Angola : la Maison du Zouk, seul musée au monde consacré à la musique antillaise

Luis Paulo Da Silva a créé la Maiosn du Zouk à Luanda en 2012.
Pour les militaires comme les civils, le zouk a joué un rôle important pendant la guerre fratricide qui a déchiré l’Angola de 1975 à 2002. Populaire dès 1985, la musique antillaise reste parmi les préférées. A Luanda, un musée – le seul au monde – lui est même dédié. Il rassemble 10.000 albums.
Elle est située dans le sud de Luanda, à une demi-heure environ de la baie de la capitale angolaise, dans un quartier résidentiel sorti de terre après la fin de la guerre civile. Une maison aux murs orange, barrés d’un grand "zouk" écrit en lettres blanches capitales. À l’entrée trône une statue de Pierre-Édouard Décimus, le co-fondateur de Kassav’, créateur du genre.
 

Une collection de 10.000 albums

Luis Paulo Da Silva Manuel a créé la "Maison du Zouk" en 2012, 10 ans après la fin de la guerre. À l’intérieur, il expose quelques-uns des disques qu’il a rassemblés au fil du temps. Sa collection personnelle, celle de son ami d’enfance aussi, Olivier Green, cofondateur du lieu, et les albums donnés par des fans. Cela représenterait au total environ 10.000 pièces.

Des ancêtres comme la Kadans ou la biguine, jusqu’aux descendants comme l’afro-zouk ou le zouk love…, toute l’histoire du genre musical né aux Antilles il y a 40 ans est retracée. Au mur, un disque de platine de Kassav’ remis à Pierre-Edouard Décimus pour l’album "Majestic Zouk". Dans les vitrines, des vinyles, des CDs, des DVDs. Kassav' bien-sûr, mais aussi Les Aiglons, Super Combo, Francky Vincent, Edith Lefel, Tanya Saint-Val, Jean-Michel Rotin…
Sous les caricatures des membres de Kassav', un disque de platine pour l'album "Majestik Zouk"
 
La Maison du Zouk recense 10.000 albums.

Kassav’ super-star

Pour comprendre les raisons qui ont mené à cette Maison du Zouk, il faut revenir en 1985. L’Angola, ancienne colonie portugaise, a déjà essuyé 10 ans d’une guerre civile meurtrière. Les habitants, simples citoyens ou soldats, cherchent des soupapes pour échapper à un quotidien difficile. Cette année-là, alors que la vie culturelle locale s’est arrêtée, Kassav’ décide de se produire en concert.

La prestation du groupe antillais rencontre un succès phénoménal. 100.000 personnes viennent les acclamer à Luanda. C’est le début de l’histoire d’amour qui, aujourd’hui encore, unit le zouk et l’Angola. Alors que la guerre s’est achevée en 2002, faisant des centaines de milliers de morts, le succès de Kassav’ a perduré.

Après le concert de 1985, Kassav' est revenu à plusieurs reprises en Angola, laissant dans la mémoire des habitants des souvenirs inoubliables. Regardez ce reportage sur le succès de Kassav' en Angola :  

"Pour nous, le zouk, c’est éternel."

Né en Suisse d’un papa angolais et d’une maman haïtienne, Olivier Green assure : "Pour nous, le zouk, c’est éternel. Ça n’a rien d’éphémère." Une chanson du répertoire de Kassav’ a pris une dimension toute particulière en Angola pendant la guerre. "Nous, citoyens, nous avions besoin de quelque chose. "Zouk la se sel medikaman nou ni" avait vraiment un sens pour nous. C’était vraiment un remède."

Luis Paulo et Olivier ont donc l’idée d’ouvrir une Maison du Zouk, pour "ne pas seulement consommer la musique, mais parler du zouk, raconter son histoire, ses artistes". Elle a été inaugurée en 2012 en présence de Pierre-Édouard Décimus et Jacob Desvarieux.

Jocelyne Béroard la visite pour la toute première fois ce lundi 17 septembre, avec les autres membres du groupe, en marge d’un concert de Kassav’ à Luanda. "Être honoré aussi loin de chez nous, c’est touchant, confie la chanteuse de Kassav’. Ça fait énormément plaisir! La chose qui est la plus embarrassante, c’est que ce soit aussi loin, en Angola, qu’il y ait une maison du zouk."

Aux Antilles, même quand il y a des expositions sur la musique, le zouk est un peu largué dans un petit coin, pas vraiment mis en valeur quoi. Je crois qu’il est temps qu’on donne un peu plus d’importance aux choses de chez nous, véritablement, de tout cœur, comme le font les Angolais.
Jocelyne Béroard, chanteuse de Kassav’


Écoutez un extrait de l'interview de Jocelyne Béroard : 
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Un livre retracera l’histoire du zouk

Au terme de la visite, Thomas Bellon, le jeune batteur du groupe, se dit surpris de voir qu’un pays aussi lointain de la Martinique et la Guadeloupe ait tant de connaissances sur le zouk : "c’est juste impressionnant de voir à quel point ces messieurs qui gèrent la maison connaissent, nous connaissent, et même les musiciens […] Ils lisent, ils connaissent par cœur les musiciens qu’ils voient sur les albums, les guitaristes, etc etc !"
L'angola est un pays du sud-ouest de l'Afrique. Il est le deuxième pays lusophone par son étendue et le troisième par sa population

Véritables encyclopédies vivantes, les fondateurs de la Maison du Zouk ont un nouveau projet : écrire un livre qui retracera l’histoire du zouk. Il sera publié en français et en portugais en mai prochain, date à laquelle Kassav’ fêtera ses 40 ans de carrière.

Regardez le reportage réalisé à la Maison du Zouk : 
©la1ere