L’élite de l’athlétisme français se retrouve dans l’emblématique Stade Yves-du-Manoir à Colombes, en banlieue parisienne, du 26 au 28 juin 1963. Aux championnats de France, la sprinteuse polyvalente Marlène Canguio s’aligne sur les séries du 80 mètres haies. Sortie avec succès des qualifications, la Guadeloupéenne se retrouve en finale, près de Denise Guénard, la championne en titre et détentrice du record national sur cette distance.
La première victoire de Marlène Canguio
Marlène a pour principal objectif de surpasser Denise Guénard, qui était son modèle d'athlète à une certaine époque et qui est également capitaine de l'Équipe de France. Denise est une adversaire redoutable, ayant à son actif vingt titres de championne de France individuelle, ainsi qu'une quarantaine de sélections en équipe nationale. Elle détient également de nombreux records de France, notamment sur 80 mètres haies.
Entre Marlène et Denise, les confrontations sont mémorables.
L’athlète antillaise entame parfaitement la course de 12 mètres précédant la première haie. Elle prend l’avantage, franchit la huitième et dernière haie, puis accélère sur les 12 derniers mètres. La Guadeloupéenne passe la première la ligne d’arrivée. Le 28 juillet, le jeune espoir de l'équipe de France ravit la médaille d’or à la championne en titre Denise Guénard, avec un temps de 11 secondes. La saison suivante, elle conserve la première place et améliore son chronomètre d’un dixième.
Marlène Canguio, la première Ultramarine sélectionnée dans l'histoire des Jeux Olympiques
Forte de ce second exploit, la licenciée du Racing Athlétic-club cheminot de Nantes gagne son ticket pour les Jeux Olympiques de Tokyo. La Guadeloupéenne devient la première Ultramarine à participer aux JO.
Marlène est sténodactylographe dans un établissement bancaire. Tous les soirs après sa journée de travail, elle se prépare avec ses entraîneurs Roger Boué et Jacqueline Kaoult. Elle prend un mois de congé pour se rendre au Japon. C'est la première fois que la compétition est retransmise en direct à la télévision. L'épreuve du 80 mètres haies aux Jeux Olympiques de 1964 se déroule les 18 et 19 octobre au Stade Olympique National. Marlène finit 6è aux 80 mètres haies de la deuxième série. La finale est remportée par l'Allemande Karin Balzer. Au relais 4 x 100 mètres, son équipe est finaliste et termine huitième. Tokyo sera sa seule et unique olympiade. En 1968, sélectionnée pour les JO de Mexico, elle se blesse deux mois avant la cérémonie d'ouverture des Jeux.
Première Guadeloupéenne en Equipe de France d’athlétisme
En 1961, elle fait son entrée chez les bleues et devient la première Guadeloupéenne en Equipe de France. À 20 ans, elle participe aux Championnats d'Europe d'athlétisme à Belgrade. C’est sa première compétition internationale. Lorsqu’elle foule le stade de Belgrade, à sa grande surprise, la seule noire participante à la compétition, est également ovationnée par le public yougoslave. En demi-finale, elle égale le record de France du 80 mètres haies.
Marlène bat ce record de France le 3 juillet 1965, au stade Charléty à Paris, lors des Critériums Nationaux, une épreuve disputée en amont des Championnats de France durant quelques années. Elles sont deux athlètes à réaliser cette performance. Sa rivale et amie Denise Guénard est également créditée de 10 secondes 8. C'est le dernier record de France homologué sur 80 mètres haies avant le passage au 100 mètres haies.
Polyvalente talentueuse, elle est sacrée Championne de France de la longueur en 1967. Deux ans plus tard, elle s’impose comme la première détentrice du record de France du 100 mètres haies, en 13 secondes 6. Elle cumule trente et une sélections en Equipe de France. Atteinte d'une maladie orpheline, elle quitte la piste et tire sa révérence avec un riche palmarès de quatre titres en individuel, sept en relais, et deux records de France.
À 81 ans, Marlène Canguio, agricultrice en Guadeloupe, revient sur ses performances, ses records et sa participation aux Jeux de Tokyo en 1964.