Chico, écrivain-poète-jardinier au milieu d'un océan de béton

Hier, avant de reprendre l'avion pour Rio, je me suis baladé dans Brasilia. Une ville unique. Une capitale construite en 4 ans au milieu de nulle part. Avec des centaines de buildings futuristes et d'immenses avenues, taillées au cordeau. Mais au milieu de cet océan de béton, j'ai rencontré Chico. 
 Vraie originalité : Brasilia n'a pas de nom de rue. Voici par exemple l'adresse de mon hôtel : SHN quadra 2 pour "secteur hôtelier nord, bloc 2". Et tout est comme cela. Hyper organisé. Secteur hôtelier, secteur bancaire, secteur de santé, secteur des ambassades, secteur des ministères... Oscar Niemeyer, l'architecte de Brasilia, devait être quelqu'un de carré.

Chico, son vélo, son parasol

En traversant l'ASA Norte quadra 313 - l'aile nord, bloc 313 - j'ai rencontré Chico. C'est son vélo qui m'a interpellé. Une vraie maison ambulante avec un garde-manger accroché au guidon, un bureau pliable sur le porte-bagages, une caisse à outils sur le cadre... Le tout protégé par un parasol !

Ecrivain, poète et jardinier

Chico vit ici, dans un petit jardin au pied de logements administratifs. C'est là qu'il a élu domicile il y a 20 ans. Cet écrivain-poète-jardinier, originaire du sud du pays a fait le choix de vivre sans toit : "Je ne parvenais plus à me fondre dans ce moule. Être obligé d'avoir un travail, devoir rendre des comptes, devoir vivre en famille, devoir se justifier en permanence... Je n'en pouvais plus. J'avais besoin de vivre seul".

"La société ne m'accepte pas" 

Pour gagner un peu d'argent, Chico s'occupe des jardins dans le quartier. C'est sa "thérapie". Le jardinage l'aide à affronter les difficultés de la vie. Le week-end, Chico écrit des poèmes. L'homme pourtant assez frêle a l'air d'avoir une grande force intérieure. Mais seul, aujourd'hui, Chico a bien du mal à trouver sa place dans la plus grande démocratie d'Amérique latine. " La vie, ici, n'est pas la même pour tous. La société ne m'accepte pas, elle ne veut pas que je sois sans domicile. Il faudrait que je parte d'ici, que je trouve un travail... Ça ressemble plus à une dictature qu'à une démocratie."

"Cette Coupe n'est pas pour les Brésiliens"

Tranquillité, travail... Chico a trouvé à Brasilia un équilibre. Mais cette Coupe du monde l'inquiète. " Cette Coupe n'est pas pour les Brésiliens. Les policiers nous ont prévenus que durant le mondial, ils n'accepteraient aucun SDF dans le centre de Brasilia. Pourtant, ici comme dans toutes les villes brésiliennes, vous avez des gens qui vivent dehors. Mais ils ne veulent pas de cela ici. Ils veulent une ville propre, bien maquillée, belle pour que le touriste qui arrive ici pense être en Europe ou aux États-Unis."

La nuit, c'est le moment que redoute Chico. La peur des vols, des assassinats... Chico a des raisons d'être inquiet. Au Brésil, les SDF sont  particulièrement menacés. Près de 200 meurtres de sans-abris y ont été répertoriés ces 15 derniers mois.