Un film jugé non approprié pour des élèves en deuxième année d'école primaire et qui porterait un message haineux, voilà l'argument qui a conduit un parent d'élève de l'école North Shore, à Saint-Pétersbourg, en Floride à porter plainte. Une démarche intervenue après la diffusion du film d'Euzhan Palcy, Ruby Bridges. Selon ce parent d'élève, le long-métrage sur une fillette noire de six ans qui intègre une école primaire entièrement blanche, enseigne aux enfants que "les blancs détestent les noirs".
L'école à directement réagit, le film réalisé par la Martiniquaise est en cours d'examen par le comité scolaire de l'État et a été temporairement interdit de diffusion.
Euzhan Palcy a réagi sur les réseaux sociaux. La réalisatrice oscarisée pense que "les gens doivent cesser d'insulter l'intelligence des enfants". "Ils ont un cerveau", écrit-elle sur Twitter. La Martiniquaise doit rencontrer ce lundi 3 avril les responsables de l'école pour discuter de l'avenir du film.
La scénariste du film, Toni Ann Johnson, a également réagi sur l'antenne du média américain CNN. "Les parents qui ne veulent pas que leurs enfants apprennent cette histoire dans les écoles publiques devraient avoir le droit de se retirer", a-t-elle déclaré. "Mais ils ne devraient pas avoir le droit d'empêcher les enseignants d'enseigner l'histoire de Ruby Bridges à d'autres enfants qui reçoivent une éducation dans une école publique."
Insultes raciales
Le 2 mars dernier, Ruby Bridges a été montré à environ 60 élèves en deuxième année d'école primaire, dans le cadre d'une leçon sur le Black History Month (Mois de l'histoire des Noirs aux États-Unis). Ce film s'inspire de l'histoire vraie de la militante des droits civiques Ruby Bridges, première enfant afro-américaine à intégrer une école exclusivement constituée d'enfants blancs en 1960, époque où la ségrégation scolaire prend officiellement fin aux États-Unis. Réalisé en 1998, le film Disney a remporté neuf prix dont un Christopher Award en 1999 et une Gold Apple du National Educational Media Network.
Deux semaines avant la projection, des formulaires d'autorisation ont été envoyés aux parents, avec un lien vers la bande-annonce du film. Seuls deux parents d'élèves ont refusé de signer, dont celle qui a porté plainte le 6 mars dernier, après avoir regardé les 50 premières minutes du long-métrage d'une heure et demie.
Selon les responsables de l'école et les documents que CNN s'est procuré, la mère qui a porté plainte s'oppose à l'utilisation d'insultes raciales dans le film d'Euzhan Palcy, aux représentations d'un enfant plaçant une corde autour du cou d'une poupée et à des personnages menaçant l'héroïne de pendaison. Enfin, elle estime que le film de la Martiniquaise serait plus adapté à un cours d'histoire américaine de huitième année, selon CNN.
À cela, Toni Ann Johnson a répondu que la deuxième année "n'est pas trop jeune". "C'est à cet âge, les enfants reconnaissent les différences raciales. Si les enfants sont assez vieux pour être appelés par le mot N et apprennent ce que cela signifie, alors je pense que les élèves de deuxième année âgés de 7 et 8 ans peuvent et doivent commencer à en apprendre davantage sur l'histoire du racisme dans ce pays."
Un parent a également souhaité le retrait total du biopic de la liste des films approuvés par l'école de Floride. Le film est toujours disponible dans la bibliothèque du district et accessible pour les autres écoles.
Il y a un an, le gouverneur de Floride Ron DeSantis a signé une loi intitulée Stop Woke, qui limite considérablement les enseignements inclusifs sur "la race". Depuis, les parents d'élèves peuvent poursuivre les éducateurs qui enseignent la Critical race theory [Théorie critique de la race, NDLR] à leurs enfants à l'école.