Nouméa: les violences inquiètent à l'approche du référendum d'autodétermination

Les violences près de Nouméa inquiètent à l'approche du référendum d'autodétermination
La persistance des violences depuis fin octobre sur le territoire de la tribu de Saint-Louis en banlieue de Nouméa fait planer selon les responsables locaux le risque d'un retour des tensions en Nouvelle-Calédonie, à l'approche d'un référendum sur l'indépendance prévu en 2018.
"A quelques encâblures de la sortie de l'accord de Nouméa, les événements de Saint-Louis sont d'une gravité totale, puisqu'ils peuvent remettre en cause le processus de paix dans lequel on est engagé depuis des années", estime

Philippe Michel, président de la province Sud (centre droit). De son côté, l'Union Calédonienne (UC, indépendantiste) a estimé fin janvier dans un communiqué que ces "graves exactions (...) nuisent à la paix que nous voulons tous" et vont à "l'encontre de notre projet de société qui prône le bien vivre-ensemble".


un foyer de violences s'est installé sur la route qui borde Saint Louis

Depuis que le 29 octobre un gendarme a tué William Decoiré, évadé de prison de 23 ans qui fonçait sur un barrage au volant d'une camionnette, un foyer de violences s'est installé sur la route qui borde Saint Louis, tribu kanak de 1.400 habitants de la commune du Mont-Doré. Des jeunes, pour la plupart connus des services de police, cherchent vengeance.
Les violences près de Nouméa inquiètent à l'approche du référendum d'autodétermination
Surnommé "le couloir de la mort" par les habitants, ce tronçon de route est devenu le théâtre de multiples exactions: agressions d'automobilistes, tirs contre les voitures et les gendarmes, entraves à la circulation, jets de pierre. Exaspérés et apeurés, les résidents réunis en association ont manifesté le 3 février devant le haut-commissariat pour réclamer l'interpellation "des criminels" et la confiscation des armes, qui circulent en nombre à Saint-Louis.

Lors des derniers incidents fin janvier, trois gendarmes ont été blessés - seize en tout depuis le début de la crise -, un automobiliste a été touché à la tête par une pierre et un autre a été visé par des tirs en plein pare-brise. Face à la gravité des faits, l'Etat a menacé le 30 janvier de lancer une opération d'envergure "avec des risques de pertes" humaines, avant de laisser une nouvelle chance au dialogue pour que "les responsables des tirs sortent ou soient sortis de la tribu". Des pourparlers avec les chefs coutumiers sont en cours.
 

Risque d'embrasement 

"Il y a toujours un risque que la Calédonie s'embrase, mieux vaut prendre encore le temps", indique-t-on dans l'entourage du haut-commissaire Thierry Latste. Sur le terrain, un important dispositif de gendarmerie avec des véhicules blindés est mobilisé "pour intervenir à tout moment si nécessaire", a indiqué mardi Thierry Lataste, après une semaine d'interdiction à la circulation sur l'axe routier menacé.
 
Depuis les accords de Matignon (1988) puis celui de Nouméa (1998), l'archipel a retrouvé la paix mais les tensions entre communautés  pourraient rejaillir à l'occasion d'une crise telle que celle de Saint-Louis. L'approche du référendum d'autodétermination, au plus tard en novembre 2018, la marginalisation d'une partie de la jeunesse kanak qui n'a pas profité du rééquilibrage dans l'accès à l'emploi, et le repli de l'économie créent de surcroît un climat instable.

"L'incapacité de l'Etat à agir est criminelle. Il y a trois types à Saint-Louis qui tirent à l'aveugle, l'Etat doit les traiter comme des terroristes et intervenir de manière ciblée", juge Sonia Backès, chef du groupe Les Républicains au Congrès. "On attend qu'un automobiliste soit tué! Des gens nous disent qu'ils sont prêts à aller en découdre à Saint-Louis, qu'eux aussi ils ont des flingues. Palabrer indéfiniment, c'est ça le risque d'embrasement", a-t-elle encore mis en garde.