Huit chercheurs donnent ce lundi le coup d'envoi du programme de recherche scientifique "La planète revisitée" en Guyane. Zoom sur le module marin de l’expédition avec les explications de Laure Corbari, chercheuse spécialiste des crustacés au Muséum national d’Histoire naturelle.
La1ere.fr : Quelles sont les grandes lignes de cette expédition en Guyane ?
Laure Corbari : Une première partie de l’expédition commence le 21 juillet. Jusqu’au 11 août, on va faire de la pêche pour collecter des organismes qui se trouvent entre 80 et 1.000 mètres de profondeur. Puis à partir de septembre il y aura une deuxième partie, avec une équipe de plongeurs qui explorera les fonds qui se trouvent entre 0 et 70 mètres.
Quel est le but de ce travail ?
L’enjeu est de dresser un inventaire de la biodiversité, c’est-à-dire une liste des espèces présentes sur la zone, pour pouvoir mettre le doigt sur des espèces rares, sans doute nouvelles.
Est-ce-une opération inédite pour la Guyane ?
C’est vrai que très peu de travaux de biologistes ont été menés dans cette zone, il y a donc plein de choses à découvrir au large. L’objectif est vraiment de recueillir à bord le maximum d’espèces possibles. Les spécimens intégreront ensuite les collections du muséum.
Quelles zones allez-vous explorer ?
Les opérations auront lieu sur le plateau continental, autour des îles du Grand Connetable et autour des îles du Salut.
Y-a-t’il des spécificités auxquelles vous vous attendez ?
Je suis assez habituée à partir en expédition dans le Pacifique, avec des missions en Nouvelle-Calédonie, aux Philippines, en Papouasie-Nouvelle-Guinée,… Pour ce qui est de l’Atlantique, je sais que la faune sera moins diversifiée. Mais je pense que par l’expérience de notre équipe et notre capacité à échantillonner, on va pouvoir trouver des choses très intéressantes.
Comment allez-vous travailler au quotidien ?
Comment allez-vous travailler au quotidien ?
Nous commençons par repérer des zones, dont nous identifions la nature du fond grâce à un écho-sondeur de pêche. Si le fond est rocheux, on utilise une drague très lourde qui permet de gratter le fond. Si le fond est meuble, on met à l’eau un chalut à perche de quatre mètres de large.
A la remontée, on tamise tout les spécimens puis on les sépare par taille et par famille. Ensuite on les photographie et on congèle éventuellement les spécimens vivants. Ils sont ensuite plongés dans l’alcool pour les conserver et stockés dans des fûts métalliques. Le tout est renvoyé à Paris par conteneurs à la fin de l’expédition. L’identification des espèces se fait après l’expédition, mais quand on sort du bateau on a déjà une idée de la diversité du terrain.
Combien de spécimens pensez-vous collecter ?
C’est difficile à dire mais certainement plus de 10.000.
Votre travail cause-t-il un préjudice à la nature ?
Il y a un effet destructeur, oui, mais il est minime comparé à l’activité d’une plateforme pétrolière par exemple. Et on s’est fixé des règles que l’on respecte, comme ne jamais retourner pêcher deux fois sur les mêmes endroits, même si la collecte a été insuffisante.
Pour connaître quelles sont les zones les plus importantes, celles que l’on veut protéger, il faut faire de la recherche. L’impact de notre travail n’est pas gratuit : le but est de faire avancer l’état général des connaissances.