Seize étudiants ultramarins diplômés de la première école nationale de directeurs de cabinet

Déjà insérés dans la vie active, ces étudiants d'Outre-mer comprenant la major de promotion, sont venus assimiler ou consolider leurs acquis de directeur de cabinet. Longtemps considéré comme un métier que l'on apprend sur le tas, cette nouvelle école, en partenariat avec l'université de Lorraine et l'IAE de Metz, est la première de ce genre en France.

Doucement, une petite foule pénètre dans une salle du Sénat. Impressionnés par la symbolique du lieu, les yeux se baladent dans la pièce de réception ornée de lustres. Quelques personnes se prennent en photo devant une statue dorée de Jules César, ou encore devant le pupitre à l’inscription “Ecole nationale des directeurs de cabinet” apposé pour l’occasion. L'école a accueilli sa première promotion lors de cette année scolaire 2021/2022. Elle délivre un diplôme d'État de directeur de cabinet en un an pour 7000€.

Pour la remise de diplômes de la première école nationale des directeurs de cabinet, une cinquantaine de personne s'est rassemblée ce vendredi 22 juillet, en présence de Dominique Faure, secrétaire d'État chargée de la Ruralité. Parmi les 36 diplômés, près de la moitié est originaire des Outre-mer. Plusieurs élus Ultramarins se sont alors déplacés spécialement pour l'occasion. Ainsi dans l'assemblée se trouvait Christian Baptiste, député de la 2ème circonscription de Guadeloupe accueilli par le sénateur Dominique Théophile. Mais également les députés de Guyane Jean-Victor Castor et Davy Rimane.

Une partie des étudiants guyanais de la 1ere promotion de l'école nationale des directeurs de cabinet avec les députés guyanais Jean-Victor Castor et Davy Rimane le vendredi 22 juillet 2022.

Tous les étudiants de cette formation sont déjà insérés dans la vie active. Ils sont parfois même déjà directeur de cabinet. Alors, pourquoi s’inscrire à une formation pour laquelle on exerce déjà le métier ?  Pour Arianne Saliou, la major de promotion réunionnaise, c’est l’occasion de nouer un réseau,  “le réseau, la rencontre. C'est une vraie joie pour moi, venant particulièrement de l’Outre-mer, de se dire qu’il y a des richesses, des pépites qu’il faut valoriser.”

Pour d’autres, la formation permet de donner de la légitimité à son métier et à ses acquis grâce à un diplôme de niveau bac +5.

Un fort besoin Outre-mer

Surpris, le directeur de l’école ne s’attendait pas à ce qu’il y ait autant d’étudiants ultramarins qui postulent pour son école.  “J’ai beaucoup de gens des DOM-TOM parce qu’il y a un gros besoin de formation. Je ne pensais pas qu’il allait avoir autant de monde d’Outre-mer. Donc on s’est adapté. J’ai décidé de faire trois sessions par jour pour éviter qu'ils ne se réveillent au milieu de la nuit pour suivre les cours", explique Bruno Gosselin, directeur fondateur de l'école. 

Effectivement, avec le décalage horaire, les étudiants ultramarins devaient se calquer sur les heures de l’Hexagone pour pouvoir assister aux cours. Kenny Chammougom, ingénieur principal territorial et coprésident de la French Tech Guadeloupe, s'en souvient encore. “On devait se lever à trois, quatre heures du matin pour pouvoir suivre les cours. Avec une collègue guadeloupéenne qui suivait également cette formation, on s’est soutenus. Mais après, ils ont mis les cours en ligne donc c’était pratique”. Une organisation sur le tas que reconnaît Bruno Gosselin qui avait pensé l'école sur un modèle hexagonal. 

Favoriser la présence des femmes

Parmi les étudiants originaires d'Outre-mer, un peu moins de la moitié sont des femmes. Une statistique loin d'être anecdotique pour les concernées qui déplorent le manque de femme sur des postes à responsabilité en politique. Églantine Eliezer-Vanerot, chargée de projet entreprise et actions innovante au sein de la Communauté d'agglomération de Cap excellence en Guadeloupe, est revenue spécialement du Canada afin d'exercer sur son île. Mais rapidement, elle se retrouve en manque d'opportunité. Aujourd'hui diplômée, elle fait partager son message partout où elle passe. " Je vais lancer un appel aux directeurs, directrices pour avoir plus de femmes directrices de cabinet. Parce qu’on a beaucoup de collaboratrices mais pas beaucoup de directrices de cabinet. Aujourd’hui, je n’ai pas de poste de directrice de cabinet en Guadeloupe”.

Sentiment partagé par la major de promotion, Arianne Saliou originaire de La Réunion. “Il y a des richesses, des pépites qu’il faut valoriser, notamment chez les femmes qui ne sont pas suffisamment représentées dans les milieux dits du pouvoir. Et je pense que les femmes de l’Outre-mer ont particulièrement des choses à dire et elles doivent se faire entendre également.”  Directrice de cabinet depuis moins d'un an à la mairie de Saint-Louis, Arianne Saliou s'est donné les moyens de finir cette formation. Maman d'un petit garçon de neuf ans, la trentenaire a rejoint la formation en cours d'année. Elle est aujourd'hui très fière d'être la première major de promotion.

Arianne Salou, major de promotion de la 1ere promotion de l'école nationale des directeurs de cabinet aux côté de la secrétaire d'Etat Dominique Faure et Elisabeth Deschanet, directrice du collegium Lorraine Management Innovation (LMI), le vendredi 22 juillet 2022

Quel est le rôle d'un directeur de cabinet ?

Pour faire simple, un "dir' cab' "est une personne qui va gérer les affaires courantes d'une personnalité politique. Cela peut aller du président de la République à un élu départemental. "C'est un peu la cheville ouvrière de l'élu", résume Dominique Faure. 

“Avant, le directeur de cabinet était la personne de confiance qu’on plaçait à la tête d’un bureau pour gérer les affaires courantes. Mais maintenant ce n’est plus possible. Il faut une personne avec un vrai bagage scolaire. Être la personne de confiance ne suffit plus”, explique Bruno Gosselin, le directeur fondateur de l’école. C’est pourquoi il a fondé l’école en collaboration avec l’université de Lorraine et l’Institut d'Administration des Entreprises (IAE) de Metz. Là-bas, des intervenants originaires des milieux de la communication, du management mais aussi de la direction de cabinet comme Alain Zabulon, ex-directeur de cabinet de François Hollande, lui-même d'origine martiniquaise, ont donné cours dans l'école.