A Vincennes, des lamantins choyés pour repeupler la Guadeloupe

Husar, l'un des trois lamantins mâles du Parc zoologique de Paris.
A Vincennes, le bassin aux lamantins attire les foules. Cette espèce, disparue des côtes des Antilles françaises, compte trois membres protégés par les équipes du zoo. En juin, Husar, le dernier arrivant, a débarqué d’Italie. Le projet : repeupler la Guadeloupe de cette faune éteinte.
On l’appelle Dugong, vache de mer ou encore lamantin. Le nouveau, lui, se prénomme Husar. Agée de 13 ans, cette petite bête de 400 kilos bat de ses imposantes nageoires pour venir flirter avec les visiteurs du zoo près de la vitre de l’aquarium avant de repartir déguster ses 70kg de salade quotidiens. Jamais très loin de lui, ses congénères Tinus et Herbert. Les trois mâles partagent l’espace et suscitent la curiosité des visiteurs, notamment des enfants fascinés par le spectacle. Tous pénètrent la gigantesque serre du parc pour s’approcher du trio. Mais outre l’esprit récréatif, c’est la réintroduction de l’espèce en Guadeloupe qui est en cause.   

Une espèce éteinte en Guadeloupe

Si l’on trouve des lamantins près de Paris, ce n’est pas le cas sur l’île des Caraïbes. L’empreinte humaine a éliminé cet animal des eaux guadeloupéennes. Selon Alexis Lécu, directeur scientifique et chef vétérinaire du parc, les navigations commerciales, de plaisance et les changements climatiques sont « en compétition directe avec les animaux qui ont besoin de calme (…) La pollution fait disparaître le tapis végétal sous-marin » de ces animaux qui ont « besoin de calme, de constance dans l’approvisionnement de nourriture ».

Alexis Lécu, directeur scientifique et chef vétérinaire du Parc zoologique de Paris.

Un programme européen de sauvegarde

C’est pour ces raisons qu’a été lancé l’EEP (Plan d’élevage européen). Ce programme « gère les lamantins en captivité en Europe. Il y a environ 35 animaux en captivité dans le monde qui viennent tous au départ du milieu naturel ». Si Husar, Tinus et Herbet sont pour le moment parqués, « l’idée, ce n’est pas uniquement d’avoir des lamantins. La finalité c’est d’aller remettre ces animaux dans le milieu naturel ».

Actuellement, en Guadeloupe, aucun parc n’a été ouvert. Et pour cause, la réintroduction est un processus long et complexe. En effet, plusieurs étapes précèdent la remise en milieu naturel. Il s’agit d’installer les lamantins dans des lieux  « extrêmement fermés » où ils sont facilement observables et de s’assurer que l’environnement des côtes soit protégé avant de les y amener.  « Puis, on ouvre de plus en plus, dans des territoires de plus en plus grands et perméables avec la mer ». Pour le vétérinaire, cela doit s’accompagner de « vitesses limitées pour les bateaux, de warnings, de sensibilisation des pêcheurs, etc ».

Husar le lamantin au milieu de soigneurs au Parc zoologique de Paris.

Bientôt la reproduction ?

L’acheminement des lamantins au Zoo de Vincennes se fait aussi par phases. Pour l’heure, aucune femelle dans l’enclos aquatique. Vincennes sert aujourd’hui essentiellement de plateforme d’interactivité avec la Guadeloupe. Les échanges avec les personnels du Parc national de Guadeloupe (PNG) sont fréquents. Alexis Lécu et son équipe s’occupent de recevoir des membres du PNG « qui sont venus se former pour se familiariser avec l’alimentation, l’observation, etc. C’est vraiment un échange technique pour que les gens là-bas soient prêts à recevoir et à s’occuper des animaux ». Alexis Lécu envisage une nouvelle venue féminine dans les années à venir. « On y va petit à petit, on observe. Chaque chose en son temps, on viendra à l’étape reproduction ». Les petits issus de cette reproduction seront « de très bons candidats » pour repeupler la Guadeloupe.