Un archipel à bout de souffle, une économie à genoux... Trois mois après le début des émeutes, état des lieux en Nouvelle-Calédonie

Barrage érigé dans le quartier de Magenta à Nouméa
Depuis le début des émeutes, le 13 mai dernier l'ordre public n'a jamais été rétabli en Nouvelle-Calédonie. Le transfert et l'incarcération dans l'Hexagone de sept des responsables de la Cellule de coordination des actions de terrain ont provoqué un nouvel embrasement. On dénombre dix morts par balle depuis le début des émeutes. Sur le plan économique, le Caillou est en quasi-faillite.

13 mai 2024 - 13 août 2024. Cela fera bientôt trois mois que la Nouvelle-Calédonie a sombré dans le chaos. Le 13 de chaque mois, la Cellule de coordination des actions de terrain veut commémorer la date du 13 mai, date du départ de la révolte kanak. Une date anniversaire, comme un symbole de la mobilisation "pacifique".

En attendant, la situation économique, sociale et politique est dans l'impasse. Dans quel état se trouve la Nouvelle-Calédonie aujourd'hui ? On fait le point.

  • Une économie à genoux

On dénombre pas moins de 700 entreprises sinistrées, plus du tiers du capital productif a disparu, 30.000 personnes au chômage sur les 68.000 salariés du territoire... Le coût des destructions est estimé à 2,2 milliards d’euros, hors pertes d’exploitation des entreprises.

2,2 milliards d'euros de pertes.

À l’impasse économique s’ajoute la crise structurelle de l’industrie du nickel. Arrêt du tourisme, deuxième activité de l’archipel qui génère 5 000 emplois. Impasse financière avec des pertes de recettes fiscales et douanières évaluées à 380 millions d’euros. Le gouvernement local se trouvera en cessation de paiements fin août quand il aura consommé l’intégralité des aides de l’État, soit 260 millions d’euros dont 100 millions d’euros de prêts.

  • Une collectivité en quasi-faillite

Le gouvernement local va être dans l’incapacité de payer les fonctionnaires, les prestations sociales et les allocations chômage. La collectivité se trouve dans une impasse sociale avec la paupérisation de la population et les ruptures d’approvisionnement, mais aussi politique puisqu’il n’existe plus d’interlocuteur à Paris depuis la démission de Gabriel Attal. La mission de dialogue installée par Emmanuel Macron, le 24 mai dernier, est mort-née.

  • Des vagues de départs sans précédent

Sur 270.000 habitants entre 2014 et 2019, la Nouvelle-Calédonie a connu 2.000 départs définitifs pour des raisons économiques et politiques liées aux différents scrutins d’autodétermination. Selon la Chambre de Commerce et d'Industrie de Nouvelle-Calédonie, gestionnaire de l’aéroport international de la Tontouta, le nombre de départs est supérieur de plus 6.000 personnes à celui des arrivées depuis le début de l’année.

  • Désinscriptions scolaires et départs de soignants

Le nombre de radiations d’élèves scolarisés dans les écoles primaires de la province sud, pour une inscription à l’étranger et surtout dans l’Hexagone, a nettement augmenté pendant les émeutes. Le centre hospitalier de Nouméa, le plus grand de l’archipel, a perdu 15 % de ses médecins depuis décembre 2023.

15% médecins en moins depuis le début de l'année.

Les personnels soignants en provenance de l'Hexagone qui souhaitaient s'installer en Nouvelle-Calédonie, se désistent à tour de bras.

  • Un dialogue au point mort

Emmanuel Macron veut recevoir, en septembre, une délégation de Calédoniens d'un "nouveau rang politique" pour aborder les enjeux politiques de sortie de crise. Le chef de l'État a aussi évoqué le possible report des élections provinciales, qui doivent normalement se tenir d'ici le 14 décembre.

Un report mais pas un retrait définitif. C'est ce que réclament tous les partis indépendantistes et la CCAT avant toute reprise du dialogue. Quant à la réforme institutionnelle, les quatre parlementaires de Nouvelle-Calédonie sont unanimes pour dire que cela se fera dans un second temps.

En attendant, le couvre-feu en vigueur en Nouvelle-Calédonie, a été prolongé jusqu'au 12 août.