Le cours de la vanille flambe, la demande mondiale aussi. Un chercheur néerlandais pense avoir trouvé la solution en maîtrisant la culture de la vanille hollandaise dans des serres de haute technologie.
Alain Jeannin•
De fines lianes vertes accueillent les visiteurs en blouse blanche de laboratoire. Il s'agit de ne pas risquer de transmettre un virus aux plantations de vanille. « Il y a un marché, nous n’attendons que des investisseurs, la vanille est la seule orchidée dont le fruit est comestible et nous savons depuis longtemps produire des orchidées », confie Filip Van Noort, botaniste de l’unité d’Agronomie de l’Université de Wageningen, classée première mondiale de sa catégorie. Le chercheur est parvenu à maîtriser le processus de production de la vanille dans une grande serre expérimentale, à une heure de route du campus, à Bleiswijk, au nord de Rotterdam. Si tout se déroule comme prévu, les champs de tulipes néerlandais côtoieront bientôt d’immenses serres de vanille. L’épice porte un label d’origine celui des Pays-Bas ou Nederland. Elle s’appelle «Nedervanilla».
Vanille d'Ouganda produite en Hollande
Contrôle de la température, du taux d’humidité, de la lumière, mais aussi de la disposition de l’orchidée productrice de vanille originaire d’Ouganda… Les Pays-Bas ont appris à maîtriser la culture de cette épice dans des serres de haute technologie. Comme l’impose la réglementation européenne, la vanille hollandaise n’est pas transgénique, elle bénéficie aussi de l’appellation « commerce équitable », un concept valorisant pour ses premiers clients, des pâtissiers hollandais, allemands et italiens. La croissance de la « Nedervanilla » dure deux années minimum. L’universitaire effectue une pollinisation à la main, qui donnera d’épaisses gousses vertes deux mois plus tard. Pour obtenir une épice riche en arôme, la gousse réclame des soins longs et attentifs. Filip Van Noort a choisi un laboratoire climatique capable de contrôler la température et l’humidité. La gousse est échaudée quelques minutes à 63° puis elle transpire plusieurs jours dans un air humide et chaud. Les gousses suintent, sous une lumière orangée, jusqu’à leur maturation d’une belle couleur brun foncé. Le parfum sucré de la vanille embaume le petit laboratoire. Dehors, il pleut, le ciel est gris, c’est celui du plat pays de Hollande, une terre de polders et de serres.
La vanille est le premier arôme utilisé dans le monde. Pourtant, sa gousse est rare et la demande mondiale trois fois supérieure à la production. La plupart des produits aromatisés utilisent de la vanille de synthèse, et cette tendance s'amplifie. À Madagascar, le premier pays producteur, la vanille est une matière première spéculative. La qualité en pâtit.
Les petites productions françaises sont dominées par les excellentes vanilles de La Réunion et de la Polynésie. Mais on produit aussi de la vanille, rare et précieuse, à Mayotte, aux Antilles et en Nouvelle-Calédonie.
L’extrait de vanille, se retrouve dans les pâtisseries, les biscuits fins, les desserts, le sucre, la liqueur, mais aussi les cosmétiques, grâce à ses vertus anti oxydantes. « La vanille que l’on développe aux Pays-Bas est sans insecticide et bio » promet Filip Van Noort. « Grâce à la production sous serre, on connaît à l'avance la quantité et la qualité du produit. C’est ce qu’apprécie les industriels de l’agroalimentaire ou les pâtissiers.» On y ajoutera aussi les investisseurs financiers et les négociants…