Trentenaire et leader du tennis réunionnais, Pauline Payet se sent épanouie en dépit des injustices

Pose de star pour la joueuse réunionnaise de tennis Pauline Payet, désormais trentenaire.
Pauline Payet ne sait plus depuis quand elle est la numéro un réunionnaise. Plus d'une décennie ? Une éternité en tout cas. Pauline a aujourd'hui 30 ans. Le tennis reste l'amour de sa vie. Et elle adore faire briller les couleurs de La Réunion. Tant pis si cela agasse certains dans son cher département.

Pauline Payet ne fait pas de politique mais elle a un agenda de ministre. Elle court. Elle vole. De tournois en cours privés. De cours privés en tournois. Elle adore ça. Le tennis est toute sa vie. Sa grande passion. La Réunionnaise a soufflé ses trente bougies en juillet 2024. Tout cela méritait bien une interview "premier bilan".

Rencontre avec celle qui domine le tennis de son département depuis des lustres.

La Réunionnaise Pauline Payet lors des divers événements des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024.

⇒ Pauline Payet, avez-vous réalisé tous vos rêves d'enfant ?

Pas vraiment. Mon premier rêve était de me retrouver sur le circuit professionnel féminin, de jouer les tournois du Grand Chelem, de vivre du tennis. Cet objectif-là, je ne l'ai pas atteint. Faute de moyens financiers suffisants, j'ai abandonné ce rêve en 2018.

Aujourd'hui, j'ai une triple casquette : je suis toujours joueuse professionnelle mais sur le circuit national, je donne des cours et je crée des contenus sur les réseaux sociaux. Cette vie-là m'équilibre totalement.

⇒ Le plus fou, c'est que cette nouvelle vie ne vous empêche pas de continuer à faire progresser Pauline, la joueuse.

Je pense que le coaching m'apporte une vision plus large du jeu. Plus de maturité également, un certain recul. Même si physiquement ça commence à devenir plus dur, je joue mieux en compétition. Plus libérée. Ça s'est ressenti dans les quelques tournois ITF aux Antilles et dans l'Hexagone auxquels j'ai participé. J'ai pu ainsi remonter à la 813e place au classement WTA.

En 2024, j'ai quand même disputé 84 matchs. C'est beaucoup. Tout en assurant vingt heures de coaching par semaine et la création régulière de contenus numériques.

⇒ Savez-vous depuis quelle année vous êtes la joueuse numéro un de La Réunion ?

Pas vraiment. Je dirais une douzaine d'années ? Il faudrait vérifier précisément. En tout cas, c'est une grande fierté. J'adore représenter mon île et porter ses couleurs à l'international. Ça prouve que nous avons du talent et du potentiel. J'en suis l'exemple au féminin.

La joueuse de tennis réunionnaise Pauline Payet en plein effort.

⇒ Depuis septembre dernier, vous êtes licenciée au club de l'OS Sannois en région parisienne. Pourquoi ce choix ?

Dans un premier temps, c'est lié à la Ligue de tennis de La Réunion. Elle a refusé de demander une invitation à la Fédération afin que je participe aux championnats de France seconde série. Alors que je remplissais tous les critères. Notamment au niveau du classement. Résultat : il n'y a eu aucune représentante réunionnaise à ces championnats de France !

⇒ Comment expliquer cette décision de la Ligue réunionnaise de tennis ?

Je ne l'explique pas. Le Président de la Ligue m'a répondu que comme je n'avais pas participé aux championnats de La Réunion, je ne pouvais pas prétendre à une invitation pour les France seconde série. Tout en m'ayant promis cette fameuse invitation quelques semaines auparavant. Dans ces conditions, j'ai préféré changer de club.

⇒ Vous avez également perdu le soutien du BOTC (Bourbon Olympique Tennis Club).

Ils m'ont tourné le dos car j'avais refusé de venir jouer les championnats par équipes de La Réunion en division élite. Pour ces six semaines de compétition, le président du club me proposait 500 euros bruts ! Durant un mois et demi, cela voulait dire que je devais faire une croix sur mon activité de coaching. Sans compter que je ne pouvais disputer aucun tournoi pendant toute cette période. Comment étais-je censée vivre ?

Pauline Payet, souriante après sa victoire finale dans le tournoi de tennis réunionnais du TCMT.

⇒ Le fait de ne plus être licenciée dans un club de La Réunion a-t-il été suivi de représailles ?

Évidemment. Je me suis inscrite en ligne à l'Open Henry Foucque, le tournoi du BOTC. Trois jours plus tard, j'ai reçu un mail totalement impersonnel du club me disant que mon inscription ne pouvait être validée pour des raisons d'organisation. Je suis refusée alors que je suis numéro un réunionnaise ! Deux ans de suite, j'ai quand même contribué à la victoire du club en championnat par équipes. Ce comportement à mon égard est très blessant.

⇒ Heureusement que d'autres vous ont tendu la main.

C'est vrai. Après mon refus d'inscription à St Denis, j'ai consulté le calendrier et découvert que le Tampon organisait son tournoi à la même période. J'ai contacté le président du TCMT qui m'a tout de suite accueilli avec plaisir. Le TCMT, c'est le club où j'ai commencé. J'avais huit ans et demi. J'ai revu tous ces gens que je n'avais plus côtoyés depuis des années. De beaux instants. Avec en prime, la victoire finale dans le tournoi. La revanche qui fait du bien…

La Réunionnaise Pauline Payet sur le Central de Roland-Garros.

⇒ Le tennis féminin est-il traité comme le tennis masculin ?
Malheureusement non. Reprenons l'exemple du tournoi du BOTC. Lorsque j'avais le droit d'y participer, les quatre meilleurs joueurs et les deux meilleures joueuses étaient invités. Or, seuls les garçons avaient droit à une chambre d'hôtel offerte. Le principe est juste scandaleux.

Idem pour les prix. Le vainqueur homme gagne 1 200 euros. La femme, 800. Alors que nous sommes mieux classés que les garçons !

Toutes ces injustices ne peuvent pas donner envie aux filles de se mettre au tennis. Il y a encore pas mal de boulot pour changer les choses. Surtout que ce problème n'existe pas qu'à La Réunion. Il est général.