Portraits de ces Antillais qui ont choisi de devenir musulmans

Imrane et Gary, membres de l’association musulmane antillaise
La1ere.fr consacre toute cette semaine un dossier aux Antillais de l'Hexagone qui ont choisi de se convertir à l'islam. Un phénomène qui semble en plein essor. Premier volet de notre enquête: rencontre avec trois membres actifs de l'Association musulmane antillaise , basée en Ile-de-France.
Ils s'appellent Omar, Imran et Gary. Tous trois ont entre 29 et 31 ans, tous sont d'origine antillaise. Et tous trois sont musulmans.
Omar, 31 ans, s'est converti il y a 8 ans. Le jeune homme qui travaille dans la sécurité a eu l'idée en janvier 2013, avec d'autres Antillais musulmans, de créer une association pour les originaires des Antilles qui choisissent de se convertir à l'islam. "Nous sommes de plus en plus nombreux, et pourtant, les Antillais qui se convertissent à l'islam ont l'impression d'être les seuls dans ce cas. Il m'a semblé logique de nous rassembler, et de nous structurer comme le font  les musulmans de toutes origines", explique-t-il. Cette association, l'AMA (Association Musulmane Antillaise) réunit une centaine de membres. 
 

Soutien et entraide entre convertis

Son association, basée à Garges-les-Gonesse dans le Val-d'Oise est forte aujourd'hui d'une centaine de membres. Elle œuvre entre autres, avec les musulmans des Antilles afin de créer des mosquées et des carrés musulmans dans les cimetières de Guadeloupe et Martinique. Réseau de soutien et d'entraide, elle permet également d'accueillir les nouveaux convertis en les orientant, en leur conseillant des lectures ou encore les accompagnant dans l'apprentissage de l'arabe. "Nous demandons à ceux qui le peuvent une cotisation mensuelle de dix euros. Cela nous permet ensuite d'organiser des événements, des conférences et des repas  pour nous connaître et nous faire connaître".

Pourquoi cette conversion? 

Les Antillais qui se convertissent à l'islam ne sont pas rares, pourtant, la démarche pourrait étonner de la part de personnes issues de sociétés très christianisées.  "J'ai toujours cru en Dieu, se souvient  Omar. J'ai reçu une éducation religieuse, catholique, j'allais à la messe… Mais à un moment donné, je ne me suis pas reconnu dans le christianisme. Je me suis posé des questions existentielles, sur le sens de la vie, de la mort, et c'est à partir de là que j'ai commencé à m'intéresser à l'islam".

Cheminements identiques

Gary et Imran, eux aussi,  présentent leur parcours comme une continuité. L'éducation catholique, les questionnements,  puis ensuite les rencontres et les discussions avec  des Musulmans , les comparaisons entre les enseignements de la Bible et du Coran…. "J'ai été surpris de voir qu'il y avait autant de points communs", souligne Gary. Etudiant infirmier en dernière année, il assure n'avoir jamais eu de difficultés à expliquer sa conversion à son entourage. "Ma mère est devenue bouddhiste, elle m'a plutôt encouragé, confie-t-il. Mes proches et mes amis n'ont pas été surpris non plus, ils connaissaient mon intérêt pour la spiritualité". Imran, confie lui quelques difficultés au début, mais assure qu'au fil des discussions les réticences ont disparu.
 

"Je me soucie plus de mon identité que de ma carte d'identité"

La stigmatisation de l'islam par de nombreux médias laisse néanmoins des traces. Omar, qui porte la barbe, reconnaît parfois ressentir des regards agressifs. "C'est normal: aujourd'hui, à chaque fois que j'allume ma télévision et qu'on parle d'islam, on assimile notre religion au terrorisme ou à de l'extremisme. Bien sûr que cela existe, mais pourquoi focaliser dessus? Pourquoi est ce qu'on refuse de parler de l'islam en bien?", déplore-t-il, ajoutant que "ses convictions sont attaquées au quotidien".

Ils se sentent avant tout musulman

Avec Gary et Imran  ils se sentent avant tout "musulman", puis "noir" et enfin "Français". "Nous sommes français sur le papier, mais en vérité, en tant qu'Antillais déjà, on nous fait sentir que nous ne sommes pas des Français comme les autres", remarque Imrane. Pas de haine de la France pour autant "C'est pas très grave, c'est pas pour autant qu'on ne va pas respecter la France. Je me soucie plus de mon identité que de ma carte d'identité", ajoute Gary.
 

 "Je savais ce que cela impliquait"

 Reste la question de concilier religion musulmane et traditions antillaises. "J'ai étudié l'islam et me suis questionné pendant trois ans avant de me convertir", précise Omar. "J'avais des appréhensions je savais ce que cela impliquait. Les 5  prières chaque jour, le jeûne,  pas d'alcool, une bonne hygiène de vie… C'est pas facile au début. Mais quand je vois ce que cela m'apporte, cela ne me coûte plus". Tous trois expliquent qu’il ne fêtent pas Noël, bien que leurs parents se réunissent à cette occasion. "Je partage le repas avec mes parents, mon frère et ma sœur comme pour un jour ordinaire afin de ne pas rompre mes liens de parenté. Mais Noël n'a aucune importance particulière pour moi, ce n’est pas l’une des nos fêtes ". .  Les cadeaux sont offerts plutôt pour les fêtes de l'Aïd, "Ce jour là, si je dois préparer un plat traditionnel,  j'aurai plutôt tendance à préparer un colombo qu'un couscous", reconnaît Gary dans un sourire.


Demain, mardi, suite de notre dossier sur les Antillais qui ont choisi de devenir musulmans.