TÉMOIGNAGE. Fred Louisor : "Je ne voulais plus revenir parce que j'avais perdu tous mes parents, le père, la mère, la grand-mère."

Entre deux compositions musicales, Fred revient dans son dernier livre "Ma terre de blues" sur l'évènement qui a chamboulé toute sa vie : le suicide de sa Maman alors qu'il n'a que 9 ans. Il quitte La Martinique en 1974 pour l'appartement de sa grande sœur en région parisienne. Aujourd’hui la soixantaine passée, l'heure du retour au pays a sonné.

"Je ne voulais plus revenir parce que j'avais perdu tous mes parents, le père, la mère, la grand-mère... Je suivais les corbillards à peu près tous les 6 mois, c’était un choc donc je ne voulais pas revenir." Les souvenirs de cette enfance meurtrie par les décès successifs des membres importants de sa famille hantent toujours Fred malgré la musique et l'écriture qui l'aident à panser ses plaies. "La route des mornes" est ce magnifique poème qui montre le plus à quel point il est encore partagé entre l'amour profond qu'il voue à son quartier Sarrault, à sa campagne martiniquaise et cette tristesse qui lui remplit le cœur lorsqu'il se souvient de ces tranches de vie de son enfance. 

C'est en 1984 que Fred retourne en Martinique pour la première fois, 10 ans après son départ, puis ce sera tous les 5 ans, tous les ans et tous les 6 mois car il construit sa vie en banlieue parisienne, "Dans ce froid glacial avec le racisme en toile de fond". Ce livre "Ma terre de blues" s'adresse en premier à ses enfants, à ses petits-enfants afin qu'ils connaissent son histoire avec ses drames et ses souffrances, son amour pour son île et sa vie à la campagne.

"L'essentiel pour moi c'est de revenir là où j'étais, là où l'histoire s'est faite, là où ma mère a rencontré mon père. C'est mon histoire donc il faut que je rentre, que je revienne à la source, là où sont enterrés les parents notamment ma mère." Ce nouveau tournant dans la vie de Fred est prévu pour courant 2024 après toute une vie de dur labeur à Paris. Une retraite bien méritée pour un retour aux sources nécessaire mais un peu dans l'inconnu. Le temps a passé mais les plaies sont toujours là. L'appel des ancêtres et de la terre suffira-t-il à les cicatriser pour toujours ?