le 14 février 2016 pour en savoir plus sur l’affaire des Réunionnais de la Creuse et faire des propositions pour venir en aide aux victimes.Un scandale français
Les cinq experts présents ce dimanche à Guéret expliquent qu’ils ont épluché les archives. Le sociologue Philippe Vitale, président de la commission rappelle qu’il y a au total 2 150 Réunionnais de la Creuse.Jusqu’alors on pensait qu’ils étaient environ 1 600 enfants à avoir été envoyés dans 64 départements de l’hexagone de 1963 à 1982, sous l'impulsion du député de l'île Michel Debré. La Creuse ayant accueilli le plus gros contingent a donné son nom à ce scandale français. "Ils étaient 215 en 1966 à Guéret", précise Philippe Vitale.
Des mesures concrètes à venir
Toutefois sur ces 2150, "on ne connaît que 300 personnes seulement, grâce aux associations", souligne Philippe Vitale qui appelle tous les Réunionnais de la Creuse à se manifester sur l’adresse spécialement mise en place par la commission (lesenfantsdelacreuse@outre-mer.gouv.fr)."Des propositions ont été faites à la ministre de l’Outre-mer, Ericka Bareigts, ajoute Gilles Gauvin, historien et expert de la commission d’information, et nous espérons des mesures concrètes pour les Réunionnais de la Creuse dans les semaines à venir", avant la remise du rapport définitif en février 2018.