Aimé Césaire a raconté sa vie, ses études, sa vie politique locale et nationale, à Marijosé Alie pendant près de trente ans d'échanges. L'autrice martiniquaise veut "partager avec le plus grand nombre, l'humain tel qu'elle l'a rencontré : un homme d'une extrême générosité, d'une grande bonté, en empathie avec les autres." La journaliste a tenté d’aller au plus près de la pensée de celui qui a défendu toute sa vie le concept de négritude, l'universalité et les identités multiples. Elle a déchiffré les pauses et les silences derrière les discours, les expressions de son visage ou celles de son corps et a tenté de faire parler l’homme.
L'auteure Marijosé Alie
Martiniquaise, elle est née au Diamant. Après son bac, Marijosé quitte son île et entame des études de journalisme à Paris. En même temps, elle écrit et compose plusieurs titres pour un groupe de musiciens qui se produit dans le métro. Diplôme en poche, elle travaille pour l'ORTF dès 1974. Durant sa carrière dans l'audiovisuel public, Marijosé Alie a suivi l'activité littéraire et politique d'Aimé Césaire entre 1983 et 2007 soit une multitude d'occasions d'interviews, d'entretiens et d'échanges plus ou moins formels au hasard des circonstances.
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Réalisation : Jean-Luc Benzimra
Graphisme et Animation : Joël Cimarron
Copyright : France Télévisions 2021
Lecture d'à la 1ère Page : extrait d'Entretiens avec Aimé Césaire
Aimé Césaire vient vers nous avec cet air si particulier qu’il a de vouloir s’échapper par une porte dérobée quand il aperçoit un micro ou une caméra.
Costume sombre, élégance sans ostentation de communiant bien sage.
Vous êtes nerveux ?
Ben, il y a de quoi !
Je lui souris et fais l’idiote :
-Ah oui, pourquoi ?
La main en entonnoir autour de la bouche, il s’approche de mon oreille
-De vous à moi, c’est emmerdant comme tout ! –L’œil qui se marre comme d’une bonne blague. – Vous n’allez pas répéter ça à la radio !
J’éclate de rire.
-Trop tard, c’est enregistré !
-Non ! –Il se tourne vers M. Albicy. – Vous vous rendez compte : elle m’a piégé.
Il sourit, mais je sais qu’il ne rêve que d’une chose : que je disparaisse avec caméra et micro de son champ visuel.
Il m’aime bien, il aime tant de monde mais il déteste la télé et la radio.