Violences faites aux femmes : à Paris, la Guyanaise Julienne Morisseau met en lumière un combat déjà centenaire

Julienne Morisseau organisait mercredi 4 décembre à Paris un colloque consacré aux violences sexistes et sexuelles. Présidente du club "Zonta Paris Port Royal Concorde", la militante guyanaise œuvre à sortir de l’ombre les actions de ses bénévoles en faveur des femmes. 
Au premier étage d’un hôtel particulier du 8ème arrondissement de Paris, ce mercredi soir, se mêlent des femmes, des hommes, de tous âges, d’Europe, d’Afrique, des Caraïbes... pour un combat universel. Environ 80 personnes sont venues assister au colloque organisé par Julienne Morisseau : "violences faites aux femmes, une pandémie à traiter d’urgence".
 

100 ans de discrétion

Derrière cet événement, l'association Zonta International. Ce club service, engagé auprès des femmes du monde entier, fête cette année ses 100 ans. Présidente depuis 2017 d’une des 1200 sections de l'organisation, Julienne Morisseau œuvre à mettre en lumière le combat de l'association, jusqu'ici très dicrète.

"Comme chacune et chacun, nous rêvons d'un monde où toutes les jeunes femmes pourraient s'épanouir sans violences, sans discriminations, sans peur du lendemain, sans peur d'être inquiétées", explique au pupitre la militante née en Guyane de parents haïtiens. Un combat vieux de plusieurs décennies mené par le club parisien qui apporte son aide aux femmes sans domicile fixe. Aujourd'hui, les actions s'étendent aussi aux femmes et jeunes femmes victimes de violences physiques et sexuelles. 
 

Collecter des fonds, trouver de l'aide

L'événement intervient dans le cadre de la quinzaine onusienne "Orange day", une campagne de communication sur les violences faites aux femmes (25 novembre - 10 décembre). Cette année en France, elle prend la forme d'une mobilisation générale pour faire inscrire le féminicide dans la loi. L’Orange Day a été lancé en 1991 par des activistes d'ONU Femmes, agence des Nations Unies qui compte une émanation française. Objectif : éveiller la conscience citoyenne face au fléau.
 

Ça peut être votre sœur, ça peut être votre cousine, ça peut être votre voisine de pallier. Et trop souvent, ces femmes ne prennent pas la parole, n'osent pas se confier par peur des jugements.
-- Julienne Morisseau, présidente du club Zonta Paris Port Royal Concorde


Communiquer sur les actions mais aussi attirer de nouveaux bénévoles et collecter des fonds, les objectifs de Julienne Morisseau sont nombreux. Pour atteindre son but, elle s'est entourée de plusieurs personnalités engagées contre les violences faites aux femmes : Yvonne Kouloufoua, "zontienne" venue de Côte d'Ivoire, Marie Cervetti pour l'association Fit ou encore Chantal Clem pour les Figures de Femmes Totem des Outre-mer. 
Yvonne Kouloufoua, avocate et gouverneur du District 18 du Zonta et Nicolas Fontaine de la section parisienne de l'Union des Français de l'Etranger.
 

Des chiffres implacables

Ce 4 décembre, on dénombe 139 femmes tuées par un (ex-)conjoint depuis le 1er janvier 2019. "80% (d'entre elles) avaient déjà déposé au moins une plainte", rappelle Marie Cervetti qui gère le seul et unique centre d'hébergement en France pour les jeunes femmes victimes de violences sexuelles

"On a décidé d'ouvrir ce centre pour les protéger le plus vite possible." 60 lits sont ainsi dédiés à des jeunes femmes de 18 à 25 ans sans enfants sur tout le territoire, alors que "93 000 viols sont commis en France chaque année", rappelle la directrice.
 

Au 21ème siècle, en France, on a 60 lits pour toutes les jeunes femmes victimes de violences sexuelles qui sont obligées de partir de chez elles. C'est absolument insensé!
-- Marie Cervetti, directrice du centre d'hébergement

 

Sororité

"On a encore un travail monumental" à faire, conclut Marie Cervetti, tout en soulignant "l'énergie" qui nait un peu partout pour combattre cette situation, avant de céder la parole à Chantal Clem.
Chantal Clem (à gauche) s'entretient avec Julienne Morisseau.

La Martiniquaise, marquée par un voyage en Haïti où elle a découvert les "restavèk", les enfants démunis et violentés, choisit d'insister sur l'absence de frontières : "un fait de violence est un fait de violence, qu'il soit fait à Abidjan, qu'il soit fait à Fort-de-France, qu'il soit fait en Nouvelle-Calédonie!" La militante des Figures des Femmes Totem des Outre-mer rêve "qu'il n'y ait plus de distinction ni au niveau de notre race, notre religion, notre couleur, de l'origine..."

Nous sommes dans une pandémie qui touche le monde, une guerre mondiale.
-- Chantal Clem, fondatrice de Figures de Femmes Totem des Outre-mer


Ce mercredi soir, toutes les oratrices s'accordent à dire que le combat se gagnera par la solidarité. Julienne Morisseau invite les femmes et les hommes intéressé(e)s à rejoindre son club pour faire avancer la cause.