Épuisé, perclus de crampes, mais heureux à en pleurer. C’est l’image de Gaël Monfils à l’issue de son premier tour de Roland-Garros 2023.
En souvenir de ses précédents matches, il faisait son entrée avec les honneurs, puisqu’il affrontait l’Argentin Sebastian Baez (42e mondial) sur le court Philippe-Chatrier lors de la session nocturne de ce mardi 30 mai. Mais il n’était pas prévu qu'il gagne, après des blessures et sept mois d’absence qui l’ont fait descendre à la 394e place au classement ATP.
Au début du premier set, c’est donc presque logiquement que l’Antillais, inconstant, se laisse petit à petit dominer par son adversaire, sans pour autant se laisser écraser. Des inquiétudes planent à un moment à cause de douleurs au poignet, mais il est soigné très rapidement par le kiné. Plus régulier et juste, c’est l’Argentin qui gagne logiquement le premier set 3-6.
Le début de la deuxième manche ressemble peu ou prou au début de la première, avec un Gaël Monfils qui résiste bien à Baez, même s’il semble souffrir davantage physiquement que son adversaire.
Le show Monfils
Mais il se détend au fil du match, lâche ses coups, hausse son niveau de jeu, avec notamment des frappes plus tranchantes. Et ça paye puisqu’il l’emporte 6-3 au bout de 41 minutes de jeu. Pendant cette énorme manche, il en appelle aussi au public qui le lui rend bien puisqu’il scande son nom, et lui offre une ola.
Le troisième set est encore plus fou, car l’Antillais breake d’entrée Sebastian Baez qui commet alors plus de fautes. Dans ce match très disputé, Gaël Monfils fait à plusieurs reprises le show en mettant par exemple des énormes frappes en coup droit et des smashes sautés.
Après un passage à vide où il est mené 4-5, il rehausse son niveau de jeu à un point inattendu jusqu’à renverser le cours du match.
Il finit par remporter la troisième manche 7-5. Désormais en tête, il est salué par les spectateurs qui lui font une standing ovation.
Mais après la débauche d’énergie du troisième set, le joueur de 36 ans donne l’impression de s’effondrer dans la quatrième manche, en laissant les jeux lui échapper les uns après les autres et se retrouve mené rapidement 0-3. Même s’il lâche quelques beaux points, il fait peu d’efforts et marche lentement, comme s’il cherchait à récupérer avant d’attaquer un cinquième set. Il perd logiquement le quatrième 1-6.
Assailli par les crampes
Dès le début de la dernière manche, l’Antillais se fait breaker. Très fatigué, il est largement dominé par l’Argentin qui inscrit quatre jeux d’affilée. Mais alors qu’on l’imaginait lessivé et le match quasiment terminé, Gaël Monfils trouve des ressources incroyables, rattrape son retard et prend même l’avantage 6-5 grâce à des frappes puissantes et précises.
Il expliquera un peu plus tard : "La vérité, à un moment, à 3-0 c’est bizarre, je me suis dit ‘je n’ai quand même pas gagné un match depuis que je suis papa, je vais quand même en gagner un’. Et du coup je me suis relâché, je me suis mis à déconner dans ma tête, à être un peu moins dans le match, à prendre l’énergie du public, à croire en moi."
Un public qui n’hésite pas à chanter la Marseillaise à l’unisson après la remontée fantastique de son chouchou qui, mettant la main derrière l’oreille ou brandissant le poing, veut montrer qu’il ne lâche rien.
Sur les derniers échanges cependant, il laisse transparaître sa souffrance, s’appuie sur la rambarde pour s’étirer les jambes tiraillées par les crampes, boite entre les échanges. Mais dans le même temps, il n’hésite pas à sourire et à tirer la langue vers son camp.
"Malade, exceptionnel"
Au bout de ses forces, Monfils se trouve à égalité 40 A face à l’Argentin qui ne lâche rien. Après une balle de match ratée, l’Antillais s’impose face à Baez pour le grand bonheur du public qui explose de joie et entonne une dernière Marseillaise.
Le joueur, lui, finit par s’allonger la terre battue du Central et craque en laissant lâcher quelques pleurs, avant de se ressaisir.
"Malade, exceptionnel, souffle-t-il pour décrire le match après avoir remercié les spectateurs. Honnêtement, je n’ai pas de mot, juste vous dire merci, c’est fabuleux."
"Poussé par le public, j’ai eu un nouveau souffle, je me suis dit ‘allez on y va, on se bat encore’, explique-t-il quand on lui demande d’où lui est venue cette énergie alors qu’il semblait exténué. Roland-Garros c’est vraiment spécial, c’est magique, il se passe des choses exceptionnelles, je l’ai prouvé, le public l’a prouvé, c’est vraiment exceptionnel."
"C’était un premier tour, conclut-il. Et on va essayer de faire une belle fête pour le 2e tour." Réussira-t-il un nouvel exploit ? Rien n’est moins sûr car il jouera face au Danois Holger Rune, tête de série n°6.