« La France est en désarroi » déclare Christiane Taubira au quotidien britannique The Independent

Christiane Taubira photographiée dans le quotidien britannique The Independent
La ministre de la Justice Christiane Taubira s’est confiée à l’envoyé spécial du grand journal britannique The Independent dans une interview publiée dimanche. Extraits. 
« Christiane Taubira ne fait pas des discours politiques. Elle fait des sermons politiques », entame sans ambages le quotidien, plutôt marqué à gauche au Royaume Uni.
 
Le journaliste, John Lichfield, qui a notamment suivi la ministre de la Justice dans un meeting à Bordeaux, observe qu’à son contact le public « est en quelques minutes captivé et rempli d’énergie », à une époque où la gauche « a plutôt des raisons d’être déprimée ». « Il est difficile d’imaginer une autre personnalité en France - ou en Europe - qui pourrait parler de manière si passionnée de la moralité en politique ou des difficultés de notre temps » ajoute-t-il.
 
Après avoir rappelé son parcours et « les attaques racistes vicieuses » dont elle a été victime l’an dernier, ainsi que sa « dignité » face à cette situation, The Independent écrit : « L’insistance de madame Taubira sur l’importance de la rectitude morale en politique rappelle un peu les Suédois. Ses appels à l’effort individuel et à un sursaut politico-moral rappelle les Américains ».
 

Personne n’a le droit de dire qu’une autre personne n’appartient pas à la communauté de la nation. C’est comme un retour aux attitudes qui justifiaient l’esclavage" (Christiane Taubira dans The Independent)









 
Place Vendôme, où l’envoyé spécial du journal précise que le « job » du ministre de la Justice est « l’un des plus importants et difficiles du gouvernement français », Christiane Taubira déclare que « la France traverse une période de désarroi, qui ne peut s’expliquer seulement par un chômage massif et une croissance économique faible ».

« Je blâme l’absence de perspective et de direction », souligne-t-elle. « Il y a comme un vide de la parole publique, dans ce que disent à la fois les personnalités politiques et les médias. La confiance dans le futur s’est brisée. D’où ce désarroi exploité par des mouvements politiques extrémistes qui cherchent à diviser ».
 
A propos des attaques racistes dirigées contre elle, la ministre affirme qu’elle « a été la cible mais pas la victime ». « Ces attaques interviennent parce que [certains] croient qu’une personne comme moi, qui ne leur ressemble pas, n’a pas le droit d’être ministre de la Justice », dit-elle. « Que cela me fasse mal ou pas n’est pas le problème. Ce qui compte c’est combien ils font mal aux petites filles qui me ressemblent. Ce qui compte c’est combien ils font mal à quelqu’un qui a réussi à l’école mais qui n’obtient pas de réponse à ses demandes d’emploi ».
 
« Personne n’a le droit de dire qu’une autre personne n’appartient pas à la communauté de la nation. C’est comme un retour aux attitudes qui justifiaient l’esclavage ». « Nous devons rebâtir le sens de notre histoire et notre capacité à vivre ensemble », conclut Christiane Taubira.
 
Lisez l'intégralité de l'interview de Christiane Taubira (en anglais) sur le site de The Independent