Le renouvellement de la licence du glyphosate dans l’Union européenne doit être décidé ce lundi 27 novembre par la commission européenne. Parmi les plus farouches opposants à cet herbicide controversé figure la journaliste Marie-Monique Robin qui se rend début décembre en Guadeloupe.
Marie-Monique Robin vient de signer un livre et un documentaire intitulé Le Roundup face à ses juges aux éditions La découverte/Arte. Cette journaliste d’investigation sera du 3 au 9 décembre en Guadeloupe pour présenter son film dans des lycées agricoles et rencontrer des élus.
Le glyphosate est l’herbicide le plus vendu au monde et en France. Commercialisé sous le nom de Roundup en 1974 par la firme Monsanto, il a vu ses ventes exploser dans les années 90.
La1ere.fr : Pourquoi considérez-vous que le glyphosate est une molécule controversée ?
Marie-Monique Robin : Il faut d’abord savoir qu’une autre compagnie (NDLR que Monsanto) a obtenu une licence pour la commercialisation du glyphosate dès 1964 pour une toute autre propriété. Il s'agit de la compagnie américaine Stauffer Chemical. Le glyphosate est en effet un chélateur de métaux. C’est une substance chimique qui est capable de séquestrer les minéraux qui se trouvent dans son environnement, de les fixer et de les rendre solubles dans l’eau.
Donc le glyphosate a d’abord été utilisé pour détartrer les chaudières et les canalisations d’eau. Dans les sols et les organismes vivants, cela joue le même rôle, cela séquestre les minéraux et entraîne donc des déficiences en minéraux chez les animaux, les plantes, les humains.
Autre fait troublant : Monsanto a obtenu un brevet en 2010 avec le glyphosate comme antibiotique très puissant. Donc comme tout antibiotique, il tue les bactéries. Quand on sait que les populations françaises et américaines sont imprégnées de glyphosate car il est vraiment partout, c’est particulièrement inquiétant.
On sait que c’est un produit cancérigène, un perturbateur endocrinien. La commission européenne a elle-même établi une liste de 378 aliments qui sont susceptibles d’avoir des résidus de glyphosate, donc il y en a effectivement partout. Des études aux Etats-Unis soupçonnent un lien entre le développement de maladies de l’intestin comme la maladie de Crohn, mais aussi l’intestin poreux. Pour moi, le principe de précaution s’impose et je ne comprends pas que l’on tergiverse.
La1ere.fr : Et pourtant, on ne s’achemine pas du tout vers une interdiction du glyphosate, mais au contraire vers un renouvellement de sa licence. La seule question étant pour quelle durée : 3, 5 ou 10 ans ?
Marie-Monique Robin : C’est un vrai paradoxe. On interdit le glyphosate pour toutes les collectivités locales en France. A partir de janvier 2019, les simples citoyens n’auront plus le doit de l'utiliser non plus, mais les agriculteurs, on les laisse contaminer. C’est tout un lobbying qui a abouti à ce que la France revienne sur une décision qu’elle avait annoncée l’année dernière. Ségolène Royal s’était opposée à la ré-homologation de cet herbicide.
Il a fallu que 300 agriculteurs qui sont des usagers de cet herbicide, des grands céréaliers de la Beauce qui d’ailleurs au passage ne sont pas ceux qui utilisent les produits -ce sont des ouvriers agricoles qui s’en chargent- montent aux Champs Elysées pour que finalement on décide de leur laisser trois années supplémentaires.
La1ère.fr : Pourquoi Nicolas Hulot que vous connaissez bien n’est pas plus ferme dans ce dossier ?
Marie-Monique Robin : Je pense qu’il doit composer avec des intérêts divergents. Moi j’espérais qu’il maintiendrait la position de Ségolène Royal pour dire les choses clairement.
Il faut absolument interdire cette molécule, j’en suis persuadée, car ce n’est pas seulement un problème d’agriculture, mais plus largement de santé publique. Il faut avoir le courage de lancer une vraie politique agricole et d’encourager tous ceux qui sont prêts à faire le pas, à changer de modèle. Il y en a beaucoup qui sont prêts. La profession d'agriculteur est celle qui donne lieu au plus fort taux de suicides. Donc il y a un énorme malaise dans le monde agricole.
Le glyphosate est l’herbicide le plus vendu au monde et en France. Commercialisé sous le nom de Roundup en 1974 par la firme Monsanto, il a vu ses ventes exploser dans les années 90.
Cancérogène probable
En mars 2015, le CIRC (le Centre international de recherche sur le cancer) a classé le glyphosate comme un cancérogène probable. Certaines études européennes ont estimé qu’il n’y avait pas de lien.Interdit dans les espaces publics
Aujourd’hui en France, le glyphosate est interdit dans les espaces ouverts au public et à partir du 1er janvier 2019, il sera interdit à la vente au détail dans les jardineries. En revanche, les agriculteurs continuent à l’utiliser en grande quantité, dans l'hexagone et Outre-mer.Renouvellement de licence
L’Union européenne s’apprête à renouveler la licence de ce produit. Nicolas Hulot, le ministre de la Transition écologique plaide pour un renouvellement de trois ans, mais pas au-delà. Marie-Monique Robin, elle, souhaite la fin pure et simple de cet herbicide, elle s’en explique à La1ère.La1ere.fr : Pourquoi considérez-vous que le glyphosate est une molécule controversée ?
Marie-Monique Robin : Il faut d’abord savoir qu’une autre compagnie (NDLR que Monsanto) a obtenu une licence pour la commercialisation du glyphosate dès 1964 pour une toute autre propriété. Il s'agit de la compagnie américaine Stauffer Chemical. Le glyphosate est en effet un chélateur de métaux. C’est une substance chimique qui est capable de séquestrer les minéraux qui se trouvent dans son environnement, de les fixer et de les rendre solubles dans l’eau.
Donc le glyphosate a d’abord été utilisé pour détartrer les chaudières et les canalisations d’eau. Dans les sols et les organismes vivants, cela joue le même rôle, cela séquestre les minéraux et entraîne donc des déficiences en minéraux chez les animaux, les plantes, les humains.
Autre fait troublant : Monsanto a obtenu un brevet en 2010 avec le glyphosate comme antibiotique très puissant. Donc comme tout antibiotique, il tue les bactéries. Quand on sait que les populations françaises et américaines sont imprégnées de glyphosate car il est vraiment partout, c’est particulièrement inquiétant.
On sait que c’est un produit cancérigène, un perturbateur endocrinien. La commission européenne a elle-même établi une liste de 378 aliments qui sont susceptibles d’avoir des résidus de glyphosate, donc il y en a effectivement partout. Des études aux Etats-Unis soupçonnent un lien entre le développement de maladies de l’intestin comme la maladie de Crohn, mais aussi l’intestin poreux. Pour moi, le principe de précaution s’impose et je ne comprends pas que l’on tergiverse.
La1ere.fr : Et pourtant, on ne s’achemine pas du tout vers une interdiction du glyphosate, mais au contraire vers un renouvellement de sa licence. La seule question étant pour quelle durée : 3, 5 ou 10 ans ?
Marie-Monique Robin : C’est un vrai paradoxe. On interdit le glyphosate pour toutes les collectivités locales en France. A partir de janvier 2019, les simples citoyens n’auront plus le doit de l'utiliser non plus, mais les agriculteurs, on les laisse contaminer. C’est tout un lobbying qui a abouti à ce que la France revienne sur une décision qu’elle avait annoncée l’année dernière. Ségolène Royal s’était opposée à la ré-homologation de cet herbicide.
Il a fallu que 300 agriculteurs qui sont des usagers de cet herbicide, des grands céréaliers de la Beauce qui d’ailleurs au passage ne sont pas ceux qui utilisent les produits -ce sont des ouvriers agricoles qui s’en chargent- montent aux Champs Elysées pour que finalement on décide de leur laisser trois années supplémentaires.
La1ère.fr : Pourquoi Nicolas Hulot que vous connaissez bien n’est pas plus ferme dans ce dossier ?
Marie-Monique Robin : Je pense qu’il doit composer avec des intérêts divergents. Moi j’espérais qu’il maintiendrait la position de Ségolène Royal pour dire les choses clairement.
Il faut absolument interdire cette molécule, j’en suis persuadée, car ce n’est pas seulement un problème d’agriculture, mais plus largement de santé publique. Il faut avoir le courage de lancer une vraie politique agricole et d’encourager tous ceux qui sont prêts à faire le pas, à changer de modèle. Il y en a beaucoup qui sont prêts. La profession d'agriculteur est celle qui donne lieu au plus fort taux de suicides. Donc il y a un énorme malaise dans le monde agricole.