"Anchoukaj" : comment retrouver un aïeul esclave dans les colonies ?

Avec ses ateliers "Anchoukaj", le CM98 aide les descendants d'esclaves antillais à retracer l'histoire de leur famille.
Le 23 mai est l’occasion pour le Comité Marche 98 (CM98) de faire découvrir ses ateliers de généalogie. Depuis 2012, avec "Anchoukaj", affiliation en français, l’association aide les Antillais à retracer l'histoire de leurs noms et retrouver leurs aïeux esclaves dans les colonies. 
 
A l’occasion de la journée nationale de commémoration des victimes de l’esclavage, le CM98 proposait, à Saint-Denis, ses ateliers de généalogie (AGHFA, atelier de généalogie et d’histoire des familles antillaises). Sous l’un des chapiteaux du village du 23 mai, des bénévoles ont donc accueilli les visiteurs en quête de leur histoire.

"Les personnes qui viennent nous donnent leur nom de famille et nous, de notre côté, on fait une petite recherche."  Membre active du CM98 depuis 2016, Béatrice Farouil est désormais la responsable de l’atelier de généalogie au CM98. Objectif : retrouver la première personne qui a porté ce nom. "On a 95% à peu près de retrouvailles". 

Répertorier les patronymes

Cette base de données est accessible sur internet depuis 2012 : www.anchoukaj.org. Pour l’alimenter, des bénévoles se sont penchés sur les registres d’individualité et des nouveaux-libres de Martinique et de Guadeloupe. "C’étaient des registres manuscrits, très difficiles à déchiffrer, explique Chantal. On les a dépouillés minutieusement. Certains registres, malheureusement, ont été détruits, d’autres ont disparu."

En 1848, au moment de l’abolition de l’esclavage, les esclaves ont reçu des noms de la part des officiers d’état civil français. Des patronymes que le CM98 répertorie petit à petit. Et quand un nom figure bien dans la base de données, le bénévole peut partager d'autres informations qui y sont liées. "On trouve le nom de la commune, le matricule de la personne, la date d’affranchissement et éventuellement le lieu d’habitation", détaille Chantal.

Sur le site internet, chacun peut entrer un patronyme dans la barre de recherches et trouver des informations, à condition que ce nom ait été répertorié. La base de données du CM98 comporte plusieurs dizaines de milliers de patronymes de Martiniquais et de Guadeloupéens en majorité. D’autre associations font un travail similaire en Guyane et à La Réunion.

Grâce à ce travail de généalogie, Josée Calodat-Grard a retrouvé six de ses ancêtres. Leurs noms sont aujourd'hui affichés sur le mémorial en hommage aux esclaves inauguré à Saint-Denis en 2013. "Jusqu’à aujourd’hui, j’ai de l’émotion quand je parle d’eux". Écoutez-la raconter le chemin parcouru pour retrouver la trace de ses aïeux : 

Des ateliers hebdomadaires

Outre les informations dématérialisées, le CM98 propose, chaque mardi, un atelier "anchoukaj" ("affiliation") de 17h à 19h, à Paris. D'autres ateliers ont également lieu tous les premiers samedis du mois. Pour y participer, il faut être membre de l’association, l’adhésion est de 30 euros par an.

Pour remonter les décennies sur les traces de son ancêtre, il suffit aux personnes intéressées de se munir "d’un acte d’état civil et on les aide à faire leur généalogie", explique Béatrice Farouil. Les bénévoles du CM98 accompagnent les descendants d’esclaves dans leur travail de généalogie, afin qu'ils remontent les générations grâce aux actes de naissance, de mariage, de décès, ainsi qu’au site des archives nationales d’Outre-mer.
 

Université populaire

Pour aller plus loin, le CM98 propose, un après-midi par mois, des conférences et des séminaires dans le cadre de son université populaire à La Sorbonne-Paris I. Objectif : présenter l’histoire des familles antillaises pendant l’esclavage afin de mieux comprendre la société contemporaine. "On essaie d’expliquer la vie d’aujourd’hui, par rapport à la vie du passé" résume Sabine, elle aussi bénévole.