2016, une année difficile pour le secteur de la banane en Equateur, un concurrent des Antilles

Employés de Mateo, une plantation de bananes à Chobo en Equateur
Faiblesse du marché russe, retard d'un accord commercial avec l'Union européenne, impact du phénomène climatique El Niño: en Equateur, le secteur de la banane, premier produit d'exportation après le pétrole, se prépare à une année 2016 difficile.

Près de Guayaquil, coeur de la production bananière dans le sud-ouest de l’Equateur, une piste de terre traverse de vastes bananeraies. Elle mène à l'Hacienda Mateo, qui en ce mois de janvier récolte exclusivement pour le géant américain Dole, une des trois plus grandes compagnies fruitières du monde.
 

Un secteur fragile

La cueillette, le transport jusqu'aux entrepôts et l'emballage s'enchaînent à un rythme frénétique sur cette exploitation de 290 hectares, qui fait partie des quelques 7.000 petits et moyens producteurs de bananes, produit phare des exportations équatoriennes. Ce secteur n'est cependant pas invulnérable aux aléas de l'économie locale, dollarisée depuis l'an 2000, et qui souffre de la hausse du billet vert, ajoutée à la chute vertigineuse des cours du brut, source jusque-là de la moitié des entrées de devises.

Des employés de Mateo, une plantation de bananes en Equateur au travail


La Russie, premier client de la banane équatorienne

La Russie, qui achète 95% de sa consommation de bananes à l'Equateur, est confrontée à une rapide dévaluation du rouble qui limite ses capacités d'achat. Elle reste toutefois le premier client de la banane équatorienne, à hauteur de 23% de la production. "La Russie tarde à payer, mais a toujours payé jusqu'à présent. C'est un grand acheteur. Il faut le garder", a expliqué à l'AFP Eduardo Ledesma, directeur exécutif de l'Association des exportateurs de banane d'Equateur (AEBE). L'an dernier jusqu'en septembre, les Russes ont acheté 2,6% de moins que sur la même période en 2014, selon l'AEBE.
           

Bataille européenne

Sur un autre front, Quito lutte pour garder sa place sur le marché de l'Union européenne (UE), son premier client, mais aussi champ de bataille avec les producteurs européens (l'Espagne avec les Canaries, le Portugal avec Madère et la France avec les Antilles), ainsi qu'avec les pays ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique) et le reste de l'Amérique latine. L'Equateur a longtemps dominé ce marché. Mais le retard de la signature d'un accord commercial se solde à présent par des droits de douane supérieurs à ceux imposés à la Colombie et aux pays d'Amérique centrale.
 
Des employés de Mateo, une plantation de bananes en Equateur
  

Retard dans l'accord avec l'Union européenne       

Après une pause de quatre ans dans les négociations, l'Equateur a signé en juillet 2014 l'accord commercial déjà souscrit avec l'UE par la Colombie et le Pérou. Mais il n'entrera pas en vigueur avant la fin 2016. "D'autres secteurs équatoriens d'exportation, comme la crevette ou les fleurs, sont affectés par la hausse du dollar et l'affaiblissement de la Russie. Mais la banane souffre en plus du retard pris avec l'UE faute d'être dans le système douanier préférentiel", souligne l'économiste Alberto Acosta-Burneo.
           

Le stress d'El Niño

La situation pourrait également se dégrader sur le front météorologique à cause d'El Niño, susceptible de causer de fortes pluies. Au pire, cela pourrait affecter entre 20 et 30% de la production, selon l'AEBE. Parcourant les plantations de l'Hacienda Mateo, son administrateur, Freddy Barros, se montre inquiet et craint que ce phénomène climatique, qui réchauffe les eaux de l'océan Pacifique, causant violentes précipitations et sécheresses, provoque "une baisse de production considérable"."L'excès de pluie, explique-t-il, affecte la banane, le sol se sature d'eau et les bananiers souffrent alors d'un stress qui cause des dégâts".