Un nouveau décret d'application de la loi Morin d’indemnisation des victimes des essais nucléaires vient d'être publié au journal officiel. Les victimes des essais nucléaires de Polynésie vont-elles enfin être indemnisées ?
Que va changer ce nouveau décret ?
Le décret apporte un changement de taille, salué par les associations de victimes des essais. Désormais, le CIVEN (Comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires) passe sous la tutelle du ministère de la Santé. "C’est une bonne nouvelle, souligne Jean-Luc Sans de l’AVEN (Association des victimes des essais nucléaires), car avant le CIVEN dépendait du ministère de la Défense et on ne peut pas être juge et partie". Ecoutez le témoignage de Jean-Luc Sans, joint par La1ere.frJean-Luc Sans, président de l'AVEN
La notion de risque négligeable figure-t-elle toujours dans ce décret ?
Cette notion figure toujours dans le décret à l’article 13 et c’est bien là le problème. "C’est à cause de cette notion de risque négligeable que la plupart des dossiers d’indemnisations a été rejeté, précise Bruno Barillot, de l’association de victimes Moruroa e Tatou. C’est d’autant plus incompréhensible que les tribunaux administratifs ont contesté la plupart des rejets de dossiers d’indemnisation par le ministre de la Défense en argant que ce dernier n’apportait pas la preuve de ce risque négligeable ». Ecoutez les explications de Bruno Barillot de l’association Moruroa e Tatou.Bruno Barillot de l'association Moruroa e tatou
Le nouveau décret apporte-t-il des améliorations au statut de demandeur ?
Dans l’article 11, il est prévu que le demandeur puisse venir défendre lui-même son dossier devant le comité. C’est une nouveauté, mais selon Bruno Barillot de Moruroa e Tatou "cette mesure positive restera purement symbolique pour la plupart des demandeurs, notamment Polynésiens ou Algériens, puisque le décret prévoit que les frais de déplacement seront à la charge du demandeur".Que vont devenir les quelque 700 dossiers rejetés par le CIVEN ?
Au 1er avril 2014, le CIVEN indique sur son site avoir examiné 772 dossiers sur les 895 reçus. 14 indemnisations ont été accordées dont 9 pour des personnes appartenant à la population polynésienne. En clair, le nombre d’indemnisations est ridiculement bas. "Et le pire, c’est que l’on ne sait rien, s’inquiète Jean-Luc Sans de l’AVEN. C’est le grand flou. On ne sait pas si l’on va repartir de zéro ou pas. En tout cas, le nouveau décret ne dit rien en ce sens". Ecoutez Jean-Luc Sans interrogé par La1ere.fr.Jean-Luc Sans, président de l'AVEN
La liste des maladies radio-induites, susceptibles de donner droit à indemnisation change-t-elle dans le décret ?
Cette liste ne change pas et pour Bruno Barillot de Moruroa e Tatou c’est encore un motif de déception. Il ne comprend toujours pas pourquoi le Cancer du corps thyroïde donne droit à indemnisation seulement "pour une exposition pendant la période de croissance", donc avant 15 ans. "Pourquoi cette restriction ? C’est incompréhensible, s’enflamme Bruno Barillot, alors que des adultes, anciens militaires, avaient été indemnisés pour un cancer de la thyroïde par le tribunal des pensions militaires".Comment réagissent les associations à ce nouveau décret ?
Brunot Barillot de Moruroa e Tatou a l’impression d’un énorme gâchis et de beaucoup d’énergie perdue pour rien. "La loi Morin était mal ficelée et je ne sais pas s’il y aura de grands changements avec ce nouveau décret, confie-t-il. Maintenant c’est à la ministre de la Santé de provoquer la prochaine réunion du comité consultatif de suivi. J’espère que ce sera fait au plus tôt". "Pour les gens qui attendent, c’est terrible, conclue Jean-Luc Sans. Sur notre page facebook, les avis de décès se succèdent. La manière dont sont traitées les victimes des essais est inadmissible".