Dans Le Monde, l’ancien garde des Sceaux Robert Badinter estime qu’entre 1941 et 1943, les bagnards ont subi une hécatombe équivalente à celle des camps de concentration en Allemagne. Les autorités guyanaises vichystes craignaient que les bagnards ne s’engagent dans la résistance.
Le bagne reste et restera une page douloureuse de l’histoire de la Guyane. Mais ce que met en lumière Robert Badinter apparaît dans la hiérarchie de l’horreur encore plus grave. Le garde des Sceaux, connu pour avoir mis fin à la peine de mort en France en 1981, a gardé à 89 ans sa capacité d’indignation.
Il se réfère à la définition de l’article 6 du statut du Tribunal de Nuremberg qui définit ce crime comme "l’assassinat, l’extermination, la réduction en esclavage, la déportation, et tout autre acte inhumain commis contre toutes populations civiles avant ou pendant la guerre". "Les responsables de ce crime en Guyane n’ont jamais été poursuivi ni sanctionné pour ces agissement" conclut l’ancien garde des Sceaux.
Hécatombe au bagne
Dans une tribune au Monde (article pour les abonnés), il fait référence aux ouvrages de trois historiens : Michel Pierre, Danielle Donet-Vincent et Jean-Lucien Sanchez. Ces trois auteurs se sont consacrés avec minutie à la compréhension du fonctionnement du bagne en Guyane. Leurs travaux révèlent qu’entre 1941 et 1943, les relégués ont subi une hécatombe de la même ampleur que celle des camps de la mort en Allemagne nazie.Menace de la France libre
En 1942, précise Robert Badinter dans sa Tribune, la moitié des relégués sont morts dans l’année. Sur un effectif total de 1 068 bagnards 513 ont perdu la vie. Les conditions de détention sont à l’origine de ce massacre. Les autorités guyanaises fidèles au régime de Vichy craignaient que les bagnards n’aillent rejoindre les forces de la France libre. Aux Antilles, les dissidents étaient nombreux à rallier le combat du général de Gaulle.Au pain sec
En février 1941, 70 relégués, nous apprend toujours Robert Badinter dans Le Monde répondirent à l’appel du capitaine Claude Chandon, représentant du général de Gaulle. Quelques jours après ces évasions, le gouverneur de Guyane décida de mesures carcérales encore plus sévères et de réduire les rations alimentaires.Des squelettes
Par la suite, la journée de travail passa de 6 à 8 heures par jour dans des conditions climatiques horribles. De 1940 à 1943, l’administration pénitentiaire s’est comportée avec une rare brutalité, causant une mortalité sans précédent au bagne de Guyane. Un fonctionnaire de l’administration témoigne : "les relégués n’étaient plus des hommes, c’étaient des squelettes". Le gouverneur Veber semble avoir été à la manœuvre dans cette sinistre opération qui ne prit fin qu’en mars 1943 quand la Guyane rejoint la France libre.Crime contre l'humanité
En mars 1943, Jean Rapenne, le nouveau gouverneur mit fin à ce régime de terreur et le pénitencier de Saint-Jean du Maroni fut fermé en septembre 1943. Pour Robert Badinter, le doute n’est plus permis, cet épisode méconnu du bagne de Guyane s’apparente à un crime contre l’humanité.Il se réfère à la définition de l’article 6 du statut du Tribunal de Nuremberg qui définit ce crime comme "l’assassinat, l’extermination, la réduction en esclavage, la déportation, et tout autre acte inhumain commis contre toutes populations civiles avant ou pendant la guerre". "Les responsables de ce crime en Guyane n’ont jamais été poursuivi ni sanctionné pour ces agissement" conclut l’ancien garde des Sceaux.