SERIE 4/5 : [Être apprenti ultramarin dans l’Hexagone] : Marie-Cindy Honorine, apprentie esthéticienne réunionnaise à Lyon

Marie-Cindy travaille en tant qu'esthéticienne à Lyon
Déjà diplômée d'esthétique à La Réunion, la jeune femme a dû reprendre ses études en arrivant, sa formation n'étant pas reconnue en métropole. Elle a choisi l'apprentissage pour ne pas perdre contact avec le monde du travail.
Marie-Cindy Honorine est apprentie esthéticienne. Jamais, elle n'avait envisagé de venir travailler dans l’Hexagone. Dans les rues de Lyon, la jeune femme de 27 ans se sent aujourd’hui comme chez elle, distinguant sans peine le Rhône de la Saône, les deux fleuves qui traversent la ville des Lumières.
 
Tout a commencé à La Réunion, à Saint-Leu, la ville qui l'a vu grandir. En lycée aux Avirons, elle s’inscrit en BEP vente. Son diplôme en poche, elle compte bien changer de voie et réaliser son rêve depuis petite : devenir esthéticienne. Mais les aléas de la vie l’obligent à travailler comme secrétaire médicale et caissière, "pour aider les parents". "Je me suis rendue compte que ce n’était pas ce qui me plaisait, mais à l’époque, je n’avais pas le choix", se souvient-elle. La situation s’améliore, et Marie-Cindy se décide à reprendre ses études… d'esthéticienne évidemment. Elle décroche un boulot de maquilleuse à Télé Kréol.
 

Parcours du combattant

Après avoir longtemps hésité, la jeune femme décide finalement de "se lancer à l'aventure" : s'exiler en France. "Il n'y a pas assez d'emploi sur l'île, c'est la crise. Les petites entreprises n'ont pas les moyens d'embaucher. Et j'étais mal payée", justifie-t-elle. Mais trouver un poste à distance n'est pas une mince affaire. Très vite, elle se heurte aux refus des potentiels employeurs. La raison : son diplôme niveau V n'est pas reconnu dans l'Hexagone. Impossible de travailler : il lui faut reprendre ses études.
 
Là encore, c'est un "parcours du combattant". Depuis La Réunion, elle cherche une formation dans toute la France. "Ça n'a pas été facile. Les boîtes cherchent des filles stéréotypées, limite mannequins. Moi, je suis plutôt ronde", lâche Marie-Cindy. Dans un milieu où l'apparence prime, la jeune femme, reconnue travailleuse handicapée et paralysée du bras gauche dans sa jeunesse, galère à trouver. "Je le mettais sur le CV, ça m'a pénalisé", dénonce-t-elle.
 

"Racisme ambiant"

Après un an de quête, elle est finalement acceptée au Centre de formation des apprentis de Lyon, un soulagement. Une bonne nouvelle n'arrivant jamais seule, elle est embauchée en apprentissage à l'Institut ligne et détente. "Il fallait que je travaille. L'alternance permet de payer le loyer et d'être indépendant. Je connaissais déjà le programme, je me serais ennuyée à ne faire qu'étudier", glisse-t-elle. Le temps de réunir ses affaires, la voilà qui s'envole pour la capitale des Gaules.
 
Les premiers pas ne sont pas aisés. "Ici, la discrimination est normale, le racisme ambiant. On s'y habitue, on encaisse, mais au bout d'un moment ça devient lourd", regrette Marie-Cindy, qui ne connaît alors personne sur place. "C'était au début. Rapidement, je me suis fait des amis au foyer des jeunes travailleurs. Maintenant, je suis bien adaptée, j'aime la ville. Ici, tout est bien organisé", se réjouit l'esthéticienne.
 
Marie-Cindy terminera son apprentissage en mai. Pour l'instant, elle compte rester dans l'Hexagone "encore quelques années". Le temps de "mettre des sous de côté" et de continuer à gagner en expérience.